Intervention de Robert Catherine

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 2 mars 2023 : 1ère réunion
Foncier agricole dans les outre-mer — Audition de la fédération nationale des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural fnsafer

Robert Catherine, directeur de la Safer Martinique :

Je ne reprendrai pas les propos des présidents Emmanuel Hyest et Rodrigue Trèfle. La Martinique connaît les mêmes problématiques, de manière encore accrue.

En effet, les superficies y sont plus réduites et les Safer ne peuvent intervenir que sur les notifications reçues. Or, moins de 500 hectares sont notifiés chaque année à la Martinique. À titre de comparaison, 23 000 hectares sont notifiés dans les Pays de Loire. Nous avons ainsi des difficultés pour équilibrer les comptes. De plus, nos capacités financières ne nous permettent pas de préempter ces terres dans leur intégralité. La Loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (LAAF) permet certes d'opérer une préemption partielle. Cependant, un propriétaire conserve la faculté de demander la vente de l'intégralité de son bien, y compris lorsque la Safer s'est mise d'accord au préalable avec le Conservatoire du littoral. Du coup, les Safer ne parviennent pas à intervenir.

Le vieillissement des agriculteurs affecte aussi la Martinique. De jeunes agriculteurs sont bien formés, à un coût élevé, mais leur formation demeure théorique. Ils ne bénéficient pas d'une expérience pratique acquise auprès des générations précédentes. Il conviendrait d'inventer un mécanisme d'apprentissage concret, sous forme de pépinières agricoles.

De plus, la population agricole dispose d'une très faible capacité financière. La Safer se trouve donc obligée de se garantir, tant en rétrocession qu'en location. Cela allonge les procédures. Nous mettons en place des mécanismes de portage avec le Crédit Agricole et nous avons passé des conventions avec les Établissements publics fonciers (EPF) pour permettre aux jeunes diplômés sans terre d'accéder au foncier agricole. La Collectivité a mis en place un autre mécanisme, appelé « banque de terres ». Cependant, ce dispositif présente une limite. À terme, l'agriculteur demeure locataire. Il convient donc de proposer un panel de solutions aux jeunes agriculteurs.

Certains outils, comme la CDPENAF, sont remarquables. Cependant, les élus locaux demandent sa suppression du fait de l'avis conforme qu'elles rendent. Cela constituerait un gros recul. Son handicap réside dans le caractère tranché de l'avis de conformité. Il ne peut être que positif ou négatif et empêche toute négociation. En Martinique, nous pratiquons donc des « pré-CDPENAF », afin de concilier les projets de développement de la commune et la préservation du foncier agricole. En effet, la Safer a pour mission de protéger le foncier agricole, mais aussi de favoriser le développement local.

Pour conclure, je voudrais attirer l'attention sur la diminution des superficies foncières. Aujourd'hui, la SAU représente 22 000 hectares, contre 80 000 en 1960. Pendant longtemps, la perte s'élevait à 1 000 hectares par an, pour un petit territoire de 1 100 kilomètres carrés. Grâce à la CDPENAF, elle se réduit, à hauteur de 700 ou 800 hectares par an. Cependant, la Martinique dispose d'environ 20 000 hectares de terres en friche anciennement agricoles. Leur qualification en « terres insuffisamment cultivées », prévue par la loi, pourrait constituer une option.

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