Plus c'est compliqué, plus il faut accompagner, plus on dématérialise, je suis en partie d'accord. Pour le versement de l'aide, nous avons choisi de centraliser et donc de dématérialiser. On ne pouvait pas monter un système pour passer en dix-huit mois de rien à 700 000 chantiers sans une plateforme centralisée. En revanche, l'accompagnement téléphonique est sans doute perfectible, ainsi que la capacité à traiter les dossiers compliqués en dehors du circuit de masse. Ce dernier point a été le sujet de certains de mes échanges avec l'Anah : comment fait-on pour traiter à la main les situations compliquées ? Cela représente entre 1 000 et 3 000 dossiers par an, soit autant de ménages en difficulté. L'idée était que l'aide soit versée nationalement, mais que l'accompagnement soit local et non dématérialisé. Les Accompagnateurs Rénov' et les guichets France Rénov' doivent se trouver partout sur le terrain, y compris par le biais de permanences itinérantes dans les villes petites ou moyennes dans lesquelles on ne peut ouvrir un guichet toute la semaine.
Cela me conduit à votre question concernant les collectivités. Je ne suis pas du tout convaincue que la région soit l'échelon le plus pertinent. Quand je suis arrivée au gouvernement, la loi de 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) avait été votée et avait confié à la région le service public de l'efficacité énergétique et de l'habitat. Nous avons envisagé de revenir sur ce point, mais nous avons considéré que le combat serait compliqué, théorique, que cela risquait de rouvrir le débat sur les compétences décentralisées, et nous y avions renoncé. Il nous fallait donc faire avec. Si nous avions pu choisir, la région n'aurait pas été l'interlocuteur pertinent, comparée au département ou à l'intercommunalité. Certains départements ne se sont pas saisis du dossier et ce sont alors les intercommunalités qui l'ont pris en charge, d'autres mènent une politique efficace. Il faudrait assumer que la région conçoit tous les grands schémas à son échelle, mais qu'elle est trop éloignée des guichets et de la réalité de terrain. Elle est au mieux un relais de subventions abondées par l'État. Ce n'est toutefois pas ainsi que la loi est écrite, il me semble donc que l'on pourrait encore progresser sur ce point.
Concernant votre dernier point, pour les gestes simples et pour les ménages classiques, recevoir l'aide, en théorie, quinze jours après réception de la facture et la réalisation des travaux, ne pose pas problème, notamment parce que nous avons travaillé avec les banques pour que celles-ci développent l'éco-prêt à taux zéro. Pour les rénovations globales et pour les ménages modestes, il est évidemment impossible de sortir 30 000 euros de travaux, quel que soit le montage ; un tiers doit avancer le financement. Je croyais beaucoup dans les sociétés de tiers financement, qui sont encore très insuffisamment développées, et nous avions cherché des moyens de les généraliser. Des collectivités peuvent aussi opérer directement des régies d'avance. Pour revenir à la région, la région Île-de-France vient d'ordonner à sa société de tiers financement de sortir entièrement du financement de la rénovation énergétique des logements pour ne se concentrer que sur le tertiaire. Ces décisions relèvent des collectivités locales, mais, s'agissant d'Île-de-France Énergies, une telle évolution me semble presque criminelle, au vu des besoins. L'outil de tiers financement et d'avance est très utile. Nous avons, quant à nous, essayé de concevoir un outil bancaire dans ce domaine, le prêt avance rénovation (PAR), complémentaire de ces sociétés. C'est alors la banque qui prête, pour une durée longue, qui se résout au moment de la vente du bien ou de la succession.