Intervention de Philippe Jurgensen

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 10 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Philippe Jurgensen président du conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme

Philippe Jurgensen, président du conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai prévu une courte présentation ; si vous la jugez trop longue, vous pourrez m'interrompre.

Je rappellerai tout d'abord ce qu'est le conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, le COLB. Il s'agit d'un organisme récent, qui a été créé par un décret n° 2010-69 du 18 janvier 2010. Ce texte, modifié par un décret du 18 mars 2010, puis par quelques petits textes destinés à compléter sa composition, constitue à présent un article du code monétaire et financier.

Le COLB est un organisme nouveau dans son état actuel mais, en fait, il succède à un précédent comité, le Conseil d'orientation du pôle ministériel de lutte contre le blanchiment des capitaux, lequel était seulement inter-administrations. L'aspect nouveau du COLB, c'est de réunir également non pas les professions elles-mêmes mais les autorités de contrôle d'un certain nombre de professions concernées par le blanchiment des capitaux, ainsi que les représentations des différentes administrations concernées.

Le COLB est composé d'un président - personnalité qualifiée désignée pour trois ans renouvelables par arrêté conjoint des ministres de l'économie et du budget, mais après avis du ministère de l'intérieur et de la Chancellerie - et de vingt-trois autres membres, dont neuf représentent l'État. Ces derniers sont issus de tous les services : les douanes, les impôts, le trésor, la police, la gendarmerie, les deux grandes directions de la justice - à savoir la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) et la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) - TRACFIN, bien sûr, qui est le service opérationnel, et la direction des affaires stratégiques du ministère des affaires étrangères.

S'y adjoignent quatorze représentants des autorités de contrôle qui sont chargées de la régulation des professions concernées et doivent s'assurer que celles-ci luttent effectivement contre le blanchiment.

Il s'agit, pour la majeure partie, de représentants des professions du droit : le Conseil national des barreaux, les organes de contrôle des huissiers, des notaires, des administrateurs judiciaires, des commissaires-priseurs, des avocats au Conseil d'État et à la Cour, etc. C'est un peu disparate. Certaines professions comptent de nombreux professionnels, d'autres très peu.

Viennent ensuite les professions du chiffre, notamment les experts-comptables et les commissaires aux comptes : ces derniers sont représentés par le Haut conseil du commissariat aux comptes, le H3C.

S'y ajoutent les organismes en charge de la surveillance de jeux, secteur où le blanchiment des capitaux peut bien évidemment sévir : il s'agit du service central des jeux et, depuis 2011, de l'autorité de contrôle des jeux en ligne, l'ARJEL.

Enfin, et principalement, viennent un représentant de l'Autorité de contrôle prudentiel, l'ACP - en effet, la très grande majorité des déclarations de soupçon vient de facto des banques et des assurances contrôlées par celle-ci - ainsi qu'un représentant de l'Autorité des marchés financiers, l'AMF.

Le COLB est investi d'une double mission.

D'une part, il mène un travail coopératif consistant à coordonner les différentes autorités de contrôle que je viens de citer et les services de l'État : nous sommes donc à cheval entre l'État et les professions. Dans ce cadre, il nous faut assurer la concertation - et dieu sait si c'est nécessaire ! - avec les professions concernées, d'après les textes, par le blanchiment mais qui, en réalité, se sentent plus ou moins impliquées dans l'action concrète.

D'autre part, le COLB est chargé d'un travail d'initiative. De fait, nous sommes tenus de proposer d'éventuelles améliorations aux dispositifs législatifs ou réglementaires. Par ailleurs notre mission revêt un aspect spécifique : nous devons établir et tenir à jour un document de synthèse relatif aux menaces et aux risques en matière de blanchiment et de financement du terrorisme.

Cela dit, notre organisme n'a pas de pouvoir de décision : le COLB est strictement consultatif et concertatif. Tout d'abord, nous n'avons pas d'autorité opérationnelle sur TRACFIN, dont vous allez entendre les représentants, si je ne m'abuse : il s'agit du service chargé concrètement de la lutte contre le blanchiment, et qui est notamment tenu de traiter ces fameuses déclarations de soupçon.

Par ailleurs, nous sommes séparés du circuit de la lutte contre les paradis fiscaux, conduit par M. d'Aubert, délégué général à la lutte contre les juridictions et les territoires non coopératifs - c'est là un merveilleux terme du jargon administratif qui désigne les paradis fiscaux !

En outre, nous ne disposons d'aucun moyen. À mes yeux, c'est le fruit à la fois de la pénurie budgétaire et du fait que l'on n'a peut-être pas tenu à ce que le COLB empiète trop sur d'autres activités. Ainsi, nous n'avons ni budget, ni personnel propre : notre secrétariat est assuré par la direction générale du Trésor.

Quels sont les travaux du COLB ?

Tout d'abord, comme les textes l'exigent, nous avons établi le premier rapport sur les menaces, document visant à recenser - en citant les exemples les plus concrets possible - tous les risques existant en matière de blanchiment et de financement du terrorisme. Ce rapport a été rédigé en 2011. Il a été publié tout récemment, en février dernier, avec, bien sûr, les contributions du Trésor, qui nous représente au GAFI, et de toutes les professions concernées. Ce document a été relu et corrigé.

À ce titre, nous nous heurtons à une difficulté : les exemples doivent être aussi précis que possible sans donner trop d'idées à des malfrats qui n'y auraient pas encore songé... Beaucoup d'entre eux les ont sûrement déjà eues, mais pas dans tous les domaines. Il a donc fallu opérer de délicats arbitrages entre ce qu'il fallait dire et ce que nous devions garder pour nous.

Ce rapport est consultable en ligne sur le site internet du Trésor : son accès est donc très facile.

Ce document devra être actualisé : il s'agit du premier rapport. À nos yeux, une actualisation annuelle est sans doute un peu trop fréquente ; nous avons donc prévu de mettre à jour ce texte tous les deux ans.

Comme M. Carpentier a déjà dû vous l'indiquer, les activités de TRACFIN connaissent un réel progrès, dont nous nous félicitons. Ce service interministériel a été réorganisé par un décret de janvier 2011. Vous le savez, sa nouvelle organisation distingue une grande division, chargée de la collecte du renseignement, et une seconde, en charge des enquêtes approfondies, plus précises, qui, bien évidemment, ne peuvent pas être menées dans tous les cas. Voilà pourquoi la première division trie et la seconde traite les dossiers ! Tel est le nouveau partage des tâches au sein de TRACFIN.

À ce titre, les chiffres sont intéressants : sans doute l'avez-vous déjà observé, le nombre de déclarations reçues a augmenté de 19 % en 2011, pour s'établir à 24 100. En 2009, ce chiffre s'élevait seulement à 18 000 : il s'agit donc d'une progression d'un quart en deux ans.

Un autre aspect mérite également un court commentaire : il s'agit des travaux du groupe d'action financière, le GAFI.

Le GAFI est l'organisation internationale rattachée à l'OCDE qui se charge de piloter la lutte contre le blanchiment des capitaux à l'échelle mondiale. Le GAFI mène des évaluations périodiques de la performance de ses différents membres et, pour la France, l'évaluation a été réalisée récemment : nous avons obtenu une très bonne note, ce qui a déjà dû vous être indiqué. Toutefois, le GAFI nous a également adressé une liste comportant un certain nombre de points à revoir plus ou moins sérieusement. Il soulève notamment le problème de l'implication des avocats dans la lutte contre le blanchiment, et celui des moyens de TRACFIN.

Va ensuite être remis ce que l'on appelle dans le jargon international un rapport de follow-up - un rapport de suite, tout simplement - pour vérifier si nous avons bien corrigé les insuffisances signalées par ce rapport d'évaluation. Ce rapport de follow-up est attendu pour février 2013 : cette échéance est relativement proche, moins d'un an. Ensuite, comme le veut l'éternel retour, un nouveau cycle d'évaluation débutera fin 2013.

Le COLB a dressé un tableau de suivi des quarante recommandations du GAFI, qui nous permet de résumer chaque préconisation et de constater où nous en sommes dans la mise en oeuvre.

Un deuxième travail très important est en cours au sein du GAFI, c'est la révision des standards. On compte ainsi quarante recommandations, auxquelles s'ajoutent neuf autres qui concernent plus spécialement la lutte contre le terrorisme. Cette révision des recommandations est terminée : le 15 février dernier, les nouveaux standards ont été adoptés. Les recommandations sont révisées assez profondément sur certains points.

Je passe rapidement en revue ces novations.

Premièrement, l'approche est davantage fondée sur l'importance des risques. La surveillance est donc plus approfondie sur les risques a priori plus importants. Ce principe figure déjà dans la troisième directive mais sera encore mieux mis en lumière à l'avenir.

Deuxièmement, la lutte contre la fraude fiscale sera incluse de manière plus claire dans les recommandations du GAFI.

Troisièmement, l'examen des financements s'étendra à la prolifération nucléaire, qui est distincte du terrorisme proprement dit.

Quatrièmement, la surveillance des personnalités politiquement exposées, les PPE, sera élargie aux proches de ces dernières.

Cinquièmement, et enfin, les exigences de transparence seront durcies concernant les personnes morales susceptibles d'être impliquées dans des opérations de blanchiment. Les investigations sont nécessairement plus faciles pour les personnes physiques que pour les personnes morales. Concernant ces dernières, on entre rapidement dans le flou, il est donc important de préciser ce point.

À mes yeux, ces standards sont très utiles et bien conçus. Malheureusement, ils ne seront pas applicables tout de suite : de fait, il va falloir engager le mécanisme très lourd de transposition dans une quatrième directive européenne de lutte contre le blanchiment. Ensuite, cette directive devra elle-même être transposée dans la législation nationale.

En outre, les travaux en cours au GAFI vont insister davantage sur la notion d'effectivité du contrôle. De fait, comme on l'observe davantage encore dans le cadre des paradis fiscaux, on déplore, sinon des simulacres - le terme est sans doute trop fort - du moins des contrôles formels qui ont peu de substance réelle. Ainsi, la notion d'effectiveness, pour employer les termes même du GAFI - effectivité, efficience - sera au coeur des travaux futurs.

Pour avancer sur tous ces sujets, le COLB a réuni plusieurs groupes de travail. Trois d'entre eux ont déjà accompli leur mission.

Le premier groupe de travail portait sur la déclaration de soupçon. Je peux vous citer quelques exemples de problèmes rencontrés : comment garder secrète l'existence de déclarations de soupçon, lorsqu'une perquisition est menée ? Cette question semble curieuse, mais il serait bien évidemment très ennuyeux que les clients d'une banque ou d'un expert comptable découvrent que leur interlocuteur a établi une déclaration de soupçon dans leur dos. Or on ne dit pas au client qu'il est soupçonné, car peut-être l'est-il à tort ! Cette situation pose un délicat problème commercial. Les banques et les professions juridiques et du chiffre sont très inquiètes à l'idée que leurs déclarations de soupçon puissent être connues de leurs clients.

De même, les accusés de réception posent problème. Si TRACFIN envoie, par exemple, un accusé de réception à un notaire ayant signalé une situation qui lui a paru un peu bizarre et que cet accusé de réception est vu par n'importe qui, il peut s'ensuivre des situations difficiles.

Le « retour qualité » soulève également des interrogations : comment faire en sorte que TRACFIN renvoie en quelque sorte l'ascenseur à ceux qui lui adressent des déclarations de soupçon en distinguant : « celle-ci est bien conçue, celle-là n'est franchement pas utilisable, vous pouvez mieux faire », etc.

Le deuxième groupe de travail portait sur les échanges de bonnes pratiques : il s'agissait simplement de faire circuler des conseils, des exemples illustrant la manière de fonctionner efficacement, entre des professionnels dont les pratiques et les modes de fonctionnement sont a priori très différents.

Le troisième groupe de travail avait pour objet la sensibilisation des professionnels : il s'agissait d'un travail interne, au sein de chaque profession, pour mieux mobiliser les acteurs. Par ailleurs, TRACFIN participe très souvent à des sessions de formation, de même que les services du Trésor. Ce groupe a également développé la pratique de points de contacts dans chaque profession, au sein desquelles une personne est spécialement chargée d'assurer les contacts avec le COLB, avec TRACFIN, et de prendre en charge les questions de blanchiment.

De surcroît, en vue de nos travaux futurs, un quatrième groupe de travail se penche actuellement sur un problème compliqué, à savoir la conciliation de la lutte contre le blanchiment et du droit au compte.

Certes, tout individu est habilité à détenir un compte bancaire en vertu du droit au compte mais, s'il se livre au blanchiment de capitaux, il faut l'empêcher de détenir un compte bancaire ! Ce paradoxe conduit à des situations rocambolesques : une personne, connue pour être un acteur du blanchiment, ouvre un compte ; la banque le clôture ; le « blanchisseur » invoque son droit au compte et obtient qu'une autre banque lui soit désignée et soit obligée d'ouvrir un nouveau compte à son nom ; bien évidemment, cette nouvelle banque va rapidement clôturer le compte... Ce va-et-vient peut durer très longtemps. Il faut stopper ce carrousel, mais ce n'est pas simple de déterminer la manière de procéder.

Par ailleurs, un travail est en cours au sujet des critères d'alerte concrets et opérationnels permettant de donner à chaque profession les lignes directrices les plus pratiques possible. TRACFIN se penche actuellement sur ce dossier avec les professions concernées.

Enfin, un dernier groupe de travail, également piloté par TRACFIN, se penche sur la question de la monnaie électronique et des cartes prépayées. La monnaie électronique est en plein essor, mais elle peut être une source de blanchiment : comment faire pour améliorer la sécurité des paiements en la matière ?

Je terminerai mon propos en évoquant les difficultés qui persistent avec un certain nombre de professions, dans le cadre de la lutte contre le blanchiment.

Du côté des banquiers et des assureurs - qui représentent près de 90 % des déclarations de soupçon - la coopération a parfois été lente à se mettre en place au début, mais elle est réellement entrée dans les moeurs : les opérations sont contrôlées d'assez près par l'ACP. Bien sûr, nous rencontrons beaucoup plus de difficultés avec d'autres professions entrées plus récemment dans le circuit et qui, parfois, ruent un peu dans les brancards.

Avec les professions du chiffre, nous nous heurtons principalement au problème du secret professionnel. De fait, comme la plupart des professions libérales, celles-ci sont très habituées à respecter scrupuleusement le secret professionnel. La difficulté est d'autant plus grande que les vérifications d'effectivité de la lutte contre le blanchiment, qui doivent être menés par les autorités de contrôle, sont généralement assurés par les organisations régionales de contrôle de ces professions. Il s'agit donc d'un contrôle par les pairs de la même région. Nous nous posons donc la question suivante : comment parvenir à substituer à ce système un contrôle exercé au niveau national ou par une autre région pour éviter ces frictions ?

Concernant les notaires, Jean-Baptiste Carpentier vous a sans doute signalé que nous avons accompli de grands progrès. Les notaires nous ont transmis plus de 1 000 déclarations de soupçon l'an dernier, ce qui signifie qu'ils se remuent réellement ! Toutefois, un conflit subsiste sur la question de la fraude fiscale, et nous ne sommes pas parvenus à le résoudre, malgré des avis juridiques qui nous paraissent clairs. De fait, les notaires estiment qu'ils ne sont pas tenus de procéder à une déclaration de soupçon dans chaque cas de fraude fiscale, qu'ils n'ont pas à déclarer la fraude fiscale sous-jacente, et qu'ils ont simplement à signaler les opérations de blanchiment, partant, à intervenir lorsqu'un mouvement de capitaux est clairement identifié. Or il peut y avoir fraude sans mouvements de capitaux !

Ainsi, l'interprétation diverge et continue de diverger, quoique nous ayons largement examiné cette question au sein de nos groupes de travail : une difficulté de fond persiste en la matière.

Mais - je ne vous apprends sans doute rien - la principale difficulté réside dans les relations avec les avocats. Le nombre de déclarations de soupçon produites par la profession le montre : deux en 2009, zéro en 2010 et une en 2011 ! Sur ce point, on observe un blocage psychologique: la profession, qui est habituée à défendre tout le monde, y compris des délinquants et c'est à son honneur, car chacun doit pouvoir trouver un défenseur, considère que l'on veut la pousser à la délation, ce qui lui est insupportable. Je généralise peut-être un peu, mais c'est tout de même un état d'esprit extrêmement répandu chez les avocats.

Sans doute une partie de la profession fait-elle l'objet d'une sensibilisation un peu plus forte - essentiellement les cabinets de conseil juridique souvent anglo-saxons, qui sont plus habitués à des cultures différentes de la nôtre et savent comprendre les risques : de fait, si on ne dénonce jamais le blanchiment, on peut être soi-même accusé d'avoir été complice d'une opération de blanchiment !

Cependant, les textes ont introduit un verrou dans le système : les déclarations de soupçon ne sont pas transmises directement par les avocats mais par leur bâtonnier. Dans ce système à échelle, les rares déclarations de soupçon établies par les avocats sont adressées aux bâtonniers, qui eux ne les transmettent pas forcément !

Vous l'avez compris, il s'agit d'un problème épineux. Devrons-nous attendre que survienne un véritable pépin, c'est-à-dire qu'un avocat soit coincé dans une affaire de blanchiment ? Dès lors, la profession sera sans doute un peu plus en alerte. Faut-il trouver d'autres solutions ? Certains ont imaginé de passer, par exemple, par les caisses de règlements pécuniaires des avocats, les CARPA. Quoi qu'il en soit, c'est une question difficile.

S'ajoute un autre sujet un peu compliqué. Le barreau de Paris, qui représente tout de même la moitié de la profession, et qui est évidemment très influent, ne siège pas au COLB : c'est le Conseil national des barreaux qui est représenté, tandis qu'une profession très peu nombreuse dispose aussi d'un représentant ; il s'agit des avocats au Conseil d'État et à la Cour, chez qui les affaires de blanchiment sont très rares - d'ailleurs ils ne viennent jamais à nos réunions. Cette situation est tout de même paradoxale !

Malgré tout, la profession fait des efforts, et, à mes yeux, la situation commence à évoluer. Par exemple, les avocats commencent à publier des guides professionnels au sujet de la lutte contre le blanchiment et à organiser des formations pour ceux d'entre eux qui acceptent d'y participer.

Enfin, je souligne que, s'agissant de ces différents problèmes d'implication des professions, un bilan a été dressé, à notre demande, par la Chancellerie. Tout d'abord, une circulaire commune de la DACG et de la DACS, datée de janvier dernier, a détaillé tous les problèmes liés à la transposition de la troisième directive européenne. En octobre 2011, ces deux directions ont adressé une dépêche à tous les parquets pour leur demander de faire le point sur les actions entreprises. Lors du plus récent conseil d'orientation, fin mars, il y a quelques jours, leurs représentants nous ont présenté un bilan d'application de la circulaire, synthétisant les trente-quatre rapports émanant de tous les parquets.

Comme le souligne ce bilan, même si parfois on a observé un léger retard à l'allumage, les parquets ont à présent mis en oeuvre de manière effective les instructions de la circulaire de janvier dernier. Les deux directions considèrent que la mobilisation des professions a été bonne, via des réunions, des séminaires, de sessions de formation, souvent organisés avec le concours actif de TRACFIN. Elles estiment que les démarches de vigilance sont opérationnelles, avec des fiches de veille, des affiches d'information, des sessions de formation obligatoires, des communications en ligne, des plaquettes, des guides, etc. De nombreuses actions se dessinent.

Quant aux inspections professionnelles, on a constaté que les vérifications de leurs autorités de contrôle comprenaient un volet « lutte contre le blanchiment », même si ce volet reste encore un peu formel dans un certain nombre de cas.

La Chancellerie signale toutefois une double difficulté ; ce sont deux sujets sur lesquels nous devons encore progresser. D'une part, les rapports d'inspection sont un peu hétéroclites : il manque ce que l'on appelle une trame d'inspection spécifique, à savoir une sorte de ligne directrice permettant de rendre les rapports d'inspection plus comparables. De l'autre, le statut même de la déclaration de soupçon pose problème ; ce sont les obstacles que j'ai évoqués il y a quelques instants quant à la confidentialité de la déclaration.

S'y ajoute la difficulté, pour certaines autorités de contrôle, d'accéder aux déclarations elles-mêmes. En la matière, des pratiques profondément différentes coexistent : autant l'ex-Commission Bancaire (l'Autorité de contrôle prudentiel) considère que, lorsqu'elle vérifie les questions de blanchiment, elle doit pouvoir étudier les déclarations de soupçon, autant d'autres professions jugent que l'inspecteur n'a pas le droit de lire ces documents. Ce peut être des déclarations purement formelles et sans aucun intérêt ou des déclarations sérieuses, il n'y a aucun moyen de le savoir, et les professions considèrent que leur déontologie leur interdit d'autoriser de semblables vérifications. C'est pourquoi des problèmes assez compliqués subsistent.

J'ai évoqué un peu en vrac ces différents sujets, et je suis à votre disposition, mesdames, messieurs les sénateurs, pour répondre à vos questions.

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