Intervention de Marc Bouchery

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 24 janvier 2017 à 17h00
Audition de M. Marc Bouchery directeur général du syndicat mixte aéroportuaire du grand ouest et de M. Jean-Claude Lemasson maire de saint-aignan-de-grand-lieu vice-président de nantes métropole et élu du syndicat mixte aéroportuaire du grand ouest

Marc Bouchery, directeur général du syndicat mixte aéroportuaire du Grand Ouest :

Je dis quelques mots du volet européen. La Commission européenne s'est prononcée, le 13 septembre 2013, lors de la réunion de la commission des pétitions ; le représentant de la Direction générale de l'environnement, saisi par les opposants et par les partisans du projet d'aéroport, avait rappelé la conformité du projet avec le droit européen, indiquant : « La Commission a fondé son avis en constatant, s'agissant tant de la loi sur l'eau que des directives « Habitats » ou des espèces protégées, qu'aucune infraction n'avait été commise par l'État français. Elle a fondé sa décision sur le respect des législations réglementaires européennes et une évaluation jugée satisfaisante des mesures de compensation. Le site, situé en dehors de toute zone Natura 2000, abrite des espèces protégées, mais qui sont présentes dans beaucoup d'autres endroits en France. Ces espèces seront déplacées avant les travaux, qui ne porteront donc pas atteinte à leur survie. »

Pour les collectivités, ce parcours réglementaire et judiciaire est évidemment essentiel ; il a fondé notre conviction que ce projet était indispensable pour les territoires mais aussi parfaitement conforme aux règles en vigueur, sur le plan national et sur le plan européen. D'ailleurs, l'ensemble des recours intentés par les opposants, au premier rang desquels ceux sur les arrêtés environnementaux relatifs à la loi sur l'eau et aux espèces protégées, jugés par le tribunal administratif de Nantes le 17 juillet 2015 et par la cour d'appel de Nantes le 14 novembre 2016, ont conforté ce projet.

En matière de protection de l'environnement, je rappelle quelques éléments donnés par la cour d'appel. La cour a relevé que les projets en cause étaient certes « susceptibles d'avoir des incidences sur les masses d'eau des bassins versants », mais que les masses d'eau affectées par la plateforme aéroportuaire représentaient 1,83 % de la masse d'eau de l'Isac, 0,98 % de celle du Gesvres et 0,03 % de celle de l'Hocmard ; elle a ainsi estimé, compte tenu de la faible surface des masses d'eau impactées, que les autorisations pouvaient être délivrées sans procédure dérogatoire.

Sur la compatibilité des projets avec le SDAGE du bassin Loire-Bretagne, au vu des rapports de la commission du dialogue de 2012 et de la DGAC et du CGEDD de mars 2016, la cour a rappelé que le réaménagement ne constituait pas « une solution alternative présentant un caractère avéré », ainsi que l'exige le SDAGE. S'agissant de la compatibilité des arrêtés avec deux dispositions du plan de gestion et d'aménagement durable du SAGE du bassin de la Vilaine, la Cour a estimé, après analyse des mesures prises, qu'aucune incompatibilité n'avait été constatée.

Enfin, concernant les arrêtés pris au titre des espèces protégées, la cour a estimé que ce transfert répondait bien à une raison impérative d'intérêt public majeur, sans alternative avérée - nous retrouvons la question de l'évitement - et que si les opérations avaient un impact important sur certaines espèces naturelles protégées, elles n'étaient pas de nature à nuire au maintien de chaque espèce dans son aire de répartition naturelle, laquelle s'apprécie aux échelles locale et supralocale.

Pour les collectivités, ces 178 décisions de justice sont essentielles ; elles fondent la parfaite légalité du projet. Jean-Claude Lemasson l'a dit : la mise en place des mesures compensatoires n'est pas de la responsabilité des collectivités, mais du maître d'ouvrage. Leur suivi semestriel et annuel fera l'objet d'une centralisation dans le cadre d'un observatoire de l'environnement. Un comité scientifique indépendant, créé en 2013, sera chargé d'expertiser les travaux. Les collectivités participeront à ce contrôle au sein du comité de suivi des engagements de l'État.

Pour conclure, je souhaite dire un mot sur le démarrage des travaux. Rien, aujourd'hui, à l'exception du blocage illégal et violent du site, n'empêche le début des travaux, ni sur le plan judiciaire ni sur le plan environnemental. Le périmètre de la concession, dont la superficie s'élève à 1 239 hectares, comprend 463 hectares non aménagés qui pourront accueillir les premières compensations environnementales, soit environ 40 % de l'ensemble de la surface.

En outre, en vertu de la loi biodiversité de 2016, les mesures compensatoires peuvent être mises en oeuvre sur des terrains n'appartenant pas au maître d'ouvrage, lequel doit alors conclure des contrats avec les propriétaires, les locataires ou les exploitants. Contrairement à ce que disent certains opposants, notamment, supposé-je, ceux que vous avez auditionnés, des propriétaires et des exploitants sont d'accord pour dédier une partie de leurs terres à ces compensations environnementales ; mais ceux-ci sont aujourd'hui menacés par les occupants illégaux de la ZAD.

Ces occupants interdisent l'accès au site aux maîtres d'ouvrage ou à leurs sous-traitants, dégradent les instruments de mesure, par exemple les piézomètres, saccagent les bureaux d'études, comme celui de Biotope, agressent les scientifiques, comme ceux de l'université d'Angers le 29 avril 2015. Les mesures de compensation ne peuvent donc être engagées. Une ancienne élue du CéDpa, que vous avez auditionné, appelle, dans un de ses livres sur le projet d'aéroport, « à résister, fût-ce en s'opposant à la loi et aux forces de l'ordre ». Dans un tel contexte, où plus de 200 exactions ont été commises à l'encontre des riverains et des exploitants, où les gens sont rackettés, les juges caillassés, beaucoup d'exploitants attendent que la réalisation du projet s'avère irréversible pour se faire connaître officiellement et dédier une partie de leurs terres aux compensations.

C'est d'ailleurs pourquoi les collectivités demandent, notamment depuis le 26 juin et le référendum décidé par le président de la République, l'évacuation du site et le début des travaux, afin de pouvoir respecter le choix démocratique des citoyens, exécuter les décisions de justice, mais aussi engager les compensations environnementales, qui constituent un préalable au projet et ne peuvent pour le moment être effectuées.

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