Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais vous rendre compte des conclusions de la commission mixte paritaire du jeudi 2 avril sur un texte qui constitue, déjà, le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Sur les vingt-quatre articles qui restaient en discussion, les membres de la CMP ont arrêté leurs positions par consensus ou à l’unanimité. Ce point mérite d’être souligné et témoigne de l’esprit de responsabilité des deux assemblées dans le contexte économique difficile que nous connaissons.
Les deux chambres avaient largement modifié le texte initial, qui comportait huit articles, avec un léger avantage pour le Sénat, qui a inséré treize articles additionnels, tandis que l’Assemblée nationale n’en a introduit que douze.
La CMP a confirmé la décision du Sénat de supprimer deux articles. Il s’agissait d’initiatives tendant à revenir sur des dispositifs introduits tout récemment.
Le premier, l’article 8 C, visait à autoriser les préfets à déroger, au cas par cas, à la règle de l’exclusion des communes classées dans la zone C prévue pour l’application du régime d’incitation fiscale à la construction dit Scellier-Carrez. Le Sénat a décidé de supprimer cet article, d’une part, pour des raisons d’ordre constitutionnel, d’autre part, parce qu’il semble préférable d’attendre la parution du décret annoncé, qui doit modifier le classement de plusieurs centaines de communes pour l’adapter à la réalité du marché immobilier.
Le second, l’article 8 D, concernait le régime des sociétés holdings dans lesquelles des contribuables assujettis à l’ISF sont en mesure d’investir. La commission mixte paritaire a bien voulu se ranger à ce que j’appellerai la « doctrine » de la commission des finances du Sénat en la matière : l’intermédiation ne doit pas être trop encouragée, car le fondement même de cette mesure fiscale favorable – au demeurant excellente pour les fonds propres des petites et moyennes entreprises – réside dans la prise de risque, qui passe par l’affectio societatis. Tout système qui faciliterait une mutualisation excessive du risque nous semble donc contraire aux objectifs fixés dans la loi TEPA adoptée en 2007.
La commission mixte paritaire a validé trois grandes catégories d’adaptations aux dispositions votées par l’une et l’autre assemblée : les mesures de réglage du plan de relance ; les ajustements à la marge, qui sont plutôt des corrections techniques de régimes fiscaux récents ; l’introduction de mesures de régulation dans le contexte actuel de crise mondiale.
Pour ce qui est des mesures de réglage du plan de relance, l’allégement de l’impôt sur le revenu des foyers de condition moyenne, disposition phare du présent projet de loi, a été adopté conforme. Les articles qui restaient en discussion présentaient souvent un caractère très technique et visaient, notamment, les modalités d’intervention de la société de financement de l’économie française ou l’extension de la liste des collatéraux éligibles à ces interventions.
Dans le même esprit, afin de réamorcer les circuits de financement, le Sénat avait adopté un amendement permettant d’étaler sur la durée du contrat de crédit-bail le montant de la plus-value de cession.
Sur l’initiative de la commission des finances et avec l’appui du Gouvernement, le Sénat avait introduit à l’article 1er ter une mesure permettant à des entreprises endettées de racheter leurs dettes à un prix décoté ; l’objectif était d’améliorer la liquidité bancaire et le bilan des entreprises concernées. Comme on pouvait le prévoir, la CMP a partiellement réécrit cette disposition, avec le concours des meilleurs spécialistes.
Au titre des mesures en faveur de la relance, la commission mixte paritaire a approuvé la création du Fonds de sécurisation du crédit interentreprises. Ce dispositif, que vous avez souhaité introduire, monsieur le ministre, tend à éviter que des entreprises, notamment des PME, ne soient mises en danger par la défaillance du marché de l’assurance-crédit. Le Fonds de sécurisation du crédit interentreprises est ainsi autorisé à couvrir, à titre onéreux, un montant maximal de 5 milliards d’euros de crédits non pris en charge par les assureurs-crédit. Ce mécanisme tire les conclusions du succès très partiel, à ce jour, du complément d’assurance-crédit public adopté lors de la discussion, en décembre dernier, du projet de loi de finances rectificative pour 2008.
Enfin, il a été ajouté, dans cet article 1er ter, un dispositif spécifique de réassurance relatif aux constructeurs de maisons individuelles.
J’en viens à l’ajustement de certains régimes fiscaux récents ou, plus exactement, aux initiatives que nous avons prises pour mieux coordonner des dispositifs et éliminer certaines scories.
À l’article 8 DA, la commission mixte paritaire a adopté, dans le texte du Sénat, l’amendement de notre collègue Yann Gaillard visant à aménager le régime du crédit d’impôt dont bénéficient certaines productions cinématographiques.
Aux articles 9 et 9 bis, elle a adopté les mesures introduites par le Sénat et qui tendent, d’une part, à préciser la portée du prélèvement sur les ressources financières des organismes d’HLM insuffisamment actifs – il s’agit d’un amendement du groupe de l’Union centriste – et, d’autre part, à clarifier la position statutaire des directeurs desdits organismes au regard de leurs cotisations de retraite.
L’article 8 B, qui vise à aménager le régime de la réduction d’impôt pour les loueurs en meublé non professionnel dans les résidences avec services, a été adopté dans le texte du Sénat, de même que l’article 8 F, qui a pour objet de réparer une imprécision rédactionnelle de la loi de juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, en rappelant que le commandement de payer a bien pour effet d’interrompre la prescription.
Toujours au titre des ajustements ponctuels, j’évoquerai l’article 8 G qui, sur l’initiative de la commission des finances du Sénat, tend à rendre déductibles les rachats d’années d’études dans les régimes spéciaux de retraites.
J’en arrive aux mesures de régulation. La crise change la donne et fait apparaître sous un jour très cru certaines pratiques de rémunérations qui, lorsqu’il s’agit d’entreprises bénéficiant de l’aide de l’État, choquent le Parlement comme l’opinion.
Dans un premier temps, le Gouvernement avait, par voie réglementaire, visé les entreprises bénéficiant de l’intervention publique, notamment sous la forme de mesures destinées à renforcer les fonds propres des banques.
Avec mon collègue Gilles Carrez, rapporteur général de l'Assemblée nationale, je ne peux que me féliciter de l’adoption par la commission mixte paritaire de l’article 11 tendant à encadrer les rémunérations des dirigeants des entreprises aidées par l’État. Vous n’êtes pas sans savoir, mes chers collègues, que cette mesure résulte d’un amendement présenté par le président Jean Arthuis. Cette disposition renforce la portée du décret du 30 mars 2009, tout en en reprenant l’architecture.
Le texte, adopté à l’unanimité par la commission mixte paritaire, prévoit une intervention de l’État à trois niveaux.
Pour les entreprises bénéficiant des prêts de la société de financement de l’économie française, les conventions passées avec l’État comporteront un volet relatif aux rémunérations des dirigeants.
Pour les entreprises bénéficiant de l’aide de la société de prises de participation de l’État ou du plan de soutien à la filière automobile, l’État pourra interdire l’attribution de stock-options ou d’actions gratuites aux dirigeants. Il sera également susceptible d’encadrer les autres éléments de rémunération des mêmes dirigeants.
Enfin, les entreprises publiques et celles qui bénéficient des interventions du Fonds stratégique d’investissement devront adopter des règles pour encadrer les rémunérations de leurs mandataires sociaux et de leurs dirigeants.
Le décret du 30 mars s’applique pleinement jusqu’à l’entrée en vigueur du nouveau dispositif : il n’y a ni hiatus ni délai !