Ségolène Royal a dû vous l'indiquer lors de son audition, c'est elle qui a piloté le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. En effet, c'est elle qui était chargée de l'environnement.
Les mesures envisagées ont évidemment donné lieu, comme toujours, à des discussions interministérielles, mais, en la matière, nous nous posions les mêmes questions. Nous avions toutes deux la volonté d'accélérer en trouvant des outils simples, lisibles et donc efficaces, qu'il s'agisse de leurs effets concrets sur la rénovation énergétique ou de leur coût sur les finances publiques : quand on est aux responsabilités, on évalue toujours l'efficacité d'un dispositif en comparant ses avantages et ses coûts.
Selon moi, les freins constatés à l'origine n'étaient pas de nature budgétaire ; tel peut être le cas pour d'autres dispositifs en matière de logement et, aujourd'hui, il en est peut-être autrement.
Pour créer le CITE, il a d'abord fallu gagner l'arbitrage face à Bercy. Vous le savez : par principe, le ministère de l'économie et des finances n'aime pas trop les crédits d'impôt. Ces derniers ont l'avantage de toucher tout le monde : on peut en bénéficier, que l'on soit contribuable ou pas. En contrepartie, les chiffrages sont difficiles à établir, ce qui exige une certaine prudence.
Ségolène Royal et moi-même avons plaidé avec force en faveur de cette mesure, parce qu'elle était visible et claire et parce que son impact était certain : elle permettait de donner tout de suite un volume d'activité à la filière du bâtiment, qui, à cette époque-là, connaissait des difficultés économiques et sociales assez importantes.
Les arbitrages ont permis de créer ce crédit d'impôt tout en simplifiant l'éco-PTZ. Grâce à cet outil, il était possible de réaliser ses travaux sans acquitter d'intérêts : c'était un autre moyen de réduire le reste à charge. Certes, il y a quelques années, les taux d'intérêt étaient relativement bas ; mais, dès qu'ils remontent, l'éco-PTZ démontre toute son utilité.
Bien sûr, il peut être intéressant de fixer des objectifs de rénovation quantitatifs et qualitatifs dans le cadre d'un projet de loi de programmation, avec les objectifs budgétaires correspondants. Mais une nouvelle majorité peut toujours détricoter les lois de programmation antérieures ; rien ne l'empêche de revenir en arrière. En fixant un cadre, une loi de programmation peut donner de la visibilité et de la prévisibilité ; en cela, j'y suis assez favorable. Il n'empêche qu'il faut faire preuve de la plus grande prudence quand on touche aux mécanismes qui fonctionnent et se méfier des coups de balancier législatifs.
MaPrimeRénov' traduit une idée intéressante, mais je constate que ce dispositif n'est pas simple. J'ai été députée jusqu'en 2022 : j'ai vu beaucoup de personnes frapper à la porte de ma permanence pour me faire part de leurs difficultés à cet égard, qu'il s'agisse de la complexité des dossiers ou des délais de versement de la prime. Pour ma part, au cours de mon parcours ministériel, j'ai toujours privilégié les mesures pragmatiques et simples dont le but premier était l'efficacité.
Vous constatez que les rénovations globales sont difficilement menées à bien. Selon moi, le blocage ne vient pas des propriétaires privés. On ne peut pas dire que les particuliers n'ont pas envie de faire ces travaux : aujourd'hui, tout le monde a pris conscience de l'urgence. Le sujet, c'est le reste à charge et la solvabilité.
Dans le secteur du logement, l'accompagnement a été beaucoup recentré. Dans certains secteurs, il a même été très réduit. En résultent in fine des charges supplémentaires pour ménages. L'enjeu est donc bien de trouver de nouveaux moyens d'accompagnement, peut-être en adaptant certains dispositifs, pour atteindre un reste à charge beaucoup plus faible.
Avec l'augmentation actuelle du coût des matières premières, la courbe risque de continuer à chuter assez fortement. J'y insiste, nous devons aller vers une rénovation performante en trouvant des outils permettant de traiter la question du reste à charge. Avec l'éco-PTZ simplifié, le CITE et les aides de l'Anah pour les propriétaires les plus modestes, nous garantissions un échéancier de travaux plus clair et une programmation plus efficiente.
Vous évoquez la cohérence des différentes actions menées à l'échelle nationale. À mon sens, l'empilement des dispositifs rend une simplification nécessaire. Les collectivités territoriales apportent leur concours pour accompagner les ménages dans tel ou tel domaine, notamment la rénovation thermique des logements, et c'est très bien ; mais, de son côté, l'État propose ses propres aides et finalement on s'y perd un peu.
À ce titre, l'idée initiale, c'étaient les plateformes et les guichets uniques, qui ont tout leur intérêt pour accélérer l'effort de rénovation et, ainsi, nous permettre d'atteindre nos objectifs de lutte contre le réchauffement climatique. On sait ce que représente l'isolation des bâtiments dans la réduction des gaz à effet de serre : dès lors, il faut s'efforcer d'identifier et de lever les freins et les verrous constatés dans ce domaine.
En ce sens, il faut effectivement assurer un accompagnement individuel ; mais, pour moi, compte tenu du volume de logements considérés, les copropriétés restent le vrai sujet. Il sera toujours plus simple d'accompagner un propriétaire occupant ou un propriétaire bailleur possédant quelques logements que de trouver les outils adaptés aux copropriétés, d'autant que ces dernières exigent des moyens financiers considérables. Il s'agit d'un travail de grande ampleur.