Intervention de Christiane Lambert

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 21 décembre 2016 à 14h05
Audition des représentants de la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles fnsea de l'assemblée permanente des chambres d'agriculture apca de coordination rurale de la confédération paysanne et de jeunes agriculteurs

Christiane Lambert, vice-présidente de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) :

La compensation écologique est perçue comme une obligation réglementaire par les agriculteurs. Les premières expériences ont été peu concluantes. Depuis, la réussite de certaines opérations a fait quelque peu évoluer le regard. La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a instauré les obligations réelles environnementales et a reconnu le rôle des agriculteurs dans le maintien de la biodiversité. Des initiatives professionnelles pour définir des contrats de prestation de services environnementaux ont vu le jour. Nous regrettons toutefois que l'accent ne soit pas assez mis sur les autres mots de la séquence « éviter-réduire-compenser » (ERC). Eviter est essentiel. Limiter la consommation de foncier permet de réduire les pertes de biodiversité et de potentiel économique. Réduire est aussi important.

La compensation est parfois perçue comme une contrainte. Il y a des confusions entre les responsabilités du maître d'ouvrage et celles des agriculteurs. Le maître d'ouvrage doit compenser, mais c'est sur les terres de l'agriculteur. La confusion est maximale quand l'État est maître d'oeuvre, car il cherche à compenser en périphérie, comme ce fut le cas pour des opérations de contournements ou pour la construction de routes nationales. Les impacts économiques ou logistiques, lorsque des exploitations sont fragmentées, doivent faire l'objet d'une estimation précise. On ne comprend pas toujours le coefficient multiplicateur. Dix pour un, c'est souvent excessif ! La règle du « un hectare pour un hectare » devrait prévaloir. La concertation en amont avec les agriculteurs doit être améliorée ; les chambres d'agriculture se sont dotées de services d'aménagement qui travaillent en lien avec les syndicats agricoles. Il conviendrait aussi d'associer les agriculteurs à la réalisation des inventaires d'espèces. Les chambres d'agriculture et les organisations agricoles disposent d'experts compétents. Enfin, pour que les compensations soient opérationnelles, les agriculteurs doivent être associés à la rédaction des cahiers des charges.

Nous sommes attachés à un cadre juridique stable. Les contrats de prestation de services environnementaux sont une avancée en ce sens. La profession s'est mieux organisée. Aujourd'hui on parle de marché de compensation. N'oublions pas que les agriculteurs sont des acteurs de la compensation, des producteurs de biodiversité. Celle-ci a de la valeur. Si l'on nous demande des mesures supplémentaires en faveur de la biodiversité, il est normal de rémunérer ce travail utile à la société et de compenser les éventuels surcoûts. Nous sommes attachés au caractère volontaire et opposés à l'acquisition foncière par le maître d'ouvrage car il est possible de concilier l'activité agricole et la restauration de la biodiversité. Partout, dans le Finistère, le Loir-et-Cher ou la Marne, les responsables des fédérations départementales tiennent des réunions locales pour présenter les contrats de prestation pour services environnementaux. Les agriculteurs prennent conscience que la biodiversité est une richesse à préserver et qu'ils ont un rôle à jouer en la matière. La loi sur la biodiversité a facilité cette reconnaissance.

Les organisations agricoles doivent être associées en amont. Lorsque les maîtres d'ouvrage réduisent la concertation, ils créent les germes du conflit. Les interlocuteurs ne manquent pas : chambres d'agriculture, syndicats agricoles, bureaux d'études locaux, etc. L'acquisition foncière est souvent une solution de facilité. Elle pose aussi des problèmes de responsabilité.

La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a créé les obligations environnementales. Elles étaient présentées à l'origine comme une servitude, une obligation sans contrepartie ; aujourd'hui il est écrit qu'elles peuvent donner lieu à des contrats de prestation de services environnementaux. La FNSEA est en première ligne pour expliquer la démarche aux agriculteurs. Enfin, beaucoup de terres sont exploitées en fermage : dans ce cas, le fermier doit être aussi associé.

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