Beaucoup d'entre vous avez proclamé votre soutien au régime par répartition, mais je redis que la branche retraite ne connaît pas de problème financier insurmontable. Les dépenses n'augmentent pas de façon préoccupante, comme leur part dans le produit intérieur brut. Quant aux recettes, la majorité et la droite ont refusé toute proposition de nouvelles ressources. Votre réforme a un autre but financier. M. Moscovici l'a dit : toute baisse d'impôt doit s'accompagner d'une baisse de dépenses publiques. Nous continuons d'assister à une folle course à la baisse d'impôt, en dernier lieu avec la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Pour atteindre les 3 % de déficit en 2027, vous devez diminuer les dépenses en matière de chômage et de retraite.
Votre réforme a aussi un but productiviste. Cela se voit dans la surcote accordée aux mères qui devront travailler jusqu'à 64 ans bien qu'elles aient les trimestres requis. Qu'elles partent ou qu'elles reçoivent une surcote de 5 %, n'importe quelle étude actuarielle vous dira que financièrement cela revient au même. Vous parlez d'égalité mais votre argument est fallacieux. En réalité, vous faites le choix de produire, produire, produire ! Un tiers des femmes partaient à 62 ans : alors qu'elles auraient pu travailler jusqu'à 64 ans pour avoir une surcote de 10 %, elles ne le faisaient pas. Vous les empêchez de partir en leur octroyant une surcote dans votre grande générosité !
Je remarque aussi que les agents chimiques ont à nouveau disparu des dispositifs de pénibilité. C'est incroyable ! La gauche et les écologistes estiment qu'il faut en revenir à dix critères de pénibilité pour le fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle comme pour le compte professionnel de prévention. Monsieur Savary, vous étiez assez fier, je crois, de l'intégration des agents chimiques ! Et je ne vous redonne pas les chiffres des cancers professionnels. Mais voilà les agents chimiques effacés à nouveau !
Vous parlez de mesures d'atténuation : je suis contente que l'on ne parle plus de mesures sociales ou de mesures d'accompagnement. Vous atténuez quelque peu la brutalité de la réforme, c'est tout. Ces mesures sont évaluées à 6 milliards d'euros, dont 3 milliards d'euros pour compenser des invalidités permanentes alors que vous maintenez le statu quo : pourquoi ? Je n'ai pas de réponse.
Ceux qui ne pourront pas continuer à travailler partiront avant, nous dit M. Woerth. Non ! Partir, c'est avoir le droit de liquider sa retraite. À 61 ans, 28 % des ouvriers travaillent encore : ceux-là, vous allez les faire bosser, et on reparlera plus tard de leur santé. Les autres, les plus nombreux, seront aux minima sociaux, au chômage de longue durée, en maladie de longue durée !
S'agissant des petites retraites, vous dites que 1,8 million de personnes toucheront davantage ; mais il y a 5,8 millions de retraités pauvres, et à la fin seuls 125 000 d'entre eux toucheront 100 euros de plus. Il faut tout dire. Quant au CDI seniors, nous avions compris que vous ne demanderiez aucune contribution aux employeurs, mais c'est pire : vous réussissez à leur faire un cadeau de 800 millions d'euros.