Intervention de Patrick Drahi

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 2 février 2022 à 16h45
Audition de M. Patrick Drahi fondateur et propriétaire d'altice

Patrick Drahi, fondateur et propriétaire d'Altice :

Merci monsieur le sénateur pour ces très bonnes questions. Je parle d'économie et de recettes financières car c'est mon métier. Je réponds aux questions qu'on me pose. Ce n'est pas pour vous biaiser et minimiser mon rôle dans les médias. Je réponds aux questions qu'on me pose et je vous remercie pour vos questions car vous parlez de qualité, de concentration et de publicité. Le débat démocratique m'intéresse aussi en tant que citoyen.

La qualité est importante à mes yeux dans tous les domaines, pas seulement en matière d'information, car un acteur qui produit de la mauvaise qualité est appelé à disparaître. Je me souviens de mon premier rendez-vous au CSA, en 1993. Je n'avais pas un franc. On me parlait comme à un vilain capitaliste. On ne peut réussir si on ne fait pas de la qualité. BFM est une chaîne d'information et fait une information de qualité. Une information de qualité est d'abord une information fiable. Lorsqu'on diffuse une information dont on sait qu'elle est fausse, on ne peut pas parler de qualité. Lorsqu'on passe toute la journée à faire du débat sur un micro-sujet, j'appelle cela du débat et non de l'information. Celle-ci suppose de traiter les sujets et de donner l'avis des uns ou des autres. D'ailleurs, certains d'entre vous nous font part de ce qu'ils pensent de BFM. Nous sommes contrôlés par le CSA, du point de vue du temps de parole des uns et des autres. Tout le monde s'exprime et a le droit de parler. Une de vos collègues a noté tout à l'heure que certains aimaient BFM, d'autres pas du tout. Ce ne sont pas toujours les mêmes. On m'a souvent reproché que la ligne éditoriale penchait trop de tel ou tel côté, que nous donnions trop de place, ou au contraire pas assez, par exemple sur les Gilets Jaunes. Cela veut dire que ce n'est pas si mal fait que ça.

Si ceux qui sont contre deviennent pour, en fonction des évènements, cela veut dire que l'information n'est pas de mauvaise qualité. Peut-elle être meilleure ? Bien évidemment. Nous essayons toujours de nous améliorer, car si les contenus ne sont pas intéressants, les gens iront ailleurs. Nous avons trois concurrents mais nous ne pouvons pas nous comparer au journal de 20 heures sur les grandes chaînes nationales. Nous sommes une chaîne d'information. Il est certain que lorsqu'il y a un sujet désagréable qui gêne quelqu'un en France, c'est très embêtant, car on se répète sur BFM. Il n'y a pas une information nouvelle toutes les minutes. Lorsqu'il y a le feu à la cathédrale, nous sommes obligés de suivre l'évènement. Cela dure des heures, alors que le même sujet prendra trois minutes au journal de 20 heures.

Vous pourrez interroger tous les patrons d'édition chez BFM ou ceux qui étaient patrons, à l'époque, chez Libération. Ils sont très connus. Je ne leur ai jamais parlé. Je ne parle que de la qualité et du résultat économique, car il faut faire de la qualité avec les moyens que nous avons. Heureusement, et c'est l'avantage de mon groupe aujourd'hui, nous avons investi. La première chose que j'ai fait en arrivant chez BFM a été de changer les studios. Ceux-ci n'étaient pas du tout à la hauteur. Avec un rideau vert, on fait des studios incroyables. J'y ai investi 100 millions d'euros, car pour augmenter le chiffre d'affaires, il faut investir. Nous avons recruté des journalistes. Je crois que nous avons 300 ou 400 journalistes de plus que lorsque je suis arrivé. Cela a permis une augmentation de l'audience. Il en est de même pour RMC. Nous avons deux chaînes plutôt tournées vers les documentaires, RMC Découverte et RMC Story. Je reprends RMC Story, qui était une chaîne en dépôt de bilan, qui ne faisait rien. Elle faisait 0,3 % d'audience. Nous sommes à près de 2 % aujourd'hui. Nous sommes contents de ce résultat. Nous dégageons un résultat économique positif et nous allons réinvestir.

La qualité est la première motivation des chefs d'entreprise, car sans qualité, vous perdez vos clients. En l'occurrence, il s'agit des annonceurs. Si je fais de la mauvaise qualité, l'annonceur ne viendra pas chez moi. Certains médias ne fournissent pas des informations objectives. Je ne parle pas de la France mais de médias internationaux, dans des pays peu démocratiques. Aucune publicité n'est diffusée dans ces médias. Ceux-ci sont subventionnés par des Etats ou par des personnes. Cela n'a rien à voir. Nous vivons du chiffre d'affaires publicitaire. Pour faire de la publicité, il faut de l'audience et celle-ci n'existe que s'il y a de la qualité. Je pense à l'un de mes aînés qui a dix fois mieux réussi que moi. Il ne vend que de la qualité. Lorsqu'il investit dans les médias, c'est pour tirer la qualité vers le haut.

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