Le pharmacien d'officine est un professionnel de santé de premier recours, qui doit faire preuve d'accessibilité et de disponibilité. Nous aussi sommes responsables d'un service public, en coopération avec les grossistes-répartiteurs. Il est important de rappeler la place qui est la nôtre dans la prise en charge de la santé publique.
Nous passons normalement commande le soir avant la fermeture pour une livraison le lendemain matin. Grâce au DP-ruptures, nous pouvons être informés que la livraison n'interviendra qu'un ou deux jours plus tard, par exemple parce que l'agence locale doit être approvisionnée par l'agence régionale : cela nous permet d'anticiper l'accompagnement du patient dans la délivrance de son traitement. Il y a une différence entre un « manque labo », un « manque quota » ou un « manque rayon », et il est important de pouvoir en être informés au quotidien.
Je remercie les grossistes-répartiteurs lorsqu'ils peuvent nous fournir des dotations de Pneumovax®. Ce produit devait normalement être disponible en septembre 2017, mais nous devons gérer des listes d'attente, presque des tickets de rationnement ! Il est inacceptable d'avoir vingt à trente patients fragiles en attente, qui sont concernés par les modifications du calendrier vaccinal, et de devoir demander à la protection maternelle et infantile (PMI) la plus proche si elle ne peut pas en prendre en charge un ou deux... Nous sommes heureux quand les grossistes-répartiteurs nous trouvent deux ou trois vaccins et que nous pouvons dire à quelques patients qu'ils n'attendront pas davantage. Le choix du grossiste-répartiteur est un choix d'affinité, de proximité et de facilité commerciale.
Il résulte cependant des questions de logistique et de gestion évoquées par les collègues des différences d'image entre officines qui n'ont pourtant rien à voir avec la compétence de leurs praticiens. Quand on est au contact avec les patients, c'est difficile à vivre : il faut en tenir compte.
L'achat direct au laboratoire peut être une bonne idée si l'on souhaite passer une commande importante. Il existe cependant plusieurs cas de figure. L'OFEV®, par exemple, est un médicament d'exception contre la fibrose pulmonaire, prescrit uniquement par un spécialiste hospitalier, et que nous pouvons commander uniquement auprès du laboratoire pour une livraison le lendemain matin. Pour ce type de produit, nous anticipons afin de mettre en place un accompagnement supplémentaire du patient, et prenons garde à intégrer le week-end dans nos prévisions de commande. Pour d'autres médicaments comme l'Humira®, il existe deux formes galéniques différentes : de manière surprenante, le stylo injectable est disponible par commande directe auprès du laboratoire, tandis que la seringue est distribuée par les grossistes-répartiteurs. Cela nous permet de passer des commandes directes lorsque la forme seringue est en rupture. Nous sommes cependant obligés à un exercice intellectuel permanent pour prévenir et gérer les difficultés d'approvisionnement, et devenons ainsi logisticiens.
Les patients commencent à être confrontés à ces ruptures : ils nous appellent à l'avance. Mais le système français est arrivé à saturation. Il a le mérite de permettre la confiance des patients dans les médicaments, car il n'y pas de médicament contrefait, grâce au bon fonctionnement de la chaîne d'approvisionnement. Mais attention ! Un patient sur deux télécharge des applications de santé ; on parle de plus en plus de télémédecine ; 75 % des patients de plus de 12 ans ont un smartphone. Si le système français réglementé n'est plus capable de satisfaire leurs besoins, les patients achèteront leurs médicaments sur Internet. C'est un risque de santé publique qu'il faudra prendre en compte.