Intervention de Philippe Vigier

Commission mixte paritaire — Réunion du 15 mars 2023 à 9h00
Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023

Philippe Vigier, député :

Ce moment était attendu. Nos collègues sénateurs ont eu la chance de consacrer du temps à cet article 7, qui demande aux gens de travailler plus longtemps.

Regardons comment les partenaires sociaux gèrent l'Agirc-Arrco : ils ont su prendre des décisions courageuses et fixé une borne à 64 ans. Le groupe Démocrate est d'ailleurs favorable à l'idée de donner davantage de responsabilités aux partenaires sociaux pour gérer le système de retraite.

J'entends dire que tout le monde ne pourra pas travailler jusqu'à 64 ans - ce n'est d'ailleurs pas tout le monde, mais seulement six Français sur dix qui pensent que leur état ne leur permettra pas d'aller jusqu'à cet âge. Nous avons tous la même volonté d'offrir à chacun les meilleures conditions de vie et la meilleure retraite. Ne racontons pas n'importe quoi aux agents classés en catégorie superactive : les gardiens du centre de détention de Châteaudun, par exemple, ne travailleront pas jusqu'à 64 ans.

Les très faibles montants des pensions parfois constatés sont liés au déséquilibre du système et au défi démographique auquel nous faisons face. Les chiffres ont la tête dure, et nous nous les prenons en pleine figure. L'évolution du ratio entre actifs et retraités, par exemple dans la fonction publique, nécessite tout de même un peu d'anticipation !

La réforme Touraine, que la gauche de gouvernement de l'époque a fait voter, prévoit quarante-trois annuités de cotisation en 2030. Cette même gauche a exigé des jeunes ayant commencé leur carrière à 17 ans qu'ils ne prennent leur retraite qu'à 62 ans, après avoir travaillé pendant quarante-cinq ans. Je me souviens très bien des saillies des élus communistes de l'époque, qui avaient frappé très fort ! J'aurais aimé que nous ayons un tel débat dans l'hémicycle : cela nous aurait permis de renvoyer chacun à ses déclarations de 2013.

Nous avions demandé depuis le début l'instauration d'une clause de revoyure. On ne peut pas invoquer la démocratie tout en déniant au Parlement le droit d'évaluer une réforme quatre ans plus tard. On ne peut pas non plus débattre des retraites uniquement lorsqu'une nouvelle réforme est sur la table. D'ailleurs, un gouvernement est-il un jour revenu sur une réforme votée précédemment ? Ce n'est jamais arrivé ! Alors qu'Éric Woerth avait eu le courage de fixer l'âge légal de départ à 62 ans, d'aucuns nous ont expliqué il y a quelques années qu'il serait formidable de rétablir la retraite à 60 ans : ils n'ont jamais appliqué leur proposition.

Comme l'a très bien dit M. le rapporteur pour le Sénat, la clause de revoyure permettra de disposer d'une photo avant l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale par chacune des deux chambres : nous verrons ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, par exemple pour les seniors - j'ai dit tout à l'heure que je souscrirais à la proposition qui nous est faite, même si cela ne correspond pas à notre position initiale. Nous pourrons aussi réévaluer les équilibres budgétaires. Quand on voit ce qui se passe à la Bourse depuis trois jours, avec des banques qui sont en train de se casser la figure, on s'aperçoit que les hypothèses qui sous-tendent les modèles sont parfois très fragiles ! Ce n'est quand même pas rien de proposer aux partenaires sociaux de bénéficier d'un éclairage du COR et, je l'espère, de la Cour des comptes pour savoir où nous en sommes précisément.

Certes, l'article 7 impose aux Français un effort complémentaire, et il ne va pas assez loin en matière de petites retraites. Si nous parvenons à accroître le taux d'emploi des seniors, nous devrons consacrer les recettes supplémentaires ainsi perçues à la revalorisation de ces petites pensions.

J'invite enfin ceux qui ont promis la retraite à 60 ans pour tout le monde à réfléchir. Mme Le Pen expliquait pendant la campagne qu'elle revaloriserait les petites retraites pour les carrières pleines. Or nous ne connaissons ni le montant des pensions proposé, ni la décote imposée.

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