Intervention de Bernard Salvat. - O

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 10 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Bernard Salvat directeur national des enquêtes fiscales

Bernard Salvat. - O :

ui, je vous les ferai parvenir.

Monsieur le sénateur, vous m'avez posé la question des rendez-vous législatifs. Le législatif est plutôt traité par le service du contrôle fiscal (direction générale), qui fait l'interface avec le Parlement. Cela dit, chaque année, nous essayons d'apporter des innovations pour adapter les textes aux procédés de fraude. La création de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale, qui nous donne des moyens nouveaux sur des terrains où nous n'avions pas la possibilité d'intervenir, représente une grande avancée.

La procédure du L. 16 B s'applique aux activités professionnelles. Auparavant, on ne pouvait pas se référer aux notions de faux ou d'usage de faux pour les particuliers, ni aux notions relatives à l'utilisation de structures écrans ou au financement de compte à l'étranger. De nouveaux textes ont donné à la BNRDF des pouvoirs d'investigation et de perquisition sur ces créneaux. En réalité, cela prolonge notre action. La DNEF n'a rien perdu, bien au contraire. Nous programmons la BNRDF, ce qui nous permet d'explorer des champs nouveaux.

Lors de la dernière session parlementaire, nous avons fait modifier le régime de la TVA en matière d'énergie, à la suite des fraudes qui avaient été constatées sur les quotas de CO2 et au regard des risques existant sur le marché du gaz et de l'électricité, où nous avions d'ailleurs beaucoup travaillé à titre préventif. Nous sommes passés au système de l'auto-liquidation de la TVA par l'acquéreur, ce qui évite qu'une personne qui facture, encaisse et ne reverse pas. Ce risque a été éliminé.

Nous avons aussi longuement travaillé, notamment depuis le début du mois d'avril, afin d'obtenir la modification d'un texte relatif pour la téléphonie sur IP. Dans le domaine de la téléphonie par Internet, certains éléments nous laissaient penser qu'il se préparait un « coup » assez important de fraude à la TVA. Nous avons d'ailleurs trouvé une société qui avait fraudé. Là encore, nous avons fait évoluer les textes, et nous sommes passés au système de l'auto-liquidation par l'acquéreur. Il n'y a donc plus de carrousel possible sur ce créneau. Cela se fait donc régulièrement.

Je n'irai pas jusqu'à dire que tout est parfait. Il reste encore des choses à faire. Ainsi, nous aimerions disposer d'armes un peu plus perfectionnées pour lutter contre la fraude. Notre droit de la communication, par exemple, a vieilli. Il est resté ancré dans une conception papier, alors que, aujourd'hui, tout est dématérialisé. Officiellement, nous n'avons pas le droit de demander des fichiers, alors que, sans eux, nous ne pouvons pas travailler. Comment voulez-vous exploiter 80 millions de données si ce sont des photocopies ? Avec 418 collaborateurs, la DNEF mettrait des années-lumière pour y arriver, c'est impossible !

Nous avons mené une opération sur le commerce électronique. Certaines personnes officient sur des sites comme eBay sans se déclarer. Nous avons récupéré 80 millions d'informations. Nous avons demandé le fichier et, heureusement, on nous l'a donné. Je dis heureusement, car je ne pouvais pas exiger la transmission de ce fichier. Or, il est bien évident que de tels dossiers ne peuvent être traités que par la voie informatique. Il faudrait donc un texte qui nous permette de nous faire communiquer des fichiers.

Je vous livre un autre exemple d'actualité. Nous travaillions sur une fraude, réelle, relative à la téléphonie, pour laquelle l'échéance déclarative n'était pas intervenue. Le L. 16 D nous permet de procéder à un contrôle sur une période en cours. C'est très bien, mais le texte nous oblige à attendre les deux mois qui suivent la date de réalisation des opérations ou de leur facturation. C'est absurde : cela revient à donner deux mois aux fraudeurs.

Nous avons récemment évoqué cette question avec le service du contrôle fiscal. Nous allons proposer une modification du texte de manière à pouvoir intervenir beaucoup plus vite, quitte à demander au juge la possibilité de prendre des mesures conservatoires.

Un autre exemple me vient à l'esprit. La réglementation européenne obligerait à attendre un an, au minimum, avant de suspendre le numéro d'opérateur intracommunautaire. Pourquoi attendre un an alors que l'administration détient les éléments montrant qu'une société a un comportement déviant ? En pratique, on ne respecte pas ce délai, mais nous nous exposons à un recours. Toutefois, nous avons le droit pour nous, si je puis dire, car nous savons que la société n'invoquera pas ses turpitudes pour plaider contre l'État. On peut donc le faire, si vous voulez. Mais la réglementation européenne...

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