Entre nous aussi, sur le terrain. Clairement, plus un mineur est jeune, moins on l'incarcère en quartier des mineurs. Mais envoyer à Fleury-Mérogis un mineur très aguerri de dix-sept ans et demi peut aussi être risqué, au regard de la dimension criminogène de cette maison d'arrêt. Le radicalisé ira, quel que soit son âge, en établissement pénitentiaire pour mineurs.
Un paradoxe de l'ordonnance de 1945 est que la détention provisoire ne peut durer plus d'un mois, renouvelable une fois. Comment voulez-vous dans ces conditions que la PJJ développe des mesures de réinsertion ?
Les cas d'incarcération sont heureusement très limités : je n'en ai requis que 230 l'an passé et mes réquisitions ne sont pas toujours suivies. Il nous arrive parfois de requérir l'incarcération devant le juge des enfants tout en lui demandant de ne pas saisir le juge des libertés et de la détention. Cela lui permet de dire au mineur : « cela suffit comme cela, le procureur a même requis de l'incarcération. » À l'audience, nous tenons un discours d'ordre public que le mineur entend ; après, le juge peut choisir une autre option et cela nous convient parfaitement. Il arrive souvent qu'il y ait trois ou quatre saisines du juge des libertés et de la détention avant qu'un mandat de dépôt ne soit finalement prononcé. On peut ainsi dire au mineur qu'il a été prévenu. Mais pour un procureur des mineurs, c'est toujours un échec de ressortir avec un mandat de dépôt signé.