Merci aux deux rapporteurs. Cette proposition de résolution conteste la légitimité de l'Union européenne à réviser -- ainsi que le propose la Commission européenne -- trois directives pour accélérer de manière coordonnée la transition énergétique de notre système traditionnel fondé sur l'exploitation des énergies fossiles et sur une très forte consommation d'énergie. Cette transition viserait à basculer progressivement vers un système plus économe, mobilisant les énergies renouvelables.
Par cette résolution, vous souhaiteriez que le Sénat estime qu'en l'espèce les principes de subsidiarité et de proportionnalité -- indissociables -- ne sont pas respectés. En l'occurrence, vous considérez que le texte examiné porte atteinte aux droits des États membres de décider souverainement de leur bouquet énergétique, et de choisir les technologies mobilisées. En clair, selon vous, la spécificité nucléaire française justifierait des objectifs plus réduits pour les énergies renouvelables, notre pays étant le seul à ne pas avoir atteint en 2020 son objectif national fixé en la matière. Je rappelle que seuls 19,5 % de la consommation finale brute ont été produits grâce aux énergies renouvelables contre 23 % fixés initialement.
Votre proposition de résolution estime que la forte part d'électricité nucléaire dans la consommation énergétique de notre pays rend illégitime la fixation « d'objectifs trop élevés quant à la part d'énergies renouvelables ». A cette affirmation, je répondrais simplement que c'est en toute légitimité que notre Parlement, en 2019 dans la loi « Énergie Climat », a fixé l'objectif pour notre pays d'atteindre d'ici 2030, 33 % d'énergies renouvelables dans sa consommation finale brute d'énergie et 40 % d'énergies renouvelables dans sa production d'électricité. Le rehaussement de ces objectifs dans ce contexte climatique et géopolitique nouveau est, selon moi, cohérent et n'apparaît pas plus disproportionné que les objectifs fixés en 2019.
Certes, les questions énergétiques figurent au niveau de l'Union européenne parmi les compétences partagées. Cependant, il est évident qu'au regard de l'ampleur et de la rapidité de la transition énergétique visée, les actions locales et nationales ne suffiront pas ! La solidarité européenne doit jouer, par sa capacité de coordination et d'incitation. Les objectifs climatiques de l'Union européenne, fixés pour 2030, sont des objectifs collectifs. La neutralité carbone, fixée pour 2050, est une ambition commune. L'action communautaire est inévitable. Chaque État doit, dans un élan collectif, exploiter ses capacités spécifiques pour atteindre un objectif commun. Telle est la réflexion que je souhaitais vous soumettre concernant le respect du principe de subsidiarité.
S'agissant du principe de proportionnalité, il est clair pour chacun que la situation que nous traversons était inimaginable il y a encore quelques années. L'invasion russe a mis en lumière notre fort degré de dépendance énergétique, notre vulnérabilité en cas de crise lorsque les contrats ne sont plus respectés et que les coûts de l'énergie augmentent. Tout cela traduit la nécessité d'une action urgente et coordonnée. Nul ne peut dire le contraire.
Dernière remarque, la résolution européenne proposée conteste, d'une part, ce qu'elle comprend comme une obligation à recourir à une technologie précise. Elle soulève, d'autre part, la dépendance du marché européen aux produits chinois. J'ai bien lu la proposition de directive, particulièrement son alinéa 24, et contrairement à ce qui vient d'être exposé, je n'ai pas trouvé d'obligation absolue de recourir aux panneaux photovoltaïques chinois qui empêcherait de fait le déploiement de matériels photovoltaïques européens.
Vous l'aurez donc compris, au nom de mon groupe, je voterai contre cette proposition de résolution. Nous demanderons sans doute ensuite un débat en hémicycle, car ce sujet le mérite !