Avant toute chose, mes chers collègues, je tiens à vous remercier : au cours des trois derniers mois, nous avons bien travaillé !
Tout d'abord, un premier bilan de nos travaux depuis la constitution de la mission. Les six auditions plénières organisées nous ont permis d'entendre les syndicats d'Alstom, l'économiste Pierre-Noël Giraud, M. Louis Schweitzer - ancien dirigeant de Renault et ancien Commissaire général à l'investissement -, M. Bertrand Escoffier, directeur général du Slip français, qui est un jeune entrepreneur dynamique, M. Henri Poupart-Lafarge, PDG d'Alstom, et M. Philippe Varin, vice-président du conseil national de l'industrie et président de France Industrie.
Parallèlement, Alain Chatillon et moi-même avons procédé à 14 auditions, auxquelles étaient conviés l'ensemble des membres de la mission qui souhaitaient y assister. Elles nous ont permis d'entendre la Fédération des industries ferroviaires, le groupe Safran, l'Alliance pour l'industrie du futur, la Fabrique de l'industrie, la Haut-Commissaire à la transformation des compétences, la direction générale des entreprises, l'Association nationale des industries agroalimentaires, l'Agence des participations de l'État, le Comité interministériel de restructuration industrielle, la direction générale à l'emploi et à la formation professionnelle, l'ancien commissaire à l'information stratégique, CCI France, la direction générale du Trésor et le délégué interministériel aux restructurations d'entreprises.
Enfin, la mission s'est rendue sur le terrain, lors de 5 déplacements auxquels plusieurs d'entre vous ont participé : nous nous sommes tout d'abord rendus sur les sites Alstom de Belfort et d'Ornans, où nous avons rencontré la direction et des syndicats, puis visité les sites ; nous sommes allés à Munich pour rencontrer des représentants de Siemens, du ministère bavarois de l'économie, de la chambre consulaire bavaroise, de l'organisation patronale bavaroise, et la présidente des conseillers du commerce extérieur français. Nous nous sommes également rendus au Factory Lab de Saclay, à l'usine-école du Boston consulting group de Villebon-sur-Yvette, ainsi qu'à Toulouse, où nous avons rencontré différents services de l'État et de la région en matière économique, ainsi que des acteurs de l'industrie agroalimentaire et de l'industrie aéronautique.
Ces travaux nous ont déjà permis d'aborder un certain nombre de sujets, et des points majeurs ont été soulevés par nos interlocuteurs. Néanmoins, il nous reste encore 3 auditions plénières - nous y recevrons M. Le Maire, ministre de l'économie et des finances, M. Pierre Veltz, économiste et M. Boudy, secrétaire général pour l'investissement- et une quinzaine d'auditions au format « président-rapporteur », lors desquelles nous entendrons les organisations patronales (MEDEF, AFEP, CPME), Régions de France, Croissance plus, General Electric, la Direction des affaires juridiques de Bercy, M. Antoine Frérot, PDG de Véolia et président de l'Institut de l'entreprise, les organisations syndicales représentatives (CFDT, CGT, FO, CFTC), Business France, la Caisse des dépôts et consignations, la Banque de France, Airbus, des représentants des banques et des assureurs, l'association nationale des sociétés par actions, le groupe Avril, Dassault Systèmes - qui est très en pointe sur l'industrie du futur - et le Symop, organisation professionnelle des créateurs de solutions industrielles, fabricants de machines, technologies et équipements pour la production industrielle. Nous entendrons également des PME et ETI industrielles innovantes lors d'une table ronde. Enfin, deux déplacements sont encore prévus, l'un à Bruxelles, l'autre sur le site d'Alstom à La Rochelle.
Sur la base de ces travaux diversifiés et nombreux, nous vous proposons aujourd'hui une méthode, un calendrier et des orientations de fond.
Sur la méthode, tout d'abord, nous vous proposons de dissocier le volet Alstom » du volet plus général sur la « stratégie industrielle », ce qui nous permettra d'émettre nos préconisations sur Alstom au plus vite.
Nos auditions nous permettent aujourd'hui de retracer assez clairement l'évolution du groupe Alstom et de son démantèlement par cessions à des entreprises concurrentes étrangères. Lors de nos auditions, plusieurs termes ont été utilisés pour évoquer ce démantèlement : fusion, absorption... En dernier lieu, ce à quoi nous assistons c'est bien une prise de contrôle, par un groupe étranger, d'une entreprise jusqu'alors protégée par le décret relatif aux investissements étrangers soumis à autorisation préalable, dit « Montebourg ».
Nos auditions ont également permis de mettre en évidence certains choix de l'État, notamment celui de ne pas intervenir dans ce qu'il considère d'abord et avant tout comme une affaire d'entreprises privées. C'est à notre sens une profonde erreur. L'État ne peut se désengager d'une vision microéconomique et se contenter seulement d'une vision macroéconomique, en jouant sur quelques grands leviers financiers, budgétaires ou fiscaux sans agir au plus près du terrain. Notre collègue député Olivier Marleix, qui mène à l'Assemblée nationale des travaux similaires aux nôtres, en est arrivé aux mêmes conclusions que nous. L'État ne peut pas se borner à influer sur des filières très structurantes de notre économie - l'énergie, les transports - en jouant seulement un rôle de donneur d'ordres - et ce d'autant plus compte tenu des contraintes de la commande publique, qui interdisent par principe de favoriser des intérêts nationaux... Défendre nos intérêts n'empêche pas de jouer le jeu de l'Europe : il faut simplement que cela se fasse dans un cadre équilibré, comme cela a pu être le cas pour EADS. Mais il nous faut rester vigilants : lors de notre déplacement à Toulouse, nous avons appris avec inquiétude que les Allemands envisageaient de monter entièrement les avions, alors que jusqu'ici, les parties étaient construites à Hambourg, Toulouse et Saint-Nazaire, avant un assemblage final sur le site toulousain. Il est donc essentiel - et Louis Schweitzer l'a rappelé - de défendre les intérêts nationaux.