La courbe est très explicite, en plaçant le niveau maximum de rémunération à 3,5 Smic, on touche à peu près 35 % des emplois industriels ; passé cette asymptote, l'effet n'augmente plus vraiment ; en revanche l'intervalle entre 2,5 et 3,5 Smic est marqué par une forte progression. Si l'on veut traiter des secteurs exposés à la concurrence, en particulier du secteur industriel qui est la fine pointe de la compétitivité d'un pays, il faudrait aller au-delà de ce seuil.
L'intérêt d'un transfert des cotisations familiales, que j'avais proposé, tient à ce qu'elles touchent tous les salaires. Faire supporter à l'appareil productif des éléments de solidarité nationale qui doivent relever de l'impôt, comme la politique de la famille, ne me paraît pas justifié. En 1945, la capacité contributive n'était que dans les entreprises, on a pris les ressources là où elles se trouvaient. La fiscalité s'est suffisamment diversifiée depuis pour que l'on puisse envisager d'autres supports.
Les entreprises n'ont pas encore touché le Cice, qui ne sera déduit qu'à partir du premier acompte de l'impôt sur les sociétés, soit ces jours-ci. Certaines ont été contraintes par des difficultés de trésorerie à faire appel à la BPI pour des préfinancements coûteux : les taux qu'elle pratique sont 4 % pour une inflation comprise entre 0,5 % et 0,7 %. Les entreprises suffisamment pourvues en trésorerie n'y ont pas recours, tandis que pour les autres les problèmes de trésorerie passent avant tout.
Quant à la quantification des effets du Cice sur l'emploi et sur l'investissement, elle est difficile : le premier est très dépendant du taux de croissance que l'on retient ; le second pourrait être mesuré si l'on connaissait la base, autrement dit si l'on pouvait dire ce qui se serait passé sans cette mesure. Si l'investissement augmente en 2014, comme les économistes le prévoient, quelle part de ce progrès devra-t-elle être attribuée au Cice ? Ses défenseurs lui accorderont un rôle important, d'autres moins. C'est en tout cas le poste le plus retenu par les entreprises des services comme de l'industrie lorsqu'on leur demande ce qu'elles vont faire du Cice.
Pour monter en gamme, il faut investir. Deux problèmes constituent des obstacles à la croissance potentielle de la France. Ses gains de productivité annuels sont très faibles parce que ses entreprises n'investissent pas assez. C'est désormais un lieu commun de dire que nous avons 35 000 robots en France, alors que l'Italie en a 62 000 et l'Allemagne 150 000, et que les générations de robots français sont plus anciennes que celles des robots italiens et allemands. Le second problème est celui de l'innovation, qui coûte de l'argent. La montée en gamme sert à sortir du piège des coûts.