Intervention de Renaud Muselier

Réunion du 3 février 2005 à 9h30
Convention relative aux poissons grands migrateurs dans le pacifique — Adoption d'un projet de loi

Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le présent projet de loi porte sur l'adhésion de la France à la convention relative à la conservation et à la gestion des stocks de poissons grands migrateurs dans le Pacifique occidental et central.

Cette convention institue une organisation régionale de pêche afin de promouvoir une pêche responsable, qui permette une exploitation durable des ressources halieutiques dans cette région du Pacifique. Elle jette également les bases d'une organisation collective de lutte contre la pêche illicite.

Elle s'inscrit, par conséquent, dans le sens des évolutions récentes du droit de la mer qui appellent à la création d'organisations régionales de pêche pour la gestion des poissons migrateurs et invitent les Etats à collaborer avec elles.

Ces évolutions résultent notamment de l'accord d'application de la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 4 décembre 1995, relatif à la conservation et à la gestion des stocks de poissons chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs, auquel la France est partie depuis le 19 décembre 2003, et du code de conduite pour une pêche responsable, adopté en 1995 par la Conférence de l'organisation pour l'alimentation et l'agriculture.

Cette convention relative à la conservation et à la gestion des ressources halieutiques dans le Pacifique a été adoptée à Honolulu le 5 septembre 2000, au terme d'un long et difficile processus de négociations qui, entamé en 1997, a réuni tous les Etats membres du Pacifique-Sud ainsi que les Etats du pavillon pratiquant la pêche dans la région. La France a participé activement à ces négociations, ainsi que la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna.

Cette convention constitue un accord de première importance pour assurer la conservation et l'exploitation à long terme des ressources halieutiques concernées, qui sont essentiellement constituées de diverses espèces de thons. Elle prévoit la mise en oeuvre d'une approche de précaution, en particulier lorsque les informations scientifiques sont incertaines ou peu fiables. Elle a créé une commission des pêches, qui est notamment compétente pour promouvoir la coopération et la coordination entre ses Etats membres et pour adopter des règles et des mesures de conservation et de gestion, s'agissant en particulier du calcul et de la répartition du volume de prises acceptable.

Cette convention est en outre le premier instrument de ce type à prévoir la possibilité, pour une commission des pêches, de procéder à des arraisonnements et à des inspections en haute mer. Elle constitue ainsi un réel outil juridique pour faire appliquer des mesures de conservation et de gestion.

La convention d'Honolulu a été ratifiée par quatorze Etats et est entrée en vigueur le 19 juin 2004. La France n'a pas voulu la signer en son temps, car elle souhaitait au préalable obtenir l'assurance que les droits qui seraient accordés à ses collectivités d'outre-mer, en particulier la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, permettraient leur participation effective au sein de la commission.

Les négociations engagées après l'adoption du texte de la convention pour définir les modalités de fonctionnement de la commission des pêches nous ont permis d'obtenir en octobre 2003, lors de la conférence de Rarotonga, aux îles Cook, d'importants droits de procédure pour la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, sur la base des compétences que leur statut d'autonomie respectif leur reconnaît.

En conséquence, le conseil interministériel de la mer du 16 février 2004 a décidé que la France devait désormais adhérer à la convention d'Honolulu. Il est en effet de l'intérêt de notre pays de le faire, et ce pour plusieurs raisons.

Notre adhésion s'inscrit dans le prolongement des engagements que la France a souscrits antérieurement, notamment en ratifiant la convention des Nations unies sur le droit de la mer le 12 mars 1996 et l'accord de New York sur les stocks de poissons chevauchants et grands migrateurs en décembre 2003. Ces accords nous font obligation d'adhérer aux organisations régionales de pêches ou de coopérer avec elles.

La France est, par ailleurs, déjà membre d'un grand nombre d'organisations régionales de pêche, que ce soit directement ou par le biais de l'Union Européenne.

Notre adhésion à cette convention est également cohérente avec les positions que la France soutient par ailleurs en matière de développement durable, à savoir la nécessité de faire prévaloir une gestion économique durable des ressources halieutiques en s'appuyant tant sur des mesures techniques pertinentes que sur une politique de contrôle et de surveillance des pêches efficace ; le souci de prendre en compte les aspects environnementaux de la pêche ; enfin, la volonté de reconnaître la dimension socio-économique de ces activités et leur impact sur le mieux-être des populations locales.

En ce sens, notre adhésion confortera l'image positive dont la France jouit dans la région quant à son rôle de premier plan en matière de lutte contre la pêche illicite. On rappellera à ce sujet qu'elle a signé un accord de coopération dans ce domaine avec l'Australie le 24 novembre 2003 et qu'elle en négocie actuellement un second avec le Vanuatu.

Notre adhésion nous permettra de renforcer notre engagement dans la lutte contre la pêche illicite dans un cadre multilatéral.

En adhérant à cette convention, la France pourra siéger à la commission des pêches en qualité d'Etat membre et non en tant que simple observateur. Notre pays sera, dès lors, mieux à même de défendre ses intérêts, en particulier ceux de la Polynésie française, qui conduit une politique de développement de ses capacités dans le secteur de la pêche.

Compte tenu des droits qui leur ont été reconnus, nos collectivités du Pacifique bénéficieront d'une situation privilégiée au sein de cette organisation régionale de pêche alors que de telles organisations n'acceptent généralement pas la participation de territoires qui ne bénéficient pas du statut de sujet du droit international.

Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation

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