Intervention de Antoine Vial

Mission commune d'information sur le Mediator — Réunion du 12 avril 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Antoine Vial spécialiste de l'information médicale et grand public membre de la commission « qualité et diffusion de l'information médicale » de la haute autorité de santé membre du conseil d'administration de prescrire coordinateur du collectif europe et médicament

Antoine Vial, spécialiste de l'information médicale et grand public, membre de la commission « Qualité et diffusion de l'information médicale » de la Haute Autorité de santé :

Tout à fait. On vous a demandé votre accord pour que l'industrie pharmaceutique participe au programme d'observance thérapeutique. Nous sommes bien là dans le cadre du direct-to-consumer, où un industriel est en contact direct avec le patient. Avant que nous puissions voir en Europe une publicité pour un antidiabétique ou un antidépresseur, l'industrie pharmaceutique s'est adaptée et professionnalisée à cette communication grand public. Un exemple pour illustrer la publicité dans certains pays : photo d'un cadavre à la morgue, une voix off : « et dire qu'un simple test de cholestérol aurait pu éviter cela ».

L'histoire d'un médicament est longue, y compris pour un copie. Elle commence en général une dizaine d'années avant que le médicament n'apparaisse sur le marché. D'études en études, le fabricant prépare son dossier d'autorisation de mise sur le marché. Deux ans avant, il sait à quelle date son produit sera commercialisé et peut commencer à préparer le terrain de la vente ; j'appelle cela la « phase de labour ». On plante, dans l'esprit du consommateur patient, l'idée d'un mal dont il pourrait être atteint (surpoids, fatigue, mal de dos, etc.).

La publicité étant interdite, l'industrie fait de l'information : cela coûte moins cher et rapporte bien davantage en termes d'impact. On montre qu'il s'agit d'un très grave problème de santé, qui touche beaucoup d'entre nous. Si la marque de la firme apparaît, c'est seulement comme un bienfaiteur ayant permis de rappeler ce grave problème, qu'il s'agisse d'un médecin, d'une association ou d'une société savante.

Evidemment ce ne sont pas les responsables des firmes qui s'expriment devant la presse. On fait appel à des intermédiaires rémunérés (instituts de sondage), à des sociétés savantes, à des grands professeurs de médecine, à des ex-champions de football, etc., pour blanchir l'information. Je les appelle d'ailleurs des « agents de blanchiment ». Fin du premier acte.

Tout cela est orchestré, planifié et professionnel. On alerte alors la presse pour la bonne cause, à l'aide de chiffres, de sondages et de témoignages d'experts. Sans un esprit critique aiguisé, on ne voit rien des intentions commerciales, qui ne sont pas annoncées clairement.

Quelques mois après vient la « phase d'ensemencement » : on annonce qu'un produit qui répond à la problématique soulevée quelques mois plus tôt va révolutionner la prise en charge. Le Viagra répond exactement à cette planification.

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