La dotation de solidarité rurale (DSR) a été orientée vers les bourgs-centres. Plutôt que de vouloir concentrer les services dans certains endroits, mieux vaudrait les répartir de manière équilibrée sur tout le territoire.
On a trop tendance à identifier communautés de communes et bassins de vie. Or il existe plusieurs bassins de vie au sein d'une intercommunalité : un bassin de vie, c'est une unité de vie, le périmètre scolaire d'une école primaire. On ne peut pas demander à tout le monde de vivre au même rythme dans une communauté de communes, car d'un bout à l'autre de son territoire, les gens ne se connaissent pas. Il faudrait faire en sorte que chaque bassin de vie soit doté d'une école primaire, de services de santé, de services publics, etc. Ce serait la mise en oeuvre de la proximité. Quand on va chercher ses enfants à l'école, on fait ses courses. Créer des aides pour la relance des commerces, c'est bien, mais on ne peut pas les implanter au milieu de nulle part ! Il en va de même pour les médecins. Il faut garantir la présence de tous ces services dans chaque bassin de vie.
Je plaide aussi pour la présence d'un service public de la petite enfance à proximité de chaque école dans les territoires ruraux. On manque d'assistantes maternelles ; des crèches ou des micro-crèches se développent, mais elles sont parfois éloignées d'un bourg-centre ou d'un village. Lorsqu'un village n'a pas de service de la petite enfance, les jeunes parents ne sont pas incités à venir y vivre, et il est à craindre que l'école, tôt ou tard, ferme. Si l'on concentre les services dans certains bourgs-centres ou certaines « petites villes de demain », les autres communes vont dépérir. Il importe de mailler tout le territoire. La création des zones artisanales a été une erreur, car l'activité s'est concentrée dans ces zones. Mieux aurait valu permettre aux artisans de s'installer dans les villages, afin d'entretenir la mixité sociale. J'ai été directeur d'école dans une commune rurale : la mixité sociale était forte ; mais aujourd'hui elle a disparu.
Nous l'avons constaté lors de la crise sanitaire : dans les communes, le maire est le premier maillon de la chaîne sociale, le premier interlocuteur pour la sécurité. Les maires ruraux sont ainsi souvent référents pour les violences conjugales. Les élus sont à disposition de leur population en permanence, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Les maisons France Services devraient mailler le territoire encore plus finement, au-delà des centres des communautés de communes. N'oublions pas non plus que le premier maillon du service public, c'est la mairie. On crée une plateforme numérique pour faciliter la délivrance des cartes d'identité et des passeports, mais ce n'est pas une bonne idée. Il faut que la mairie reste le point de référence pour tous ceux qui vivent à proximité. Lors de fusions réalisées en application de la loi Marcellin de 1971, chaque hameau avait, dans un premier temps, conservé son maire délégué, mais ces mairies ont depuis fermé, et il ne faut pas s'étonner que certains n'aillent plus voter, car ils vivent maintenant trop loin de la mairie centrale. La ruralité mérite davantage de respect !
Les communes rurales contribuent à l'économie locale. Or 65 % seulement des crédits de l'enveloppe de la DETR reviennent aux communes rurales. On fait pourtant travailler les artisans locaux. Les communautés de communes consomment 23 % de la dotation ; elles ont des frais de fonctionnement plus élevés. Les communes rurales, elles, s'appuient sur des bénévoles dévoués.