Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la révolution technologique que nous traversons depuis dix ans a eu pour effet une croissance exponentielle des échanges de données, ainsi que le développement des logiciels de téléchargement d’œuvres musicales ou cinématographiques sur internet.
Le monde de la culture, dans son ensemble, doit faire face à cette révolution technologique et aux bouleversements profonds qu’elle entraîne avec le passage au numérique et la modification des modes de consommation des biens culturels.
Les industriels ont, de leur côté, mis en place les premiers verrous anti-copie pour tenter de protéger les droits des auteurs et, par conséquent, la production artistique elle-même. Cela n’a évidemment pas suffi à enrayer le phénomène du téléchargement illégal, qui n’a cessé de s’accélérer, suivant ainsi l’évolution des supports et des conditions d’échange des œuvres culturelles, avec l’apparition de nouvelles plates-formes et de nouveaux logiciels de téléchargement.
Dans ces conditions, comment la législation peut-elle ne pas avoir en permanence un temps de retard ?
Aujourd’hui, les enjeux économiques de la copie par les particuliers sont considérables, comme en témoignent les chiffres des téléchargements quotidiens de films qui, en France, sont équivalents au nombre d’entrées en salle, sans oublier la chute des ventes de disques de 50 % en cinq ans. C’est donc bien un secteur économique et culturel entier qui est en péril !
Le texte dont nous examinons aujourd’hui la dernière mouture a fait l’objet de nombreuses polémiques, de maints débats et a déchaîné certaines passions, au-delà parfois, il faut bien l’admettre, du raisonnable, notamment sur les bancs de l'Assemblée nationale !
Il est cependant fondamental de revenir à l’essentiel et de ne pas se laisser submerger par l’émotion et la démagogie dont certains ont parfois usé ces dernières semaines.
Aujourd’hui, l’enjeu majeur est bel et bien de protéger la création culturelle. Pour réussir, l’étape pédagogique est incontournable : responsabiliser, notamment les plus jeunes qui sont aussi les principaux utilisateurs des nouveaux moyens de communication. Notre capacité à sensibiliser les consommateurs à la notion de droits d’auteur conditionnera la réussite du sauvetage de la production artistique.
L’ère du numérique est une opportunité sans précédent pour la culture. L’accès à de plus en plus d’informations pour le plus grand nombre représente un potentiel extraordinaire que nous devons apprendre à apprivoiser et à utiliser à bon escient. Mais, bien évidemment, cela ne devra jamais se faire au détriment des artistes. Il va de soi que leur protection est au cœur de nos préoccupations à tous.
Le compromis auquel la commission mixte paritaire est parvenue et auquel j’ai eu l’honneur de contribuer me semble tout à fait équilibré, même s’il n’est pas toujours satisfaisant ; mais c’est bien là le propre des compromis et des équilibres.
Le texte sur lequel nous allons devoir nous prononcer tout à l’heure sera parfois difficile à appliquer, mais il invite surtout au respect de la création artistique.
Le principe de riposte graduée, qui s’appliquera dans la sphère familiale et éducative, m’apparaît comme un bon outil, efficace et pédagogique, à l’égard des utilisateurs d’internet plus ou moins mal intentionnés.
Les pirates sanctionnés par la loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, dite loi DADVSI, le seront en vertu du délit de contrefaçon des droits voisins.
Par ailleurs, la limitation du débit des internautes « pirates » ne semblait pas une solution adaptée. La suspension de leur connexion est une sanction compréhensible et proportionnée. Dans le cadre des offres dites triple play, seule la connexion internet sera suspendue ; l’accès aux autres services ne le sera pas. C’est une bonne disposition.
Il a aussi été décidé en commission mixte paritaire, à juste titre de mon point de vue, de ne pas accompagner la suspension de la connexion internet d’une dispense du paiement de l’abonnement. Il ne s’agit là nullement d’une double peine ; il s’agit tout simplement d’une mesure d’équité et de justice.