Bonjour à tous. Pour ma part, je peux vous parler des questions que les joueurs de tennis se posent lorsqu'ils passent professionnels.
Comme certains d'entre vous le savent - je vois que quelques journalistes tennistiques sont présents -, une carrière de joueur de tennis est assez courte. Aujourd'hui, les joueurs atteignent le top 100 à l'âge de vingt et un ou vingt-deux ans et arrêtent leur carrière aux alentours de la trentaine, à trente-deux ou trente-trois ans pour ceux qui « tiennent » le plus longtemps. Les carrières sont donc extrêmement courtes.
Pendant cette période, les revenus des joueurs proviennent essentiellement des tournois de l'ATP, l'Association des tennismen professionnels. Comme vous le savez, depuis maintenant dix ou quinze ans, les prize money des tournois tout autour de la planète ont considérablement évolué, et tant mieux pour la profession. C'est ainsi le cas du prize money de Roland-Garros.
Il faut savoir qu'un joueur qui évolue au-delà de la cent-vingtième place mondiale ne rentre pas dans ses frais aujourd'hui. Ainsi, un joueur qui est cent-quarantième ou cent-cinquantième au classement mondial et qui voyage tout au long de l'année perd de l'argent lorsqu'il joue le circuit !
Quant aux cent vingt meilleurs joueurs, ils essaient, quand ils atteignent ce niveau - je parle des joueurs de tennis en général, des Français mais aussi des autres -, d'optimiser leur temps de jeu, leur carrière étant très courte. Ils sont huit mois par an, voire neuf mois pour certains, en déplacement autour du monde. Ils essaient donc de résider dans les endroits les plus avantageux fiscalement pour eux.
Certains vivent aux États-Unis, en Floride, cet État étant beaucoup plus avantageux pour certains sportifs, y compris pour les Américains, du reste. On sait que, pour les joueurs italiens, parfois allemands, Monaco a été une destination très intéressante. Quant aux joueurs français, certains se sont installés en Grande-Bretagne, d'autres en Belgique, d'autres en Suisse, tout simplement pour optimiser le prize money qu'ils gagnent au cours des huit ou dix années qu'ils passent sur les cours.
Il faut savoir que les prélèvements fiscaux ne sont pas du tout les mêmes d'un pays à l'autre. En France, à l'époque où Yannick Noah et moi jouions, un prélèvement libératoire, de l'ordre de 32 % ou 33 %, était automatiquement effectué. Les joueurs étrangers y étaient soumis de la même manière.
Ce système a depuis évolué. Aujourd'hui, les joueurs français et étrangers sont imposés sur le territoire français à hauteur de 15 %. Ils font ensuite en fin d'année une déclaration complémentaire, dans laquelle ils font figurer leurs revenus tirés des tournois de Bercy, de Roland-Garros, de Metz, de Nice, de Marseille. Nous avons la chance d'avoir plusieurs tournois en France. Forts de cette déclaration complète, ils paient le complément. Ce complément, pour les cinquante meilleurs joueurs, vous vous en doutez, dépasse le plafond maximal. Certains joueurs, français ou étrangers, sont imposés quasiment à 50 % aujourd'hui.
Aujourd'hui, tous les joueurs de tennis professionnels, au-delà d'un certain niveau de revenus, sont imposés au taux de 50 %, taux qui sera peut-être amené à évoluer. Ce n'est pas pareil dans tous les pays. Dans d'autres pays, en Europe et ailleurs, la fiscalité est bien plus légère. C'est d'ailleurs peut-être une question sur laquelle il faudra revenir plus tard. On peut craindre en effet que certains joueurs - je parle des bons joueurs -, lorsqu'ils auront le choix entre venir jouer en France et être imposés à 50 % - peut-être plus à l'avenir - et jouer dans des pays voisins où la fiscalité est plus légère, ne préfèrent la seconde solution. Cela risque de pénaliser les tournois français.
J'ajoute que, si les joueurs, dont j'ai fait partie lorsque je jouais sur le circuit, décident de résider à l'étranger, c'est pour éviter une double imposition. Pour ma part, je suis toujours résident en Suisse. Ce pays ne pratique pas la double imposition. Ainsi, lorsque je payais 30 % ou 35 % de prélèvements obligatoires aux États-Unis, je n'étais pas ensuite soumis à une double imposition en Suisse, où je ne suis pas au forfait - je paie mes impôts comme un Suisse. Les joueurs français qui résident en France sont, eux, soumis à une double imposition sur les montants qu'ils gagnent à l'extérieur du territoire. Or la plupart des joueurs jouent beaucoup à l'étranger.
C'est une des raisons, entre autres, pour lesquelles de nombreux joueurs choisissent aujourd'hui de s'expatrier le temps de leur carrière afin d'optimiser leurs revenus. Ils souhaitent éviter une double imposition, laquelle n'est pas très avantageuse pour eux.