Je commencerai par évoquer le court terme, avec une décrue assez rapide d'Omicron. Il y aura un effet ralentissant des vacances scolaires et de la saisonnalité, avec l'arrivée de l'été, pendant lequel les comportements, les températures et l'humidité font baisser la transmission.
Néanmoins, le Royaume-Uni, après une décrue assez rapide, connaît un plateau à haute incidence. Autre élément de préoccupation, la présence du variant BA.2. Notre vague, comme dans toute l'Europe, a été dominée par le BA.1. Le BA.2 est en croissance. Une étude danoise menée sur plus de 8 000 foyers infectés en décembre et janvier par les BA.1et BA.2 a montré une accélération de la propagation, qui est due soit à une capacité de transmission plus élevée, soit à une capacité de réinfection. Une nouvelle étude en laboratoire sur la protection des anticorps montre qu'après une infection au BA.1, il y a une petite baisse de protection des anticorps contre le BA.2. Celui-ci a donc une capacité d'évasion immunitaire accrue.
À moyen et long termes, cela devient beaucoup plus compliqué. Il existe deux grands scenarii. Le premier est l'émergence d'un nouveau variant. C'est tout à fait possible car l'incidence très élevée du virus dans d'autres parties du monde favorise les mutations. Ce serait très compliqué. Notre réponse dépendrait de la transmissibilité, de la contagiosité et de la pathogénicité du nouveau variant, et de l'état de l'immunité de la population au moment éventuel de son arrivée. La situation évolue dans le temps car le niveau d'anticorps baisse. Omicron est un bon exemple : il a un impact sanitaire important même si sa pathogénicité est réduite par rapport au variant précédent, en raison d'un grand nombre d'infections en France.
Le deuxième scénario est l'endémicité, comme pour la grippe. Tout dépendra de la capacité du virus à infecter telle ou telle tranche d'âge, et de notre capacité à vacciner la population. En France par exemple, la vaccination des enfants n'a pas décollé. S'agissant d'un virus respiratoire, la saisonnalité compte beaucoup. La prévisibilité n'est pas assez mise en avant. Or la grippe saisonnière présente cet avantage. On s'attend à une vague hivernale, ce qui change complètement notre capacité de réponse puisqu'on peut planifier une campagne de vaccination spécifique.
La vaccination a été accélérée pour faire face à la vague estivale de Delta, puis l'injection de la troisième dose l'a été pour faire face à la vague hivernale de Delta, transformée en Omicron. On a dû courir.
Les conditions de l'endémicité dépendront de la capacité de l'immunité à se maintenir au cours du temps.
Un scénario probable est que l'accumulation des couches d'immunité protège largement la population de la transmission et des formes graves de la maladie.
La grande question est celle du seuil d'acceptabilité. La saturation des hôpitaux est le critère utilisé actuellement.
Le professeur Caumes a évoqué le timing. Même si le scénario d'endémicité de la grippe nous accorde de la prévisibilité, on ne sait pas combien de temps il faudra pour y arriver. Il ne faut pas s'imaginer que si Omicron marque le début de la sortie de la pandémie, la suite sera un 100 mètres sur piste bien éclairée. Ce sera plutôt du trail, avec des obstacles et des résurgences épidémiques possibles.