Intervention de Daniel Cornalba

Mission d'information Commune et maire — Réunion du 14 mars 2023 à 8h30
Audition de représentants d'associations de maires

Daniel Cornalba, membre du bureau de l'Association des petites villes de France :

L'Association des petites villes de France représente les petites villes de 2 500 à 25 000 habitants, qui regroupent un tiers de la population française. Ces communes sont en plein essor depuis la crise sanitaire ; elles attirent grâce à la qualité de vie qu'elles proposent et à leur relative centralité.

Toutes les études montrent, année après année, que les Français continuent à faire confiance à leur maire, ce qui est remarquable dans le climat de défiance à l'égard des institutions que nous connaissons en France et alors que nos concitoyens ont le sentiment de vivre dans un état de crise permanent : crise des gilets jaunes, crise sanitaire, inflation, etc. En tout cas, les maires sont toujours en première ligne en cas de crise et savent répondre présent.

Votre mission concerne l'avenir du maire et de la commune à l'horizon 2030. Il me semble que leur rôle ne doit pas changer. Les communes ont fait la preuve de leur force et de leur utilité. Il importe de préserver cette instance.

Vous nous interrogez sur la place de la commune dans le bloc communal et sur le lien avec les intercommunalités. Nombre de changements sont intervenus ces dernières années, mais je pense que modifier le périmètre des intercommunalités ne les rendra pas plus efficaces. Celles-ci doivent permettre de démultiplier l'efficacité de l'action locale, en intervenant en soutien des politiques communales. Elles sont avant tout utiles lorsqu'une mutualisation est pertinente : en matière d'assainissement, de gestion des déchets, d'organisation des mobilités, de développement économique, etc. Pour le reste, l'intercommunalité doit avoir une compétence d'appui, de manière souple, en lien avec les communes.

Les finances publiques locales sont sous tension : les communes ont été mises à contribution à hauteur de 46 milliards d'euros ces dernières années, à tel point que, selon notre étude, 44 % des maires envisagent de fermer des services publics. L'État a supprimé des dotations, qui sont, je le rappelle, non pas des subventions, mais des compensations d'un pouvoir fiscal retiré aux communes dans les années 1970. Cette évolution est révélatrice d'une vision restrictive de l'autonomie des collectivités, tant de la part des gouvernements successifs que du juge constitutionnel, car le transfert des compétences devrait s'accompagner de la capacité à agir. Les suppressions successives de leviers fiscaux sont une mauvaise nouvelle. Elles mettent en péril notre capacité à répondre aux problèmes que l'on rencontre. L'État privilégie désormais les appels à projets, qui constituent en fait une prime aux grandes communes, qui disposent seules de l'ingénierie nécessaire pour y répondre. Les petites communes en manquent, c'est le maire qui doit remplir les dossiers le week-end ; dès lors, beaucoup renoncent. Par exemple, en Indre-et-Loire, Tours reçoit plus de la moitié de l'enveloppe de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) du département.

Le problème de l'ingénierie est central. Les petites communes sont victimes de la dévitalisation progressive de l'État déconcentré, qui joue de moins en moins son rôle de conseil. L'État se rétracte et tend à se recentrer sur ses missions de contrôle. Il est important de maintenir les sous-préfectures, afin que l'État puisse s'adapter aux réalités locales. Dans les Yvelines, les sous-préfets n'ont pas les mêmes rôles à Saint-Germain-en-Laye, zone urbaine dense, qu'à Rambouillet. Il faut penser ensemble déconcentration et décentralisation.

On observe aussi une « agencification » de l'État, pour donner de la visibilité à certaines politiques publiques. Celle-ci aboutit parfois à des situations ubuesques : à l'occasion de l'aménagement d'une parcelle, une agence m'a déclaré que l'on devait la densifier, mais une autre a considéré qu'il s'agissait d'une aire protégée... Je me suis tourné vers la sous-préfecture qui n'a pas su arbitrer, et nous avons dû mener conjointement une procédure de délivrance de permis de construire et un dossier de protection des aires protégées ! Il serait utile que les préfectures retrouvent leur capacité d'analyse des dossiers et d'arbitrage in fine. Les maires ont parfois le sentiment d'être dépossédés de leurs prérogatives, dans la mesure où ils n'ont plus d'interlocuteur de proximité et ne savent pas qui étudie leurs dossiers. Les décisions semblent être prises au niveau national. C'est pourquoi il conviendrait que les élus soient représentés au sein des agences.

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