La vétusté de nos écoles, collèges et lycées - le cas du lycée d'Aulnay-sous-Bois, largement médiatisé à la fin de l'année dernière, n'est pas isolé -, leur manque de résilience énergétique, leur inadaptation aux pics de canicule imposent un effort en faveur de notre bâti scolaire. Les périodes de forte chaleur que nous connaissons désormais en juin ainsi que l'explosion du coût de l'énergie à laquelle nous sommes actuellement confrontés soulignent l'urgence de cette réflexion.
L'objectif de neutralité carbone en 2050 pour les bâtiments publics de plus de 1 000 mètres carrés implique un effort massif en matière de rénovation énergétique : la presse a récemment qualifié la rénovation thermique des bâtiments publics français de « chantier du siècle ».
Je citerai quelques chiffres pour souligner l'importance des enjeux.
Au sein des bâtiments publics, les écoles, collèges et lycées totalisent environ 140 millions de mètres carrés, soit la moitié du parc tertiaire des collectivités territoriales. Les écoles représentent environ 30 % de la consommation en énergie des bâtiments communaux. Elles semblent être les bâtiments les plus consommateurs d'énergie, avant les équipements sportifs et les bâtiments socioculturels.
J'ai donc souhaité faire porter cette année le droit de tirage de mon groupe sur « le bâti scolaire à l'épreuve de la transition écologique ».
L'effort d'adaptation des bâtiments scolaires aux impératifs de rénovation énergétique et à tout ce qu'implique le changement climatique impose des travaux ambitieux en termes d'isolation thermique, d'éclairage, de « confort d'été » - protection solaire des façades, végétalisation des extérieurs, etc. J'ajoute que la crise sanitaire a souligné l'importance de la ventilation des bâtiments scolaires.
Ces chantiers pourraient d'ailleurs, par-delà les impératifs de développement durable, être l'occasion de revoir la conception d'ensemble des bâtiments scolaires dans le sens d'une meilleure adaptation aux innovations pédagogiques ; je pense notamment au numérique, mais aussi à la modularité des espaces scolaires. Les projections démographiques sont probablement une raison supplémentaire d'amplifier cette réflexion.
S'agissant de la seule rénovation énergétique, les enjeux budgétaires sont considérables : 40 milliards d'euros seraient nécessaires pour diminuer de 40 % la consommation d'énergie finale des bâtiments scolaires - et encore, il ne s'agit pas à ce stade de neutralité carbone... Ce sujet n'est pas nouveau. Des rapports publics lui ont été consacrés en 2018 par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), puis en 2020. Une cellule « bâti scolaire » a également été constituée au ministère de l'éducation nationale.
Du fait de la complexité des travaux à entreprendre, l'accès aux financements et aux expertises, autant juridiques que techniques, est un sujet en soi. Se pose donc la question de l'efficacité de l'accompagnement des collectivités territoriales dans ce cheminement qui peut être complexe. Divers programmes proposent soutien et conseils aux collectivités, de nombreux leviers financiers existent, tels que la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) : autant d'interlocuteurs potentiels pour les décideurs. Mais est-il facile pour eux de s'y retrouver ?
De même, on accède en ligne à un certain nombre de guides, « boîtes à outils » et simulateurs. Comment les décideurs locaux sont-ils informés de leur existence ? Quelle est leur efficacité ?
Par ailleurs, quelles sont les bonnes pratiques en matière de rénovation des bâtiments scolaires ? Comment choisir le niveau de rénovation et les financements adaptés aux besoins ?
Pour répondre à ces questions, nous allons mettre en place un programme d'auditions et de déplacements.
Outre les représentants des ministères concernés, nous entendrons naturellement les associations d'élus locaux - nous pourrons consulter les élus à partir de la plateforme du Sénat. Nous rencontrerons la communauté éducative - parents d'élèves, syndicats d'enseignants, de chefs d'établissement, sans oublier l'enseignement privé où la problématique se pose en termes différents - ; des experts ; des professionnels - je pense notamment aux architectes - ; des institutions telles que la Caisse des dépôts.
Enfin, nous essaierons d'organiser une séquence de nos travaux avec nos collègues de la délégation aux outre-mer, territoires où la problématique du bâti scolaire se pose en termes différents.
Je souhaiterais également introduire dans notre réflexion une dimension européenne, non seulement en analysant les bonnes pratiques ayant émergé chez certains de nos voisins, si elles sont transposables en France, mais aussi en inscrivant ce sujet dans un cadre juridique européen. Le Pacte vert pour l'Europe prévoyait dès 2019 de « fournir aux États membres de nouvelles ressources financières pour rendre les bâtiments scolaires et le fonctionnement des écoles plus durables » : un bilan s'impose aujourd'hui, d'autant que l'Europe souhaite accroître les moyens mis en oeuvre pour la transition écologique de ses États membres et alors que nous aborderons bientôt l'examen du projet de loi de programmation pluriannuelle de l'énergie.
Pour résumer, l'objet de cette mission d'information est d'évaluer les besoins de rénovation du bâti scolaire liés à la transition écologique, de la maternelle au lycée, en prenant en compte les attentes de la communauté éducative ; d'identifier les défis de cette rénovation, notamment pour les collectivités territoriales, plus particulièrement sur les plans juridique et financier ; d'évaluer l'efficacité de l'accompagnement des collectivités territoriales en termes d'accès à l'information et à l'expertise.