Monsieur le Commissaire, je voudrais tout d'abord vous féliciter pour votre action au sein de la Commission, dans une période difficile. Je souhaiterais aussi vous demander quelques précisions sur le numérique : jusqu'à présent, nous n'avons pas trouvé de solution satisfaisante pour nous opposer à la toxicité croissante des GAFAM, illustrée par la dernière affaire Facebook ces derniers jours. Nous avons cédé à l'argumentaire des plateformes qui se présentent comme de simples hébergeurs des messages émis par leurs abonnés, et non, comme la presse, des éditeurs responsables des contenus. Ce raisonnement est une fiction, puisque ces plateformes ne se contentent pas d'héberger des contenus : au contraire, leur business model aboutit, par l'intermédiaire des algorithmes, à sélectionner les contenus les plus discutables, polémiques et violents, qui génèrent le plus d'émotion, le plus de réactions et d'argent. Par la sélection qu'elles opèrent, ces plateformes sont donc des producteurs de contenus. Elles doivent donc en assurer la responsabilité, comme les éditeurs de journaux. C'est ce que vous avez affirmé il y a quelques mois en indiquant que ce qui est illégal « offline » doit l'être « online ».
J'ai déposé, il y quelques semaines, l'amendement suivant : « Les personnes mentionnées au II. du présent I. - c'est-à-dire les plateformes - sont civilement et pénalement responsables des informations qu'elles stockent pour mise à disposition du public, dès lors qu'elles effectuent sur ces informations un traitement par algorithme, modélisation ou tout autre procédé informatique afin de classer, ordonner, promouvoir, recommander, amplifier ou modifier de manière similaire la diffusion ou l'affichage de ces informations.? » Cet amendement est la traduction littérale d'un projet de loi bipartisan du Congrès américain. Il a été adopté par le Sénat contre l'avis du gouvernement, celui-ci se retranchant derrière le futur DSA.
Pourriez-vous nous indiquer si telle est bien la direction envisagée par la Commission : les producteurs d'algorithmes seront-ils considérés comme des producteurs de contenus, donc des éditeurs ? Sinon, nous resterons dans la même impuissance devant le danger pour les démocraties que représentent désormais les plateformes.