l'Association de pharmacie rurale. - Les frais de livraison sont légaux. Certes, ils ne sont pas très élevés, huit euros par commande, mais dans la mesure où les bénéfices sont très faibles, cela suffit à rendre l'opération nulle du point de vue économique. C'est fait pour dissuader et cela marche ! L'essentiel à mon sens est que le pharmacien puisse avoir recours à plusieurs grossistes dans sa zone de chalandise. Les pharmaciens ruraux sont très attachés à la mutualisation des frais de livraison, sur le modèle du timbre-poste, dont le prix est identique en zone urbaine dense comme en zone rurale. Il est important de pouvoir faire appel à plusieurs canaux de diffusion.
La rétrocession est une question importante. Nous sommes en conflit sur ce sujet avec les grossistes-répartiteurs qui craignent que la rétrocession ne devienne industrielle. Comme les pharmacies sont des lieux de vente au public, elles n'ont pas le droit de se substituer aux grossistes. C'est pour cela, plus que pour garantir la traçabilité, que la rétrocession est interdite. La traçabilité n'est pas mise en oeuvre de façon complète en pharmacie. La sérialisation, d'ailleurs, qui complique notre tâche, ne vise pas à renforcer la traçabilité pour le patient : c'est bien un service aux industriels.
Il est difficile de parler globalement des pénuries et des ruptures. Face aux pénuries, nous faisons appel à toutes nos ressources, à tous nos réseaux médicaux, pour satisfaire le patient, y compris en lui conseillant d'aller à l'hôpital.
Les pharmacies rurales sont petites, en moyenne. Elles ont donc mécaniquement tendance à réduire leur nombre de fournisseurs pour concentrer les volumes et obtenir les meilleures conditions d'achat, même si le médicament en France a un prix unique, ce à quoi nous sommes très attachés. Si la plupart des officines font appel à deux fournisseurs, les pharmacies rurales ne peuvent souvent faire appel qu'à un seul, car le second grossiste leur propose des conditions de livraison qui ne sont pas satisfaisantes.
De même, vu sa taille, la pharmacie rurale peut moins aisément avoir un recours direct au fournisseur. C'est pour cela que la rétrocession pourrait être précieuse pour les officines rurales, qui pourraient ainsi s'approvisionner collectivement en se regroupant. Cela ne nous empêche pas d'être attachés à la répartition, mais nous sommes aussi en concurrence dans le cadre d'une enveloppe globale, et l'argent qui va à l'un ne va pas à l'autre... La répartition doit continuer à irriguer le territoire français : nous souhaitons que les pharmacies puissent se voir garantir un minimum de livraisons sans frais, afin que toutes les officines puissent s'alimenter. C'est crucial car leur pérennité dépend du service rendu au patient. Lorsque le service se dégrade, le patient redevient un consommateur et va ailleurs.
Les ruptures sont différentes. Elles dépendent rarement de l'organisation de la chaîne pharmaceutique, même si cela peut se produire, mais cela ne dure guère car l'entreprise OCP Répartition a une organisation nationale qui lui permet de mobiliser ses stocks plus rapidement que les répartiteurs, qui ont une implantation plus régionale, comme les CERP, même si leur périmètre peut être vaste. Il peut y avoir des petits blancs ou des délais dans la chaîne d'approvisionnement, par exemple lorsque les cartons s'empilent chez le grossiste avant d'être enregistrés.
En répartition, les flottes de véhicules sont dédiées et cela va très vite. En approvisionnement direct en milieu rural, en revanche, les colis passent souvent par plusieurs transporteurs successivement entre le laboratoire et la pharmacie, sauf, évidemment, des produits devant respecter la chaîne du froid, car la rentabilité est trop faible pour un acheminement direct. L'idéal serait que l'information sur les ruptures ou les délais parte des laboratoires, mais c'est une contrainte de plus pour eux...
L'Ordre des pharmaciens a créé DP-Ruptures. Une entreprise a créé Vigirupture qui permet aux pharmaciens de déclarer les produits qu'ils ont peur de ne pas vendre. Le système est encore en phase de démarrage. Il est encore peu connu ; il a un intérêt pour les produits qui ne sont pas très demandés, mais est moins intéressant, vu sa pénétration sur le marché, pour des produits recherchés par des patients pour des urgences médicales.