Il faut revenir un peu sur le passé. Jusqu'en 2008, les tarifs étaient parmi les plus élevés d'Europe, car ils rémunéraient à sa juste valeur l'équipement, qui coûtait très cher. Ensuite, il s'est produit une chute rapide des coûts, qui n'a pas été suffisamment anticipée. C'est la raison pour laquelle j'insistais précédemment sur la nécessité de mettre en place un pilotage au niveau de l'administration, assuré par un personnel suffisant en nombre, en vue de renforcer l'expertise nécessaire pour anticiper les baisses de coût.
Certaines de ces baisses ont été engendrées par un investissement massif, réalisé essentiellement en Chine. Or le développement du marché mondial concernait surtout l'Europe, le Japon et les États-Unis, et il était piloté par des mécanismes de soutien public. Le résultat fut celui que vous avez décrit : c'est en priorité l'industrie chinoise qui a profité de ces incitations publiques. On peut difficilement en faire le reproche à la Chine, dont la vision était la bonne.
Notre problème, c'est d'avoir réagi trop lentement et de n'avoir pas suffisamment anticipé.
Le reproche que l'on peut adresser à ceux qui, en France, étaient en charge de la politique menée en matière photovoltaïque, c'est d'avoir développé la demande avant l'offre. Avec la forte baisse des coûts engendrée par ces importants investissements chinois, essentiellement liés à des effets d'échelle, nous devons miser sur des technologies innovantes si nous voulons reprendre la main sur l'industrie photovoltaïque. M. le sénateur Vial sera certainement de mon avis sur ce point.
Les Chinois ont développé leur industrie en se fondant sur la technique du silicium standard, à 15 % ou 16 % de rendement, mais à une échelle telle que nous ne pourrons plus les concurrencer sur ce type de produits.
L'une des voies possibles pour développer chez nous une industrie du composant photovoltaïque est de miser sur des cellules au silicium à très haut rendement, du type de celui développé par l'Institut national de l'énergie solaire, l'INES, et le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives, le CEA, avec des techniques d'hétérojonction qui permettront de dépasser les 20 % de rendement.
Une autre voie consiste à travailler sur les couches minces. Il s'agit de déposer sur de grandes surfaces le matériau semi-conducteur sur une épaisseur extrêmement faible, de l'ordre du millionième de millimètre. Le prix du matériau devient alors très réduit.
Des technologies innovantes sont développées en France au sein de l'Institut de recherche et développement sur l'énergie photovoltaïque, l'IRDEP, installé en région parisienne, et, plus récemment, de l'Institut national de l'énergie solaire (INES). La France dispose donc des ressources technologiques permettant d'engendrer un développement industriel.
Pour en revenir à Photowatt, le Président de la République a dit très clairement dans son discours de Bourgoin-Jallieu que cette usine devait miser, pour assurer son avenir, non pas sur les technologies actuelles, mais sur l'hétérojonction, développée dans le cadre de PV Alliance, et dont les rendements sont très élevés.
Nous ne parviendrons à développer de nouveau une filière industrielle française que sur la base de l'innovation et de la haute performance. Bosch, par exemple, a investi non pas sur la cellule, mais sur l'assemblage des cellules en modules. Cette voie, qui est envisageable, permet de produire des modules photovoltaïques adaptés au marché français et, entre autres, à notre exigence particulière en matière d'intégration au bâtiment.