Je tiens tout d'abord à remercier Guy Forget, car, que l'on partage ou pas son opinion, son propos a le mérite d'être articulé et clair.
Monsieur Noah, dans votre vie professionnelle, comme sportif et comme artiste de variétés, ainsi que, bien entendu, dans votre engagement citoyen, vous avez toujours défendu, au sens large du terme, la justice sociale. Cette attitude vous honore. Or la justice sociale, dans une République comme la nôtre, repose d'abord sur la justice fiscale, celle qui permet de collecter l'impôt issu de la création de richesse individuelle et collective, de manière à pouvoir le redistribuer au mieux dans un souci d'équité, et donc de cette justice sociale que vous prônez.
Cette commission d'enquête sur l'évasion des capitaux n'est pas un tribunal administratif, mais elle cherche à comprendre l'état d'une situation préoccupante à plus d'un titre pour rétablir les finances de notre État, et vous connaissez l'ampleur de leur déficit.
Pour ce qui nous concerne, aujourd'hui, et mon propos s'adresse particulièrement à vous, nous voudrions comprendre, sans avoir à l'esprit un quelconque jugement moral, ce qui vous a conduit à « faire des économies », pour reprendre l'expression que vous avez employée, en Suisse, au cours des années quatre-vingt-dix. Vous avez évoqué ce point tout à l'heure, mais je crois utile d'y revenir.
« Faire des économies » : voilà une expression que vous avez utilisée publiquement, à plusieurs reprises, et encore aujourd'hui. Elle a été relayée par les médias, toujours sensibles à vos propos et prompts à les répercuter. Ce choix personnel de vous exiler fiscalement et le contentieux qui vous oppose encore au ministère du budget sont-ils en conformité avec l'esprit de justice sociale que vous prônez ?
Au travers de ces mêmes médias, vous apparaissez comme un exemple de réussite citoyenne, et nous nous en réjouissons. Les citoyens français imposés et appelés à l'être encore davantage, compte tenu de la situation économique, financière et fiscale qui est la nôtre, veulent tout simplement savoir ce que recouvrent véritablement votre attitude, vos engagements. Je m'exprime en tant que citoyen et me fais l'écho de ce que j'entends autour de moi, ici et là : il faut sortir d'une certaine ambiguïté entre la vertu civique, que tout le monde partage, et une problématique d'évasion fiscale, qui semblerait être encore la vôtre.