Intervention de Eric Abadie

Mission commune d'information sur le Mediator — Réunion du 8 mars 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Eric Abadie conseiller scientifique auprès du directeur général de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé afssaps

Eric Abadie, conseiller scientifique auprès du directeur général de l'Afssaps :

Je ne suis pas pharmacologue. Pour moi, ce produit présente une analogie structurale évidente avec les fenfluramines. C'était du reste ce qu'a écrit le Professeur Garattini au CHMP. Le benfluorex est un hypolipémiant qui présente une analogie structurale avec la fenfluramine qui est un anorexigène. Le CHMP est sollicité en octobre 1998 et examine la lettre de du Professeur Garattini. Je crois que nous avons évoqué la possibilité d'inclure le benfluorex dans l'arbitrage fenfluraminique. Nous y avons renoncé car l'indication n'était pas la même et que le produit était présenté comme un hypolipémiant. En outre, il y avait peu ou pas de cas. Le président de l'époque a demandé au groupe pharmacovigilance d'étayer le dossier avant de déclencher la procédure dite de l'« article 12 », c'est-à-dire une saisine officielle du Comité pour des motifs d'intérêts communautaires de pharmacovigilance. Le CHMP n'a malheureusement plus revu le dossier.

Ce groupe pharmacovigilance a une fonction duale. Lorsqu'il s'occupe des problèmes de pharmacovigilance des procédures centralisées, il en réfère formellement au CHMP. Lorsqu'il traite des problèmes de pharmacovigilance des AMM nationales, ce qui était le cas du Mediator, il est un forum informel de discussion entre Etats membres. Soit l'on considère qu'il y a suffisamment de matériel pour saisir le CHMP via l'article 12, soit il est demandé à l'industriel de modifier son résumé des caractéristiques du produit qui figurent dans sa fiche au Vidal. C'est ce qui s'est fait. Le rapporteur italien a proposé deux options : le déclenchement de l'article 12 et l'envoi d'une liste de questions.

En mars 1999, le groupe pharmacovigilance ne voit pas de problème de bénéfices-risques. A la fin de l'année 1999, il décide de « jouer la carte nationale », en posant à Servier une liste de questions. J'ai signé cette lettre davantage en tant que responsable de l'Afssaps qu'en tant que membre français du CHMP. J'ai demandé à la firme de nous fournir des données d'efficacité clinique sur la glycémie sur une période de six à douze mois et des données échocardiographiques. Ce projet a été pris en charge par la pharmacovigilance de l'Afssaps. Servier a fait deux propositions d'études, une étude sur les glycémies et une étude sur les échocardiographies.

Fin 2000, une réunion a été organisée entre Servier et les rapporteurs français et italien qui se sont mis d'accord sur un protocole. Le protocole comprenant deux critères (glycémique et échocardiographique) a été validé par les responsables des centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) de Besançon et de Lille en septembre 2001. Cette étude, et notamment l'étude cardiographique, n'a toutefois vu le jour que beaucoup plus tard. Je n'ai pas d'explication sur ce point. Si ce problème avait été référé au niveau du CHMP, je ne sais pas si la décision aurait été différente, mais les délais auraient été toutefois respectés. A l'époque, nous ne donnions pas de délais, ce qui n'est aujourd'hui pas concevable.

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