Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, souhaitant doter les deux pays des instruments conventionnels nécessaires à l'approfondissement de leur coopération judiciaire, la France et la Russie ont engagé, dès 1999, des conversations qui ont abouti, grâce à l'impulsion donnée lors de la visite d'Etat du Président Vladimir Poutine, en février 2003, à la signature d'une convention bilatérale relative au transfèrement des personnes condamnées.
L'adhésion de la Fédération de Russie aux conventions ad hoc du Conseil de l'Europe avait permis de combler le vide juridique existant en ce qui concerne l'entraide judiciaire en matière pénale et l'extradition.
La signature d'une convention bilatérale sur le transfèrement des personnes condamnées permet de compléter le dispositif.
Signée le 11 février 2003, la convention franco-russe s'inspire très largement de la convention européenne du 21 mars 1983.
Les dix-huit articles de ce texte traitent des règles relatives aux conditions du transfèrement, du cadre procédural dans lequel celui-ci devra s'inscrire et des modalités d'exécution des peines une fois le transfèrement opéré.
Comme l'indique son préambule, la convention vise à mettre en place une procédure simple facilitant le transfèrement des détenus ressortissants de l'une des parties vers leur Etat d'origine où ils purgeront leur peine. Il s'agit surtout de favoriser leur réinsertion sociale, qui pourrait être compromise du fait de la barrière de la langue, du manque de contacts avec les familles ou de tout autre facteur de nature à renforcer le sentiment d'isolement.
Le ministère de la justice, pour la France, et le Parquet général de la Fédération, pour la Russie, ont été désignés « autorités centrales » pour la mise en oeuvre de la convention. Ils communiquent directement.
Le texte prévoit que les parties coopèrent étroitement ; autrement dit, elles examinent avec la plus grande bienveillance les demandes de transfèrement dès lors que les conditions posées par la convention sont satisfaites. Les demandes peuvent être présentées par les personnes condamnées ou par leur représentant légal auprès de l'un ou l'autre des deux Etats. Ceux-ci disposent du droit de présenter, de leur propre initiative, une telle demande.
Néanmoins, le transfèrement peut être refusé si l'Etat de condamnation estime qu'il porterait atteinte à sa souveraineté ou à son ordre public ou encore si le condamné ne s'est pas acquitté des condamnations pécuniaires qui lui ont été imposées ou n'a pas offert de garanties suffisantes en ce sens.
La mise en oeuvre de la procédure répond à plusieurs conditions. Le condamné doit être ressortissant de l'Etat d'exécution, la décision judiciaire doit être définitive et aucune autre procédure ne doit être pendante à l'encontre du condamné dans l'Etat de condamnation. En outre, la durée de la peine restant à subir doit être, sauf cas exceptionnels, d'au moins six mois, pour éviter d'engager une procédure de transfèrement qui entraînerait des coûts sans commune mesure avec les avantages escomptés.
En application du principe de la double incrimination, les faits à l'origine de la condamnation doivent également constituer une infraction pénale dans les deux Etats.
Enfin, l'un et l'autre Etats doivent donner leur accord au transfèrement.
Les droits de la personne condamnée sont pris en compte. Son consentement est requis. Elle doit être informée de la teneur de la présente convention et des conséquences juridiques du transfèrement ainsi que de la suite réservée à sa demande.
En vertu de la règle non bis in idem, le condamné transféré ne peut être poursuivi dans l'Etat d'exécution pour les mêmes faits que ceux qui sont à l'origine de la peine prononcée dans l'Etat de condamnation. Le condamné transféré continue, en principe, de purger dans l'Etat d'exécution la peine infligée dans l'Etat de condamnation. L'Etat d'exécution peut, le cas échéant, adapter la peine aux sanctions prévues par sa propre législation. Il ne peut cependant prononcer une peine qui aggraverait la peine initiale ou excéderait le maximum prévu par sa législation pour une infraction pénale correspondante.
Chaque partie peut accorder la grâce, l'amnistie ou la commutation de la peine conformément à son droit interne, mais l'Etat de condamnation garde seul la compétence en matière de recours ou d'action en révision.
Les parties doivent faciliter le transit sur leur territoire des personnes condamnées transférées en vertu d'une convention conclue avec un Etat tiers.
Enfin, l'entrée en vigueur de la convention interviendra le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière notification de l'accomplissement des procédures prévues par la constitution de chaque partie.
Sa dénonciation éventuelle ne produira d'effet qu'à l'issue d'un délai de six mois suivant sa notification.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales dispositions de la convention sur le transfèrement des personnes condamnées à une peine privative de liberté entre la République française et la Fédération de Russie, signée à Paris le 11 février 2003, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.