Intervention de Anaïs Vrain

Mission d'information réinsertion des mineurs enfermés — Réunion du 27 juin 2018 à 15h00
Audition de Mme Anaïs Vrain secrétaire nationale du syndicat de la magistrature

Anaïs Vrain, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature :

Nous pensons qu'il faut s'organiser pour éviter la détention, en prenant les mesures appropriées et en leur laissant le temps de produire leurs effets. En Seine-Saint-Denis, il faut aujourd'hui attendre un an pour qu'un éducateur intervienne après une décision du juge des enfants ! On tarde également souvent à prendre en charge la délinquance des jeunes filles.

Nous militons pour l'arrêt de la construction de nouveaux CEF au profit de structures de placement en milieu ouvert ou réellement tournées vers l'insertion. Aujourd'hui, le prix de journée d'un CEF est estimé à 690 euros par jeune hébergé, contre douze euros seulement pour un suivi en milieu ouvert. Cet écart s'explique par le niveau élevé de la masse salariale en CEF, dont on peine à voir les effets. Sans être excessivement favorable au « tout-milieu ouvert », il me semble qu'entre douze euros et 690 euros, on peut imaginer des solutions au coût intermédiaire et aux résultats tout aussi intéressants, comme les accueils familiaux ou les hébergements collectifs.

La fermeture des quartiers pour mineurs nous paraît incontournable. Même si le documentaire diffusé sur Public Sénat, et qui a opportunément médiatisé vos travaux, s'efforce de montrer une réalité nuancée, ces quartiers demeurent dans l'ensemble incompatibles avec un réel travail de réinsertion. La réponse à apporter aux jeunes mineurs délinquants ne peut pas revêtir un aspect carcéral, même mâtiné d'éducatif - certains foyers de la PJJ ressemblent d'ailleurs à s'y méprendre à des prisons. Il faut que nos décideurs publics, à qui il revient de faire ce choix politique, réorientent la prise en charge autour de l'éducation nationale, le renforcement de l'aide sociale à l'enfance, le soutien psychologique des acteurs, en un mot la reconstruction d'un véritable service public de la réinsertion.

Le recentrage, que je qualifierais plutôt de « décentrage », de la PJJ sur le pénal décidé en 2007, cumulé aux effets de la révision générale des politiques publiques (RGPP), n'a eu que des retombées négatives. Les foyers PJJ, historiquement investis d'une mission éducative, sont devenus des lieux violents. Je ne vois pas d'autre solution que de réintroduire du civil dans la PJJ, et surtout de réorienter son action autour de la prévention, et non plus de la sanction. Il est difficile de se le figurer, mais les actions de prévention sont des sources d'économies véritables.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion