Intervention de Simon Huffeteau

Commission d'enquête Rénovation énergétique — Réunion du 27 février 2023 à 15h00
Audition de M. Simon Huffeteau coordinateur interministériel du plan de rénovation énergétique des bâtiments

Simon Huffeteau, coordinateur interministériel du plan de rénovation énergétique des bâtiments :

Je commencerai par des rappels d'ordre général au sujet de la rénovation énergétique des bâtiments avant d'évoquer la structuration et le rôle de la mission. Enfin, je partagerai quelques éléments afin de dresser un état des lieux.

Avant de commencer, je souhaiterais rappeler que j'ai été nommé le 15 juin dernier et que je n'ai pas connaissance de l'intégralité de l'historique de la politique publique ni de celui de la coordination ministérielle. Je vous éclairerai du mieux que je le pourrai, au regard de mes connaissances et des recherches que j'ai effectuées.

En premier lieu, je souhaiterais revenir sur le parc des bâtiments, qui comprend un parc résidentiel et un parc de secteur tertiaire, chacun étant décomposé entre public et privé. Ainsi, le résidentiel compte un parc social, mais aussi un parc de résidences privées et, de la même manière, il existe un tertiaire public - relevant notamment de l'État et des collectivités - mais aussi un tertiaire privé.

S'il existe des segments spécifiques, leur objectif reste commun. Cet objectif est connu et a été formulé dans la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) : assurer une réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 49 % en 2030 par rapport à 2015 et une réduction de 23 % de la consommation d'énergie finale sur la même période. Ces objectifs représentent des efforts importants, mais ne constituent que des étapes vers la neutralité carbone, prévue à l'horizon 2050.

Lorsque l'on considère ces objectifs en même temps que le nombre de logements - environ 30 millions - et de mètres carrés - 1 milliard dans le secteur tertiaire -, on fait le constat que chaque progrès compte, qu'il faut agir vite et même accélérer. Toutefois, il faut garder en tête que la rénovation reste un sujet très complexe. Pour le logement, on touche à l'espace de vie des ménages et en ce qui concerne les entreprises, elles peuvent avoir d'autres priorités, économiques notamment. Par ailleurs, le bâtiment constitue un objet complexe. Structurellement, l'acte de rénovation découle donc de décisions complexes et demeure un acte compliqué. Cette réalité explique aussi le besoin d'une action publique s'appuyant à la fois sur des dispositifs incitatifs et sur des outils réglementaires - obligations et interdictions.

À ce titre, la politique publique choisit des approches différentes selon les segments. Pour le secteur tertiaire, l'approche est davantage basée sur des obligations règlementaires quand, du côté du logement privé, un ensemble d'incitations est déployé, en plus des obligations.

Je souhaite souligner que la coordination gouvernementale a vocation à porter un regard d'ensemblier sur cette politique publique. Cependant, je ne peux pas être derrière chaque action et l'essentiel de mon rôle consiste à m'assurer que l'objectif que je mentionnais, en matière de réduction des GES et de consommation énergétique, reste l'objectif principal poursuivi dans chacun des segments.

Quand on mentionne les objectifs, on se dit que la tâche est urgente. Mais quand on mentionne les échéances, on se dit aussi qu'il s'agit de mener une politique publique de long terme et qu'il faut que les dispositifs mis en place soient suffisamment puissants pour avoir des effets de long terme.

J'en viens à la coordination gouvernementale. La personne qui m'a précédé a été nommée par une lettre de mission cosignée par Emmanuelle Wargon et Julien Denormandie le 1er octobre 2019. Je n'étais pas présent lors de cette création et me base donc sur le contenu de cette lettre. En termes de contexte, les résultats en matière de rénovation énergétique étaient alors jugés comme n'étant « pas à la hauteur ». Il était également fait mention d'une demande d'accélération de la rénovation énergétique provenant des citoyens eux-mêmes et les remontées du grand débat national étaient notamment évoquées. Le contexte de 2019 était bien différent de celui d'aujourd'hui.

En ce qui concerne son rôle, la mission est chargée de mobiliser les acteurs publics dans un cadre mieux coordonné. Les lettres identifient explicitement l'Agence nationale de l'habitat (Anah), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et les filières du bâtiment et de l'énergie. Par ailleurs, l'objectif mentionné est clair et explicite : il faut permettre une accélération significative du rythme des rénovations. Voilà le mandat confié à la mission de coordination. Il s'agit de piloter et de suivre la politique publique, de mettre en place une organisation de manière à produire des résultats de court et moyen termes en matière de rénovation énergétique.

Toutefois, il est bien précisé que ces activités ont vocation à être exécutées sans se substituer à l'action des administrations centrales. À ce titre, la mission de coordination n'est pas une délégation interministérielle et ne s'ajoute pas aux administrations travaillant à la rénovation. Elle constitue un complément et vise à assurer un collectif de travail au sein de l'administration centrale.

Une seconde lettre de mission a été signée le 26 avril 2021 et décrit de manière plus précise les objectifs des mois qui suivent.

Aujourd'hui, la coordination gouvernementale pour le plan de rénovation énergétique des bâtiments est une direction de projet de l'administration centrale. Elle est doublement rattachée à la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) et à la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC). De façon concrète, je rapporte à la directrice générale de la DGALN et suis rattaché d'un point de vue opérationnel au directeur général de la DGEC. Ce rattachement formel s'est fait à l'occasion de la réorganisation de la DGALN et notre mission figure bien dans l'organigramme de cette direction. Cela a été clarifié début 2022.

Nous nous inscrivons dans une démarche de collectif de travail et il ne s'agit pas d'ajouter une couche d'administration ni de faire travailler les administrations contributrices. Nous sommes dans une logique d'animation et faisons partie du collectif DGALN et DGEC qui, au sein de l'administration centrale, élabore et met en oeuvre la politique publique en matière de rénovation énergétique. Nous sommes au carrefour des mondes de l'énergie et de l'habitat, et l'un de nos objectifs consiste à nous assurer que le monde énergie est bien aligné avec celui de l'habitat et que les décisions prises de part et d'autre sont pleinement cohérentes.

Outre l'effectif de mon équipe, il faut compter les dizaines de personnes travaillant à la rénovation énergétique des bâtiments au sein de la DGALN-DHUP - la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages - et de la DGEC - service climat et efficacité énergétique. Il faut aussi ajouter les dizaines de personnes oeuvrant à ces sujets au sein de l'Anah et de l'Ademe, avec lesquelles nous sommes également en relation.

Mme Wargon souhaitait qu'une structure soit consacrée au pilotage de la politique de rénovation énergétique. Tel est bien le mandat de mon équipe !

Nous avons un rôle transversal. Notre mission est organisée en fonction des types d'usagers, et non par types d'outils ou d'aspects de la réglementation, comme le sont classiquement les directions d'administration centrale. Outre mon poste, la mission en compte six : un sur le parcours des usagers au sein du service public ; un sur la rénovation du parc locatif privé et des copropriétés ; un sur l'offre de travaux et la lutte contre la fraude ; et trois sur les bâtiments tertiaires, dont deux sont des créations récentes à la suite du lancement du fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires dit « Fonds vert ». Cet effectif est à comparer avec celui des différentes sous-directions avec lesquelles nous travaillons au quotidien. Nous n'avons évidemment pas la capacité de piloter intégralement la politique publique de rénovation énergétique : notre rôle est de nous inscrire dans un collectif et de l'animer pour atteindre les objectifs assignés.

Depuis la création de la mission en 2020, la politique publique de rénovation énergétique a évolué.

La création de MaPrimeRénov', en lien avec les certificats d'économies d'énergie (C2E), a permis de massifier les gestes de rénovation. En 2019, l'objectif était d'accélérer le rythme des rénovations énergétiques. La politique publique de rénovation énergétique a été érigée en chantier prioritaire du Gouvernement. Le nombre de gestes de rénovation fait partie des indicateurs de suivi. C'est sur cette base que nous sommes évalués.

La loi « Climat et résilience » a instauré de nouvelles obligations.

La création de la bannière unique France Rénov' renforce le service public. Il s'agit de garantir aux ménages une information et un conseil neutres et indépendants. Cette politique publique se fait évidemment en lien avec les collectivités territoriales.

La création du secrétariat général à la planification écologique (SGPE) vise à renforcer la coordination, dans une logique de planification de long terme. L'apparition de ce nouvel acteur change la donne même si, comme elle est récente, nous n'en avons pas encore perçu toutes les conséquences sur le plan opérationnel.

Les dossiers sur lesquels nous intervenons sont nombreux.

Je citerai tout d'abord la mobilisation de la filière afin de respecter les obligations définies par la loi « Climat et résilience » concernant le parc immobilier privé. Un groupe de travail destiné à élaborer une feuille de route sur la rénovation du parc locatif privé est en cours de constitution, sous la présidence de M. Olivier Klein, pour mobiliser la filière et définir les mesures à prendre afin que les interdictions de mise en location puissent être effectives. Il revient à mon équipe de définir les indicateurs de suivi.

Nous sommes associés au dispositif Mon Accompagnateur Rénov', qui est entré en vigueur le 1er janvier 2023, assorti de dispositifs transitoires qui seront valables en 2023 et 2024.

Nous sommes aussi impliqués dans la lutte contre la fraude et l'éco-délinquance ; nous animons un groupe de travail interministériel sur ce sujet.

Enfin, il nous revient de rédiger le chapitre relatif à la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités dans le cadre de la mise en place du Fonds vert.

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