Intervention de Rachid Temal

Commission d'enquête Combattre la radicalisation islamiste — Réunion du 12 décembre 2019 à 9h35
Audition de M. Mohammed Sifaoui journaliste écrivain et réalisateur

Photo de Rachid TemalRachid Temal :

Merci pour la clarté de votre exposé, qui a permis de remettre dans une perspective internationale la montée de l'islamisme.

Sur les questions de définition et de sémantique, le terme « idéologie islamiste » me paraît effectivement plus adapté car il a le mérite de pointer une ambition totalitaire derrière ce concept.

Sur la question des ghettos, les fameux « territoires perdus de la République » ont en réalité été abandonnés par celle-ci. C'est bien ça le point de départ. On ne me fera pas croire que des gens cumulant des handicaps sociaux ont décidé de se mettre ensemble pour vivre dans la misère. Ce n'est pas la réalité. Évidemment cela n'excuse rien ensuite. Mais il me paraît important de le rappeler.

Merci également pour vos propositions qui sont importantes.

J'ai relevé une contradiction dans votre propos, ou bien alors ai-je mal compris, s'agissant du CFCM. D'un côté, vous dites que personne, dans les pays musulmans, n'a réussi à mettre en place un clergé sunnite. Vous avez raison, la plupart de ces États ne sont pas laïcs et les religions sont donc directement contrôlées. Et en même temps, vous consacrez le CFCM en préconisant d'extraire de sa composition ceux qui ne seraient pas républicains.

S'agissant de la Fondation pour l'islam de France, elle était censée porter la question du financement pour éviter le recours à des fonds étrangers - point sur lequel je suis en total accord - et permettre à l'islam de France de ne pas être tenu par les consulats étrangers. Au passage, il s'agissait d'en finir avec l'infantilisation et d'avoir des citoyens français musulmans. À l'époque, le choix de Jean-Pierre Chevènement pour siéger à la tête de cette instance consultative avait été bien accueilli.

Mais je me rappelle surtout à l'époque - je me permets de vous livrer une anecdote - que le journal Le Monde s'était félicité, dans un article, de la constitution d'un « islam de France » et immédiatement sur la même page un autre article se félicitait que « les pays arabes saluent la nomination de Jean-Pierre Chevènement ». Voilà qui illustre parfaitement la schizophrénie française. On demande aux musulmans d'être des citoyens à part entière mais en même temps on leur demande de participer à des manifestations... en tant que musulmans ! On dit qu'il faut séparer l'islam de France des pays d'origine mais en même temps on est contents de leur présence... bref, comment fait-on, dans ces conditions, pour créer tout simplement un islam en France ?

La puissance publique doit clarifier sa position vis-à-vis des musulmans dans notre pays. Elle ne peut pas continuer à jouer avec eux en permanence en les considérant tantôt comme des musulmans, tantôt comme des citoyens. On dit souvent « les musulmans » pour désigner une catégorie de population. Personnellement je ne sais pas à quoi cela correspond. De même que le chiffre de 30 % entendu ici ou là. À quoi fait-il référence ? De qui parle-t-on ? Je crois que devons faire attention aux mots, et envisager les musulmans de la même façon que nous envisageons les juifs ou les chrétiens, c'est-à-dire comme des citoyens.

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