Intervention de Hubert Olivier

Mission d'information sur la pénurie de médicaments et de vaccins — Réunion du 6 juillet 2018 à 9h30
Audition de M. Emmanuel Déchin délégué général de la chambre syndicale de la répartition pharmaceutique csrp et de M. Hubert Olivier vice-président de la csrp et président-directeur général d'ocp répartition

Hubert Olivier, vice-président de la CRSP et président-directeur général d'OCP Répartition :

Nous vous remercions de votre invitation et allons tenter de vous éclairer sur le fonctionnement de notre métier.

La CSRP agit sur la distribution des médicaments en ville et, très minoritairement, vers l'hôpital, où nous traitons moins de 1 % des flux. Or, si le phénomène des pénuries est extrêmement problématique, il l'est surtout à l'hôpital, s'agissant notamment des anticancéreux et des antibiotiques.

Notre métier consiste à acheter les produits de santé auprès des laboratoires, à les stocker puis à les vendre aux officines de ville. Nous travaillons sur une gamme extrêmement large de plus de 35 000 références.

Il convient de distinguer ruptures de médicaments et situations de pénurie. Il n'existe pas de définition uniforme des ruptures ; d'après les textes, il y a rupture lorsqu'un pharmacien se trouve dans l'incapacité de délivrer un produit pendant 72 heures. Nous voyons les choses différemment et qualifions de rupture la situation où un produit n'est pas disponible au moment où nous le commandons. Les ruptures ainsi définies sont fréquentes ; leur durée peut être très courte, mais aussi relativement longue. Il y a a contrario pénurie lorsqu'un produit est durablement indisponible : les patients ne peuvent plus être traités et se pose un véritable problème de santé publique, qui ne peut être réglé que par le recours à un traitement alternatif ou par un report du traitement. Les pénuries, heureusement pour notre pays, sont beaucoup moins fréquentes que les ruptures. En matière de distribution de médicaments en ville, les pénuries concernent avant tout les vaccins. Pour le reste, il n'arrive pour ainsi dire jamais que nous soyons durablement sans solution.

Nous sommes approvisionnés - je parle de l'ensemble de notre profession - à hauteur de 85 % en moyenne des quantités que nous commandons auprès des laboratoires : 15 % des unités sont donc manquantes dès la commande. En aval, le chiffre est de 95 % : sur le total des produits commandés par les pharmacies françaises, la proportion de ceux que nous ne sommes pas en mesure de leur livrer est donc seulement de 5%.

Notre métier s'inscrit dans le cadre d'obligations de service public - nous sommes dans l'obligation de détenir en permanence au moins 90 % des références de médicaments existants et au moins deux semaines de stocks de consommation courante. L'existence même de la répartition pharmaceutique permet de diviser par trois les quantités manquantes entre ce qui est commandé aux laboratoires et ce qui est livré aux officines. Grâce à la répartition, la chaîne de distribution est donc relativement efficace.

Ces chiffres ne signifient pas que les 5 % de médicaments que nous ne pouvons livrer se traduisent immédiatement en ruptures du point de vue des patients : tout dépend des stocks des officines, que nous ne maîtrisons pas. Il se peut qu'une rupture courte ne soit pas perçue par les patients ; en revanche, si la durée de la rupture au sens de l'acteur intermédiaire que nous sommes est longue, cette situation peut tomber dans la définition des ruptures telle qu'elle s'applique au niveau des officines, c'est-à-dire 72 heures d'indisponibilité.

Les ruptures concernent la quasi-totalité des classes thérapeutiques, presque tous les types de produits et un très grand nombre de laboratoires : le phénomène est général. Il peut s'agir d'un produit générique, auquel le pharmacien peut substituer une autre marque, ou de produits de grande consommation médicale, type paracétamol, pour lesquels il existe différents fournisseurs. Cette année, des ruptures sont intervenues, au début du printemps, sur les antihistaminiques, mais la reconstitution des stocks s'est faite très rapidement et personne n'en a entendu parler.

L'essentiel des difficultés que nous traitons est donc invisible du point de vue de la santé publique. Une exception - il s'agit probablement de notre principale difficulté : 10 % des produits que nous traitons, qui représentent 50 % de la valeur du marché, sont des produits « sous quota » ou « sous contrainte d'allocation », pour lesquels le laboratoire définit la quantité qu'il livre aux répartiteurs. Ces produits sont compliqués à gérer ; les pharmaciens le savent et adaptent leurs comportements d'achat aux contraintes de quantité. Nous devons donc fréquemment traiter des situations de non-disponibilité de produits sous quota.

La mise sous quota ressort d'une décision du laboratoire : 600 spécialités pharmaceutiques, sur 10 000, sont soit sous quota soit sous contrainte d'approvisionnement, soit 10 % du volume et 50 % de la valeur du marché. Les médicaments concernés sont en général d'un prix élevé ; ils peuvent être d'intérêt thérapeutique majeur. Dans ce genre de situations, le produit est en général disponible en début de mois ; il l'est moins en fin de mois.

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