Les modalités de gestion du fonds sont en effet essentielles pour répondre à l'objectif qui lui est assigné. Nous soulignons ainsi l'importance de la préférence européenne dans la mise en oeuvre du Fonds européen de la défense. Le choix des Européens de dégager des crédits doit réellement servir les intérêts européens et contribuer directement à renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne. Nous soutenons donc les mesures de protection des intérêts européens affirmés dans le projet de règlement : les destinataires et sous-traitants participant à une action financièrement soutenue par le fonds devront être établis dans l'Union européenne ou dans un pays associé, c'est-à-dire membre de l'Association européenne de libre-échange et de l'Espace économique européen ; ils ne devront pas être soumis au contrôle d'un pays tiers non associé ou d'une entité de pays tiers non associé ; les infrastructures, installations, biens et ressources de ces destinataires et sous-traitants devront être situés sur le territoire d'un État membre ou d'un pays associé pendant toute la durée de l'action, de même que leurs structures exécutives de gestion.
Le projet de règlement instituant le Fonds européen de la défense prévoit toutefois la possibilité de déroger à ces principes sous certaines conditions. Nous insistons donc pour que ces dérogations ne compromettent pas l'ambition du fonds et qu'elles soient limitées au strict nécessaire. Les dérogations devront répondre à des garanties assurant qu'une telle participation ne serait contraire ni aux intérêts de l'Union et de ses États membres en matière de sécurité et défense ni aux objectifs du fonds.
Nous saluons en particulier le régime de protection de la propriété intellectuelle mis en place afin d'éviter que les droits de propriété intellectuelle ne sortent de l'Union européenne. Nos collègues Ronan Le Gleut et Hélène Conway-Mouret, auteurs d'un rapport sur la défense européenne, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, avaient souligné qu'en agissant ainsi l'Union européenne commençait à adopter une législation comparable à celle des États-Unis en ce qui concerne le contrôle des fruits de ses investissements en matière de défense, de manière toutefois moins stricte qu'aux États-Unis.
Nous avons enfin souhaité évoquer les critiques formulées par les États-Unis d'Amérique à l'égard du fonds, ainsi que la situation du Royaume-Uni.
Les États-Unis d'Amérique ont émis de vives critiques à l'encontre du Fonds européen de la défense, qu'ils analysent comme une volonté de fermer les marchés de défense européens aux entreprises américaines. Or le marché européen est très ouvert aux équipements de défense américains : en témoigne la signature par la Pologne, le 31 janvier 2020, de l'achat de 32 avions de combat F-35-A, sans contrepartie industrielle. La mise en place du Fonds européen de la défense n'y changera rien, et elle n'empêchera pas les États membres d'acheter des équipements américains s'ils le souhaitent. Nous avons donc tenu à faire valoir que la mise en place de ce fonds ne fermait pas les marchés de défense européens aux entreprises d'États tiers, et à inviter, dans une logique de réciprocité, à veiller à l'ouverture des marchés de défense d'États tiers aux entreprises européennes.