Intervention de Bernard Salvat

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 10 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Bernard Salvat directeur national des enquêtes fiscales

Bernard Salvat, directeur national des enquêtes fiscales :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai en effet prévu de projeter quelques documents pour vous présenter notre direction. Après cette présentation, je répondrai bien entendu à toutes vos questions.

La direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) conduit essentiellement des missions de recherche, à la différence des autres organismes que vous avez pu auditionner jusqu'à présent, qui était peut-être plus tournés vers le contrôle fiscal. Notre organisation vise à collecter et à exploiter l'information. Nous faisons de la détection par différents procédés, dont le plus classique est l'« événementiel », où nous tirons les fils d'un événement qui se produit. Nous utilisons également des procédés plus modernes, comme l'informatique.

Nous conduisons aussi des opérations de recherche. Nous allons chercher l'information par une démarche réfléchie et volontaire. Lorsque nos enquêtes débouchent sur des soupçons de fraude, nous faisons des propositions de contrôle, qui sont dirigées vers des directions de contrôle. Il me semble que vous allez recevoir l'une d'entre elles, la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI). Nous collaborons également beaucoup avec la direction nationale de vérification des situations fiscales (DNVSF) qui travaille sur les gros enjeux liés aux personnes physiques. Nous alimentons aussi les directions de contrôle fiscal (DIRCOFI) implantées à l'échelle régionale.

La mention des plaintes (dans le support) concerne deux autres volets de notre activité.

Tout d'abord, nous alimentons en propositions la nouvelle brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF). Nous soumettons des dossiers, qui passent ensuite par le canal de la direction générale, à la commission des infractions fiscales (CIF). Cela aboutit au dépôt d'une plainte et à une instruction menée par cette brigade.

Le deuxième volet concerne les affaires que nous traitons par nous-mêmes. Il s'agit de la lutte contre les fraudes les plus graves, parmi lesquelles figure la fraude dite « carrousel » en matière de TVA. C'est une spécialité de la DNEF, puisque, comme nous allons le voir dans un instant, nous disposons de vérificateurs et de brigades pour mener ces opérations. En général, ces contrôles débouchent sur des poursuites correctionnelles, ou en tout cas sur des propositions souvent suivies d'effet.

La DNEF a une autre spécialité. Elle a le monopole, en matière fiscale, de la procédure dite du L. 16 B, du nom de l'article du livre de procédure fiscale, qui prévoit la possibilité de procéder à des visites domiciliaires autorisées par un juge. Le juge des libertés et de la détention nous accorde le droit de faire ces visites, durant lesquelles nous sommes accompagnés par des officiers de police judiciaire. Nous saisissons des pièces, dont nous faisons l'exploitation. Ensuite, nous les restituons et, enfin, les étapes de contrôle commencent. Voilà comment les choses se passent.

Enfin, nous produisons un tout petit peu de documentation. Je reviendrai plus tard sur ce point, puisqu'il figure dans le questionnaire.

Voici donc les grandes missions de la DNEF. Vous le constatez, il s'agit essentiellement d'exploitation d'informations, de renseignements et d'un tout petit peu de contrôle pour notre propre compte. En réalité, nous faisons surtout de la programmation pour les autres.

Quels sont nos moyens ? La DNEF n'est pas une très grosse direction, puisque nous comptons, depuis le 1er septembre 2011, 413 personnes. La légère diminution d'effectifs que vous pouvez observer sur le document ne doit pas être mal interprétée. En réalité, au cours des années retracées dans la courbe, nous avons transféré des emplois à TRACFIN qui, en contrepartie, nous envoie de l'information. Il s'agit donc plus d'une continuité de notre action que de suppressions d'emplois. Nous avons aussi transféré des emplois à la BNRDF, qui fait ce que nous ne pouvions pas faire dans certains créneaux. Il s'agit plus, là aussi, de prolonger la lutte différemment que de supprimer des emplois.

Les seules suppressions d'emplois auxquelles j'ai personnellement procédé ces derniers temps viennent du fait que notre système informatique allège les tâches de saisie. J'ai donc rendu trois emplois, ce qui me paraît naturel.

Nous n'avons donc pas désarmé la DNEF face à la fraude. On pourrait dire que nos emplois sont relativement stables.

En matière de moyens budgétaires, nous avons connu des années relativement stables. Cette année, ce n'est clairement pas le cas. Comme vous le savez, les finances publiques imposent des sacrifices aux administrations. Nous en avons supporté notre part, avec une diminution de 23 % de nos moyens de fonctionnement. C'est beaucoup, d'autant plus que les deux tiers, pratiquement, de nos frais de déplacement sont des frais de transport, lesquels ne cessent de croître avec la hausse du prix du carburant. La DNEF est donc très vertueuse. Nous essayons de faire beaucoup d'économies et de préserver le potentiel de lutte contre la fraude. Mais ce n'est pas gagné d'avance.

J'en arrive à la répartition des effectifs. Ne pensez pas que les services dits de direction sont des services purement administratifs. Ces services font beaucoup de travail juridique, notamment du contentieux. Ce très important travail juridique est mené sous des contraintes de qualité fortes, portant notamment sur les procédures de visite et de saisie. Nous visons le « zéro défaut ». Notre travail de révision est donc très important.

Les brigades nationales d'investigation (BNI), sont au nombre de six. Elles font de la recherche sur des secteurs particuliers, qui nous paraissent « fraudogènes ». Je vous en dirai un petit peu plus dans un instant. Ce sont des services d'enquête purs, qui se déplacent un peu moins.

Les brigades d'intervention interrégionale (BII), sont notre service de perquisition. Elles représentent le gros de nos effectifs. Six brigades sont implantées à Paris, et neuf en province, dans les grandes villes comme Lille, Rennes, Bordeaux, Toulouse, Marseille, où il y a deux brigades, Lyon, Strasbourg, Orléans. Les BII sont, si je puis dire, notre bras armé.

Les brigades d'intervention rapides, (BIR) sont au nombre de trois. Il s'agit de brigades de vérification, dans lesquelles travaillent des inspecteurs vérificateurs ainsi que des collaborateurs, des contrôleurs, qui les assistent.

Pour terminer, même si cela n'a pas beaucoup d'importance pour notre sujet d'aujourd'hui, il existe un service à part : la brigade de recherches systématiques (BRS) qui, en réalité, fournit des services de recoupement d'informations auprès des banques ou d'autres établissements, à notre destination comme à celle de tout un ensemble de services essentiellement parisiens.

Voilà la répartition de nos effectifs par grandes missions.

En ce qui concerne l'organisation des services, nous avons quinze brigades d'intervention interrégionale, qui mènent les perquisitions. Les 150 agents qu'elles comptent, de catégorie A et B, sont répartis par brigade d'une petite dizaine de personnes, encadrées par un cadre supérieur. Elles mènent un travail très juridique, contrairement à ce que l'on peut imaginer. Ce ne sont pas des cow-boys ! Ces personnes font un travail très juridique, car tout y est régi par des procédures. Il faut être très attentif, parce que les risques contentieux ou d'invalidation sont nombreux. Ce travail doit donc être très rigoureux.

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