Intervention de Bérengère Mesqui

Commission d'enquête Rénovation énergétique — Réunion du 27 février 2023 à 15h00
Audition de l'observatoire national de la rénovation énergétique

Bérengère Mesqui, sous-directrice des statistiques de l'énergie :

On comptabilise 5,2 millions de résidences principales comme étant des passoires énergétiques et 7,2 millions avec les résidences secondaires.

Le parc social compte un peu moins de passoires thermiques que le parc locatif privé ou les maisons individuelles. Les petits logements et les logements chauffés au fioul - l'étiquette DPE combinant une partie énergie et une autre partie climat -, sont également plus énergivores. Les passoires sont plus nombreuses dans l'agglomération parisienne. Les ménages du premier quintile dans le parc privé occupent plus souvent des passoires énergétiques que les autres classes de revenus.

En outre, les réglementations thermiques mises en place progressivement démontrent que les logements les plus récents sont plus performants.

Par ailleurs, l'ONRE a réalisé une étude sur le suivi des aides à la rénovation. Nous venons de publier un rapport relatif aux principales aides à la rénovation entre 2016 et 2020.

Nous avons des données détaillées sur le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), qui n'existe plus aujourd'hui, les certificats d'économies d'énergie (C2E), MaPrimeRénov' (MPR) et Habiter mieux sérénité (HMS). Les données MPR sont disponibles assez rapidement, contrairement aux données C2E que nous recueillons avec deux ans de retard, car elles nécessitent un travail important de recodage des adresses, afin d'éviter les doubles comptes.

En 2020, 2,1 millions de logements ont bénéficié en France métropolitaine d'une aide à la rénovation au titre du C2E, du CITE, de MPR et du dispositif HMS, quel que soit le geste de rénovation réalisé. Entre 2016 et 2020, le nombre de logements aidés variait entre 1,7 million et 2,4 millions, selon les années.

En matière d'énergie conventionnelle, en fonction du type de gestes de rénovation, nous calculons des économies d'énergie conventionnelles, c'est-à-dire théoriques, ce qui donne une idée sur l'efficacité des gestes les plus efficaces. En 2020, nos travaux ont montré que des économies d'énergie conventionnelles ont été réalisées à hauteur de 7,7 térawattheures (TWh) par an, ce qui correspond à 1,7 % de la consommation totale d'énergie finale du parc de résidences principales. Entre 2016 et 2020, ce gain énergétique moyen conventionnel s'est accru, passant de 2,8 mégawattheures (MWh) à 3,6 MWh par an par logement.

La plupart des économies théoriques proviennent des travaux réalisés sur le chauffage et l'eau chaude sanitaire (57 %), sur l'isolation de la toiture, des murs et du plancher (38 %), sur les fenêtres, les volets et portes, puis sur la ventilation, dont la part est mineure. La part des économies réalisées avec l'isolation des fenêtres a tendance à décroître dans le temps dans nos statistiques, du fait que le remplacement des fenêtres a été de moins en moins aidé.

Concernant le suivi des aides, nous constatons que ce sont surtout les maisons individuelles qui bénéficient d'aides. Néanmoins, les C2E se distinguent par une part plus importante de logements collectifs, notamment dans le parc social. Les aides MPR et le dispositif HMS ciblent plutôt les ménages modestes ; le versement des C2E est plus équilibré et les ménages aisés bénéficient surtout du CITE.

Les gains énergétiques se retrouvent plutôt concentrés dans une diagonale entre les Pyrénées et le nord-est de la France et sont moins importants dans le bassin méditerranéen, du fait d'un climat moins rigoureux.

Enfin, la troisième et dernière enquête concerne les travaux de rénovation des maisons individuelles (Trémi). Réalisée en 2020 et copilotée par l'Ademe et le SDES, elle visait à mieux connaître les travaux de rénovation réalisés dans les maisons individuelles. Il s'agit de la seule source d'information disponible sur les rénovations non aidées. Cette enquête permet d'avoir des données détaillées sur les travaux, les coûts, la connaissance des dispositifs, les freins à la rénovation et, a contrario, les motivations.

Si l'enquête Trémi de 2020 concerne uniquement les maisons individuelles, nous ne disposons d'aucune information sur la rénovation non aidée de l'habitat collectif - nous essaierons d'y remédier.

Cette enquête montre que, en 2019, 3,1 millions de ménages ont réalisé 5 millions de gestes de rénovation, pour une économie d'énergie conventionnelle de 8,1 TWh par an. Avec les bouquets de travaux, les gains se montrent plus importants : trois postes de travaux ou plus ont représenté 30 % des gains énergétiques en 2019.

S'agissant des gestes, à l'instar des aides, les gains sont d'abord largement liés aux travaux sur les systèmes de chauffage, devant ceux qui portent sur l'isolation des murs, la ventilation, la toiture, le plancher, et enfin l'eau chaude sanitaire.

Nous avons observé également les réductions de gaz à effet de serre selon le poste. Nous retrouvons sensiblement la même classification que pour les économies d'énergie. En revanche, l'impact sur le chauffage est beaucoup plus important. Il s'agit, je le répète, d'économies conventionnelles.

La principale motivation pour les ménages reste la réduction du montant de la facture énergétique. Ainsi, 70 % des ménages qui ont réalisé des travaux de rénovation dans leur maison individuelle déclarent une amélioration du confort thermique ainsi qu'une baisse de leurs dépenses d'énergie.

En ce qui concerne les freins et les blocages, au-delà du fait que certaines maisons sont déjà performantes, le premier d'entre eux demeure la situation financière des ménages au regard du coût des travaux.

Quant à la planification des futurs travaux, il faut savoir que près des trois quarts des ménages qui ont procédé à une rénovation entre 2017 et 2019 estiment qu'ils ont encore des travaux à réaliser, mais ceux-ci n'ont pas été encore planifiés. Là aussi, la question financière pose problème.

En ce qui concerne les travaux que nous avons prévu de mener, le premier concerne l'estimation des gains énergétiques réels. En effet, nous ne calculons pour l'instant que des gains conventionnels, et nous souhaiterions mesurer les évolutions de la consommation des ménages après rénovation. Deux scénarios peuvent en effet modifier les résultats attendus après une rénovation : un effet rebond - on chauffe davantage pour le même prix - et une qualité de travaux moins bonne qu'escomptée.

Dans ce cadre, il est prévu que nous accédions aux données de consommation mensuelles d'un million de ménages qui seront corrélées avec les chiffres des aides à la rénovation. L'objectif est d'évaluer la consommation de ces ménages avant et après rénovation et la comparer à celle des ménages qui n'ont pas rénové.

Un autre projet concerne le renouvellement et l'extension de l'enquête Trémi pour l'étendre aux logements collectifs, c'est-à-dire aux copropriétés de plus de 10 logements - les petites copropriétés sont aujourd'hui sous-représentées dans le registre de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) - et aux logements du parc social. Dans le cadre de cette enquête qui aura lieu à l'automne 2023, seront interrogés les occupants des logements, les propriétaires bailleurs, les bailleurs sociaux et les syndics, afin d'avoir une vision des travaux aussi bien dans les parties privées que communes.

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