À ma connaissance, non. Il est important de rappeler que le Conseil national de protection de la nature (CNPN) a donné un avis favorable le 5 juillet 2012 et qu'un protocole sur la réalisation des mesures compensatoires a été conclu le 23 décembre 2013 entre l'État, AGO et la chambre d'agriculture. La chambre d'agriculture a également conclu un protocole avec la profession en 2008 permettant d'accompagner la relocalisation des exploitants. Grâce à ce protocole, plus d'une trentaine d'exploitants sur quarante concernés directement, soit 80 %, ont accepté une relocalisation ou une éviction à l'amiable. Je rappelle également que la profession agricole a été largement associée à la mise en place d'un périmètre de protection des espaces agricoles naturels (PPEAN) de 17 000 hectares entre l'agglomération nantaise et le site de l'aéroport. Cela représente trois fois la ville de Nantes et plus de cent fois la surface artificialisée de l'aéroport. Enfin, la Commission européenne s'est prononcée favorablement sur ce dossier le 13 septembre 2013 lors de la commission des pétitions où le représentant de la direction générale de l'environnement a confirmé la conformité du projet avec le droit européen en déclarant. Je cite : « La commission a fondé son avis en constatant tant sur la loi sur l'eau, sur les directives habitat ou sur les espèces protégées, qu'aucune infraction de l'État français n'avait été constatée (...) Elle a fondé sa décision sur le respect des législations réglementaires européennes et une évaluation jugée satisfaisante des mesures de compensation (...) Le site, situé en dehors de toute zone Natura 2000, abrite des espèces protégées mais qui sont présentes dans beaucoup d'autres endroits en France. Ces espèces seront déplacées avant les travaux qui ne porteront donc pas atteinte à leur survie ».
Pour la région, ce parcours règlementaire et judiciaire que je viens d'évoquer est absolument essentiel et a aussi renforcé notre conviction que ce projet était bien sûr important pour le développement de nos territoires, indispensable sur le plan de l'environnement, mais aussi parfaitement conforme aux règles en vigueur tant sur le plan national qu'européen. Et d'ailleurs, l'ensemble des recours intentés par les opposants ont été rejetés, au premier rang desquels ceux sur les arrêtés relatifs à la loi sur l'eau et aux espèces protégées, tant par le tribunal administratif de Nantes le 17 juillet 2015 que par la Cour d'appel le 14 novembre 2016. Il a alors été souligné que l'impact était réel mais peu impactant sur la totalité des masses d'eau et que « le réaménagement de l'aéroport actuel ne constituait pas une solution alternative présentant un caractère avéré ainsi que l'exige le SDAGE et que ce transfert répondait bien à une raison impérative d'intérêt public majeur, sans alternative avérée, et que les mesures prises n'étaient pas de nature à nuire au maintien de chacune des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle qui s'apprécie aux échelles locales et supra-locales. » Pour la région, ces décisions de justice, qui sont au nombre total de 178 à ce jour, sont essentielles et fondent bien évidemment la parfaite légalité de ce projet. Il appartient au maître d'ouvrage de mettre en place ces mesures de compensation dont les suivis semestriels et annuels sont inscrits dans les arrêtés et centralisés par un observatoire environnemental. Un comité scientifique indépendant, crée en 2013, sera chargé d'expertiser les travaux et vous pouvez compter sur la région pour suivre de près ces mesures au sein du comité de suivi des engagements de l'État et des collectivités territoriales, dont je note d'ailleurs que les associations environnementales sont aussi membres.
Pour conclure, je souhaiterais dire un mot sur le démarrage des travaux car cela concerne également les compensations environnementales, puisque l'impossibilité d'accéder au site ne permet pas de confirmer la présence d'éventuelles nouvelles espèces et de les intégrer dans les procédures administratives qui existent pour de telles découvertes sans bloquer les travaux. Il faut d'abord rappeler que rien n'empêche à ce jour le début des travaux, si ce n'est le blocage de manière totalement illégale et violente du site. Ni sur le plan judiciaire, ni sur un plan environnemental. Je tiens à rappeler également que sur le périmètre de 1 239 hectares de la concession, 463 non aménagés pourront accueillir des compensations environnementales soit près de 40 % de la surface. Enfin, et c'est aussi un des éléments de la loi biodiversité de 2016, les mesures peuvent être mises en oeuvre sur des terrains n'appartenant pas au maître d'ouvrage, qui doit alors conclure des contrats avec les propriétaires, les locataires ou les exploitants. Il faut savoir, contrairement à ce que disent certains opposants, que des propriétaires et des exploitants sont d'accord pour dédier une partie de leurs terres à des compensations. Mais ils sont menacés par les occupants illégaux de la ZAD. Ces occupants, tout comme ils interdisent l'accès au site aux maitres d'ouvrages ou à leurs sous-traitants, dégradent les instruments de mesure comme les piézomètres, rebouchent les mares créées spécifiquement pour la compensation, pillent et saccagent les bureaux d'études chargés des mesures compensatoires, agressent les scientifiques comme ceux de l'université d'Angers le 29 avril 2015, et utilisent ainsi des méthodes sans foi ni loi pour que la règlementation environnementale ne soit pas appliquée. Dans un tel contexte où plus de deux cents exactions ont été commises sur la zone, où beaucoup de riverains, d'exploitants et d'habitants du secteur sont rackettés, où des routes départementales sont privatisées, où une voiture de gendarmerie a été brûlée, où un juge a été « caillassé » et a dû rebrousser chemin, il est évident que beaucoup d'exploitants qui souhaitent contribuer au projet et dédier une partie de leurs terres à ces compensations, attendront que le site soit libéré et que le projet soit irréversible pour se faire connaître officiellement. C'est pourquoi depuis plusieurs mois et notamment depuis le vote du 26 juin décidé par le Président de la République, les collectivités appellent incessamment à l'évacuation du site et au début des travaux afin de respecter le choix démocratique des citoyens, de faire exécuter les décisions de justice, mais aussi de pouvoir réaliser de manière sereine l'ensemble des travaux environnementaux. Et pour parachever de manière remarquable la mise en place de cette démarche, il faut que cette loi soit appliquée. Cette démarche me paraît exemplaire pour d'éventuels futurs projets. Cependant, cette législation, qui est nécessaire, et ces procédures exigeantes, n'auront de sens que si elles permettent au projet d'aboutir car sinon, elles seront perçues uniquement comme des armes à l'encontre des opposants du projet. C'est l'aboutissement du projet qui vérifiera le bien-fondé de cette démarche.
Vous me demandez si la région doit être davantage impliquée dans le choix, la validation et le suivi des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité. Je vous indiquerai que la région a été parfaitement associée au projet d'infrastructures d'ampleur régionale qu'est celui de Notre-Dame-des-Landes. Toutefois, je ne pense pas que la région ait vocation à se substituer aux prérogatives régaliennes en matière d'instruction réglementaire et de contrôle de la séquence ERC et des mesures compensatoires. Par contre, la région, forte de son nouveau rôle de chef de file sur la biodiversité et de son rôle d'élaboration du SRADDET, a vocation à amplifier son implication pour poser le cadre régional et les grandes orientations dans lesquelles s'inscriront les projets.
Ainsi, la loi pour la reconquête de la biodiversité de 2016 nous demande d'élaborer une stratégie régionale de biodiversité (SRB) et de mettre en place une gouvernance régionale avec l'État. Nous nous sommes déjà saisis de ce sujet, et nous prévoyons de réunir en juin prochain un premier comité régional de la biodiversité (CRB), que nous co-présiderons avec l'État. Ce comité sera consulté sur l'élaboration de notre SRB. Dans ce cadre, nous pourrons travailler ensemble avec nos partenaires pour bâtir une complémentarité entre prérogatives régaliennes et rôle de chef de file de la région, que nous appréhendons davantage comme un rôle d'animation, de valorisation d'initiatives exemplaires, de sensibilisation des collectivités aux enjeux de la préservation de la biodiversité et de soutien au développement des connaissances en lien avec un réseau de partenaires scientifiques et techniques comme le Conservatoire d'espaces naturels (CEN), le Conservatoire botanique de Brest ou encore la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Nous devons également définir un partenariat avec la nouvelle Agence française pour la biodiversité (AFB), mise en place depuis le 1er janvier 2017 par l'État, et qui dispose d'une antenne inter-régionale Bretagne-Pays de la Loire. Il est encore trop tôt pour pouvoir vous exposer dans le détail ce que comprendra cette stratégie, mais je peux d'ores et déjà vous dire que notre approche dans l'élaboration du SRADDET, que nous prévoyons d'adopter pour mi-2019, ne sera pas d'imposer une couche de contraintes supplémentaires aux collectivités et aux porteurs de projets, qui s'imposerait notamment aux documents d'urbanisme, mais plutôt de développer des orientations favorables à la biodiversité sur lesquelles les territoires pourront s'appuyer. Nous avons prévu un dispositif de concertation large sur le SRADDET. Cette réflexion collégiale abordera ainsi les pistes d'amélioration en matière d'évitement, de réduction et de compensation des impacts sur la biodiversité. Nous pourrons également éventuellement étudier, dans le cadre de notre stratégie régionale, des actions du type de celle mise en place dans les Yvelines, concernant un opérateur de compensation des atteintes à la biodiversité. La constitution d'une sorte de « banque » des surfaces de compensation peut être intéressante au niveau régional, mais il existe des points de vigilance sur la question de la pression foncière ou encore du risque de financiarisation de la biodiversité.
L'article L.163-1 du code de l'environnement permet à des personnes publiques d'être opérateurs de compensation depuis la loi sur la biodiversité de 2016. Le département des Yvelines propose une offre de compensation environnementale aux porteurs de projets publics et privés devant compenser les impacts de leurs aménagements sur les milieux naturels. Ce service vise à assurer pour le compte des maîtres d'ouvrages, la maîtrise foncière, la gestion et le suivi des mesures compensatoires sur le long terme, au travers d'une démarche de mutualisation et de cohérence territoriale. Après une expérimentation sur la vallée de la Seine, le département souhaite désormais créer un opérateur de compensation des atteintes à la biodiversité, sous la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP), avec une dotation affichée d'un million d'euros.
La région des Pays de la Loire possède de nombreux acteurs mobilisés pour une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les projets d'aménagement. Pour la plupart associatives - comme la LPO ou encore les centres permanents d'initiative pour l'environnement - ces structures accompagnent l'aménagement de sites naturels de compensation ainsi que les maîtres d'ouvrages sur les étapes « éviter » et « réduire ». Le CEN des Pays de la Loire, créé en avril 2015, peut également intervenir dans le respect de la Charte éthique nationale des CEN en matière de compensation écologique. Cette question est d'ailleurs identifiée dans son plan d'actions quinquennal qui fait actuellement l'objet d'un examen dans le cadre de son agrément. Ainsi, il n'est pas certain que la région souhaitera se doter d'une structure unique sur cette question.
Enfin, vous me demandez si la loi biodiversité pourrait être améliorée sur la séquence ERC. La loi est toute récente. Il est un peu prématuré de se poser aujourd'hui cette question ! L'enjeu est sans doute avant tout de la mettre en oeuvre. Nous avons du travail pour mettre en place une gouvernance régionale de la biodiversité, en lien notamment avec la nouvelle AFB, et élaborer une stratégie régionale de biodiversité. Toutefois, certains points concernant les mesures de compensation posent aujourd'hui question, et il pourrait être pertinent, d'une part, de permettre la mise en oeuvre de mesures compensatoires sur des espaces non situés en proximité immédiate mais aux fonctionnalités similaires, à l'échelle de la région, et notamment des sites dont les fonctions écologiques n'ont pas été modifiées. On pourrait, d'autre part, favoriser une gestion agricole durable plutôt que conservatoire de ces mesures compensatoires. Voilà les éléments que je souhaitais vous apporter.