Intervention de Nikolaus Meyer-Landrut

Commission des affaires européennes — Réunion du 9 juillet 2020 à 8h35
Institutions européennes — Audition de s. e. M. Nikolaus Meyer-landrut ambassadeur d'allemagne en france

Nikolaus Meyer-Landrut, ambassadeur d'Allemagne en France :

Oui. On bute aujourd'hui sur deux obstacles principaux. En premier lieu, nous avons proposé à la Grande-Bretagne un accord dans lequel il n'y aura ni tarifs ni quotas pour l'accès au marché communautaire, à condition que le level playing field soit respecté - mêmes normes sociales, mêmes normes environnementales, mêmes normes en matière de protection des consommateurs. On ne peut concevoir un accès illimité des producteurs britanniques au marché européen, avec un risque de concurrence déloyale dans les domaines que j'ai évoqués.

Pour le moment, la Grande-Bretagne souhaite un accès sans quota ni tarif mais n'est pas prête à accepter les contraintes. Cela ne peut fonctionner.

Négocier les choses filière par filière, secteur par secteur, produit par produit afin d'établir une juste compensation nécessitera du temps, sans doute six ans. Il n'est pas possible, en deux mois, de trouver un équilibre. On a négocié pendant six ans avec les Canadiens.

Deuxième point dur : seule la Cour de Luxembourg peut interpréter le droit européen.

Aujourd'hui, je ne vois pas les Anglais faire marche arrière sur ces deux points fondamentaux. S'ils ne se soumettent pas à la Cour de Luxembourg et veulent faire ce qu'ils souhaitent en matière de protection de l'environnement, de consommation, etc., il n'y aura pas d'accord d'ici la fin de l'année. On ne peut négocier en six semaines.

Honnêtement, un Brexit sans accord au 1er janvier 2021 a beaucoup gagné en crédibilité par rapport à il y a un an ou un an et demi. Beaucoup d'entreprises ont commencé à prendre les devants et s'y préparent. C'est encore plus facile pour les grands groupes que pour les PME, mais les premiers à souffrir sur le marché automobile seront les usines anglaises.

Certaines entreprises japonaises ont prévu de réduire voire de suspendre la production de leurs nouveaux modèles en Grande-Bretagne. Dans une voiture comme la Mini, qui appartient au groupe BMW, environ 70 % des pièces viennent du continent et 70 % des Mini sont vendues à l'extérieur de Grande-Bretagne. A-t-on besoin d'assembler ces pièces en Grande-Bretagne ? Les groupes prendront la décision en fonction du surcoût qu'une production sur place leur impose. Ils se préparent aujourd'hui à ce genre de décision.

Il ne faut pas se faire peur, mais il faut dire aux entrepreneurs, au monde économique, aux PME que les choses vont changer de toute manière, même en l'absence de tarifs et de quotas. Il va falloir remplir d'autres formulaires, cela va leur coûter en termes administratifs, et il faut qu'ils se préparent à la situation. Des conseils très pratiques sont donnés par les douanes françaises et allemandes : toutes les entreprises peuvent s'organiser aujourd'hui. Plus elles le font, moins nous serons soumis au chantage.

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