Intervention de Baptiste Bonnet

Mission d'information Judiciarisation — Réunion du 15 février 2022 à 14h45
Audition consacrée au droit européen de M. Baptiste Bonnet professeur de droit public à l'université jean monnet de saint-étienne université de lyon doyen de la faculté de droit mmes laurence burgorgue-larsen professeure de droit public à l'université paris i panthéon-sorbonne diane fromage chercheuse individuelle marie sklodowska-curie à sciences po et hélène gaudin professeure de droit public à l'université toulouse i capitole

Baptiste Bonnet, Université de Lyon, doyen de la faculté de droit :

J'ai tendance à considérer que la Constitution de 1958 conduit à la situation qui est aujourd'hui celle de la démocratie française, à savoir le fait majoritaire. À moins de changer de Constitution, nous sommes dans un fait majoritaire et une situation de monisme, avec primauté du droit interne et respect de la règle pacta sunt servanda. N'en déplaise à ceux qui critiquent l'européanisation du droit ou qui considèrent que le système n'est pas assez démocratique, il s'agit de l'application de la Constitution de 1958. Je n'ai pas d'opinion sur le sujet mais je tenais à donner ces précisions.

Je suis gêné par ce discours sur la crise démocratique car je considère que, dans ces rapports au droit de l'Union européenne et au droit de la CEDH, le juge a aujourd'hui une position particulièrement équilibrée sur l'ensemble des sujets. Je voudrais vraiment qu'on me montre un exemple de juge qui dérape.

Regardons par exemple l'attitude du Conseil d'État sur les mesures liées à la Covid-19. Un très grand nombre de critiques du Conseil d'État ont été formulées alors que j'ai remarqué qu'il est demandé au Conseil d'État de porter l'État de droit sur ses épaules, après le Parlement. Au bout du compte, le juge administratif a fait ce qu'il devait faire sur la question en comblant les lacunes des textes et en prenant des décisions eu égard à un certain nombre d'éléments.

Je crois que l'élément démocratique est souvent invoqué précisément par ceux qui n'arrivent pas à se retrouver dans le fait majoritaire parce qu'ils ne parviennent pas à devenir la majorité. Le fait majoritaire a le mérite de la stabilité, d'éviter ce que nous pouvons voir en Italie et de permettre à la société française d'être une grande démocratie. J'ai tendance à considérer qu'on oublie de le dire.

Le Parlement joue son rôle et je ne le trouve pas si absent du débat démocratique. J'ai la sensation que, sur un certain nombre de sujets, le Parlement est bien là et fixe le cap tandis que le juge s'immisce dans les espaces où la possibilité de le faire lui est laissée. Le Parlement joue son rôle concernant la sécurité intérieure ou encore la pandémie de Covid-19, avec le rôle de l'exécutif que nous connaissons.

Par rapport à cet impensé de la démocratie et de la légitimité, il faudrait peut-être rappeler que notre système fonctionne assez bien dans ses équilibres généraux.

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