Intervention de François Pinte

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 15 février 2017 à 17h50
Audition de M. François Pinte premier vice-président et Mme Estelle Sandré-chardonnal directrice générale en charge des transports et de l'environnement du conseil régional des pays de la loire

François Pinte, premier vice-président du conseil régional des Pays de la Loire :

Vous avez souhaité que la région des Pays de la Loire soit auditionnée dans le cadre de la commission d'enquête sur la réalité des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité engagées sur des grands projets d'infrastructures. Vous m'avez adressé, avant cette audition, un certain nombre de questions auxquelles je vais m'efforcer de répondre. Je veux en introduction, préciser que la collectivité des Pays de la Loire, qui est membre du syndicat mixte aéroportuaire du Grand-Ouest (SMA), souscrit totalement aux déclarations qui ont pu être faites par son secrétaire général. Les membres du SMA ont une même position, quelle que soit leur couleur politique. Pour rappel, l'ensemble des collectivités représentées et leur exécutif respectif ont été élues sur un soutien transparent au projet de Notre-Dame des Landes. Le projet a reçu par ailleurs un soutien encore plus clair à l'occasion de la consultation populaire du 27 juin 2016, qui a abouti à 55 % pour le oui avec une participation supérieure à la participation aux élections locales traditionnelles. La région des Pays de la Loire constitue la principale collectivité financeur du SMA avec 40,5 millions d'euros sur les 115,5 millions d'euros prévus ; le solde étant assuré par la région Bretagne, Nantes Métropole, le Conseil départemental de Loire-Atlantique, les agglomérations de Saint-Nazaire et de la Baule. Les représentants du SMA ont pu préciser, à l'occasion de leur audition, notre vision commune de la démarche éviter, réduire, compenser (ERC) sur le projet de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. J'y reviendrai dans quelques instants.

Je souhaite préciser le rôle de la région dans la mise en oeuvre de la séquence ERC. Comme vous le savez, pour les projets d'infrastructures routières, ferroviaires et aéroportuaires, ce sont les maîtres d'ouvrage qui sont chargés de réaliser une étude d'impact et de travailler sur la séquence éviter-réduire-compenser liée à leur projet. L'État a la responsabilité d'instruire dans le cadre de ses procédures réglementaires - loi sur l'eau, dérogations espèces protégées, autorisation de défrichement - les demandes d'autorisation ou de dérogation déposées par les porteurs de projet, et de déterminer dans ce cadre si la séquence ERC a correctement été déclinée. C'est l'État qui délivre ces autorisations. Réglementairement, la région n'est donc pas associée à cette procédure d'instruction des projets. Nous pouvons par contre y être associés dans le cadre de structures porteuses dont nous sommes membres - comme le SMA ou le conseil d'administration du Grand port maritime. Nous sommes également associés pour donner un avis sur cette séquence ERC au travers des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), où nous siégeons et qui donnent des avis sur les projets ayant un impact sur l'eau ou sur les zones humides. Cela a été le cas pour le projet de Notre-Dame-des-Landes, où le SAGE Estuaire de la Loire a donné un avis au titre de la loi sur l'eau. Plus globalement, la région possède des compétences en matière de biodiversité et d'environnement. Ainsi, la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) nous a confié un rôle de chef de file en matière de biodiversité. Nous avons également co-élaboré avec l'État entre 2010 et 2015 un schéma régional de cohérence écologique (SRCE). Ce schéma arrêté par le Préfet en octobre 2015, comporte un diagnostic des enjeux liés aux continuités écologiques et l'identification d'une trame verte et bleue à l'échelle régionale. Il s'agit d'un outil d'aménagement durable du territoire pour contribuer à un état de conservation favorable des habitats naturels et au bon état des cours d'eau. Les documents de planification comme les schémas de cohérence territoriale (SCoT) ou les plans locaux d'urbanisme (PLU) et les projets de l'État et des collectivités territoriales doivent prendre en compte les SRCE. La séquence ERC doit être mise en oeuvre par les maîtres d'ouvrage en prenant en compte cette trame verte et bleue inventoriée dans le SRCE, en veillant à éviter, réduire et compenser toute atteinte à ces continuités écologiques. Ainsi, la région intervient-elle en amont pour définir le cadre et les outils qui permettent, à l'échelle régionale, de travailler sur la séquence ERC projet par projet. Ce SRCE sera d'ailleurs intégré dans le futur schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) que la région va élaborer d'ici mi-2019.

La région, au travers de ses services et de ses élus, dispose de compétences techniques sur la protection de l'environnement et sur la séquence ERC. Nous échangeons régulièrement avec les services déconcentrés de l'État, en particulier de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), sur les sujets relatifs à l'eau, à la biodiversité et aux déchets. Nous avons également développé des partenariats dans le domaine de la protection de la biodiversité, qui nous permettent de favoriser des actions exemplaires et de sensibiliser aux enjeux environnementaux. C'est le cas par exemple de notre partenariat avec le Conservatoire des espaces naturels dont nous avons soutenu l'émergence et dont nous sommes membre. Cette association est sollicitée par l'État ou des maîtres d'ouvrage pour devenir gestionnaire de mesures compensatoires, suite à des aménagements.

Vous me demandez si les collectivités territoriales ont une bonne connaissance de la séquence ERC. Il est difficile de répondre précisément à cette question. Il est probable qu'une région, un département, une agglomération, une intercommunalité ou une commune rurale n'ont pas la même connaissance de cette séquence. Cela dépendra de la taille de la collectivité - dispose-t-elle d'un service avec des ingénieurs spécialisés ? - ainsi que de son vécu : une collectivité qui porte de nombreux projets de développement économiques ou d'aménagement du territoire à toutes les chances de connaitre cette séquence ERC, qu'elle a eu le temps de s'approprier lors de l'émergence d'un projet. Ce vécu introduit un décalage avec des collectivités notamment rurales où les projets sont peu nombreux et certainement moins impactants sur la biodiversité.

Ensuite, sur le cas plus précis du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, qui intéresse votre commission d'enquête, je souhaite vous apporter des éléments plus précis sur la manière dont la séquence ERC a été travaillée. Nous y avons été étroitement associés dans le cadre du SMA. La région a été en permanence associée, tant par la DREAL que par AGO, à la mise en place de cette séquence ERC. Chaque mois, une revue mensuelle de projet réunit les services de l'État, le maître d'ouvrage et le syndicat mixte, afin de suivre l'ensemble des sujets y compris sur la biodiversité et l'environnement. Il existe de plus un comité de suivi des engagements de l'État et des collectivités territoriales qui associe les élus et qui a pour mission de suivre la méthode de compensation. En outre, la région a toujours veillé à ce que le sujet de la biodiversité et des compensations soient bien pris en compte. D'ailleurs, sur le projet de Notre-Dame-des-Landes, la méthode choisie présente un caractère précurseur, en proposant une compensation fonctionnelle plutôt que surfacique, en privilégiant ainsi la qualité de la fonctionnalité à la compensation par hectares, beaucoup plus impactante pour le monde agricole.

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