Sur l'identité constitutionnelle, il existe deux positions inconciliables. Le droit européen est un ordre juridique autonome, avec une primauté : on ne peut pas toucher cet ordre par des moyens de droit national. Or le droit européen est applicable en Allemagne, comme en France, en raison du droit national, avec des limites dérivées de l'ordre interne. C'est pourquoi on parle de pluralisme constitutionnel, les deux positions ayant des fondements inconciliables. Dans la pratique, les cas de conflits sont très rares. On pourrait même dire qu'un certain équilibre s'opère via une sorte de séparation des pouvoirs entre les différents niveaux. Pour résoudre les éventuels conflits, il importe de mettre en avant le dialogue.
L'identité constitutionnelle est un cas exceptionnel, s'agit-il d'une sorte de « bombe atomique » ? La jurisprudence allemande a l'effet défensif : nous pouvons remettre en question la primauté du droit de l'Union en invoquant notre identité constitutionnelle. Mais elle a aussi un effet préventif : si une cour nationale comme celle de Karlsruhe est assez forte pour définir le contenu de l'identité constitutionnelle, cela peut avoir un effet de frein en ce qui concerne les nouveaux projets au niveau européen. Nous avons, par exemple, beaucoup débattu des eurobonds, car le fait de les accepter posait un problème d'identité constitutionnelle à la Cour de Karlsruhe. Cet effet préventif est, à mon avis, le plus grand des problèmes. Quoi qu'il en soit, il faut bien distinguer ces deux effets.