Intervention de Christophe Beaux

Délégation aux entreprises — Réunion du 30 septembre 2021 à 9h00
Table ronde sur les conditions et les perspectives de la reprise économique

Christophe Beaux, délégué général du Mouvement des Entreprises de France (MEDEF) :

Mes propos liminaires se rapprocheront fortement de ceux du Président Fourny et surtout du Président Goguet, lequel est par ailleurs membre du conseil exécutif du MEDEF.

Nous sentons effectivement une montée de la confiance des chefs d'entreprise dans l'avenir.

- Seuls 20 % des patrons de PME-TPE considèrent qu'ils sont en difficulté aujourd'hui. Ce niveau est le plus bas observé depuis 2017.

- 58 % des dirigeants de PME-TPE comptent investir cette année. L'investissement a compté pour beaucoup dans le rebond de la croissance au deuxième trimestre 2021.

Je propose d'aborder les questions proposées selon trois angles d'étude. Quelles actions l'État ne peut-il absolument pas envisager ? Dans quelles situations l'État joue-t-il un rôle parfois contre-productif ? Dans quelles situations l'État peut-il réellement soutenir la croissance ?

Les pénuries sont ponctuelles. Elles concernent des matériaux de construction et des semi-conducteurs. Elles sont liées à l'accroissement des difficultés logistiques pendant la crise sanitaire. En amont de la production, l'arrêt de certaines usines a provoqué des ruptures dans la chaîne d'approvisionnement (extractions minières au Chili ou au Pérou). La phase intermédiaire de logistique a subi les perturbations du transport maritime. Enfin, en aval de la production, les phénomènes de stockage et de déstockage peuvent accentuer les pénuries.

L'État n'y peut rien, car nous vivons dans une économie mondialisée et devons prendre en compte ces facteurs exogènes. Ces pénuries peuvent provoquer des regains d'inflation comme aux États-Unis où l'inflation tangente actuellement 4,5 à 5 %. L'INSEE vient de publier une indication d'inflation à 2,1 % pour la France. La puissance publique doit-elle favoriser ou non cette situation ?

Nous sommes parfois surpris de voir que le gouvernement peut provoquer un cercle vicieux sur le plan de la politique salariale. Si certaines revendications étaient accordées, elles engendreraient une hausse des prix, de l'inflation et des salaires difficile à maîtriser. Il convient donc de rester prudent, car la question des salaires relève de la branche, voire de l'entreprise. Au sein d'une branche, les entreprises peuvent vivre des situations extrêmement différentes. C'est pourquoi le dialogue doit avoir lieu.

Nous savons que certains métiers demeurent en tension ; d'autres ont été particulièrement affectés par la crise et méritent des récompenses. Toutefois, l'État n'a pas à intervenir dans le cercle vicieux potentiel entre les prix, les salaires et l'inflation.

Nous avons constaté l'apparition de nouvelles tensions sur le marché du travail. Nous savons qu'elles préexistent à notre économie qui connaît la plus forte inadéquation des pays de l'OCDE entre le chômage de masse persistant et le volume d'emplois non pourvus. La crise sanitaire a aggravé cette situation, notamment dans le secteur des HCR.

Cette situation relève des partenaires sociaux. Il convient d'envisager des solutions en encourageant l'attractivité de certains métiers d'une part - la revalorisation éventuelle des salaires doit être décidée par les chefs d'entreprises ; en renforçant les compétences et la formation professionnelle, d'autre part.

La réforme de 2018 se révèle peu efficace. L'individualisation du CPF et sa déconnexion des besoins de l'entreprise montrent les limites du dispositif. Les partenaires sociaux ont inscrit ce sujet à leur agenda. Ils signeront sous peu avec l'U2P, le MEDEF et les syndicats de salariés, un accord relatif à la formation professionnelle qui comprend 49 propositions pour améliorer l'accord de 2018. Nous espérons ainsi, à moyen ou long terme, une amélioration de l'adéquation entre les besoins des entreprises et l'offre des salariés.

Le budget (PLF ou PLFSS) constitue un outil assez évident. La stabilité fiscale et le respect des engagements pris, comme la baisse du taux d'IS à 25 %, sont essentiels pour donner aux entrepreneurs la visibilité dont ils ont besoin pour investir et projeter leur business plan.

D'un autre côté, certaines dépenses demeurent inconnues, comme celles que prévoit le plan d'investissement « France 2030 » pour construire l'avenir. L'augmentation des charges courantes se poursuit. Elle représente onze milliards d'euros. Nous ne sous-estimons ni les difficultés endémiques de Marseille, ni le devoir de mémoire à l'égard des Harkis, ni les difficultés que rencontrent les ménages modestes pour payer leur facture de chauffage. Néanmoins, l'accumulation de ces dépenses incite les contribuables et les chefs d'entreprise à épargner par précaution.

La Banque de France estime que 157 milliards d'euros ont été thésaurisés par les Français. Pour que cet argent revienne dans le circuit économique et conforte la croissance, il convient d'éviter de dépenser indûment et de donner l'impression que des impôts futurs seront inévitables. L'OFCE a calculé que si seulement 20 % du surcroît d'épargne des Français était réinjecté dans l'économie, la croissance atteindrait 6 % en 2022.

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