Le Coepia est un organisme original. Il ne fait pas partie de l'administration active et n'est pas un opérateur comme la Dila ou le Service d'information du Gouvernement (SIG). C'est un forum où se rencontrent administrations, grands opérateurs publics et représentants du secteur privé. Il a été créé à la suite de la publication des circulaires Jospin destinées à pacifier les relations entre éditeurs publics et privés. Il comprend plusieurs formations, une formation plénière réunie deux fois par an et, à l'initiative du président, trois formations spécialisées : l'une travaille sur l'information administrative des usagers, la deuxième sur la réutilisation des données publiques, la troisième, que je préside, traite de la politique de publication des administrations. Des groupes de travail sont constitués au sein de chaque formation. Autre originalité du Coepia : il fonctionne sur la base du volontariat. Participent à nos travaux ceux qui y sont intéressés et qui sont à même de contribuer à nos discussions...il nous faut donc être attractifs ! Cette méthode favorise les échanges de bonnes pratiques et de réflexions. Nous essayons d'identifier les faiblesses françaises en matière d'information administrative et formulons des recommandations. Nous n'avons aucun pouvoir décisionnel. Nous auditionnons de nombreux sachants. Nous éditons une lettre mensuelle numérique diffusée à plus de 600 personnes et un rapport annuel remis au Premier ministre.
Nous exerçons notre triple mission d'évaluation, d'expérimentation et de conseil dans les domaines de l'édition publique, papier comme numérique, du renseignement administratif et de la mise à disposition des données publiques. Notre décret fondateur, en date du 11 janvier 2010, était prémonitoire : il évoquait la réutilisation des données publiques - on dirait désormais open data. Nous entretenons de bonnes relations avec la Dila, qui met certains de ses fonctionnaires à notre disposition, comme avec l'Agence du patrimoine de l'Etat (AAPIE) et les grands ministères, notamment l'intérieur, l'éducation nationale, l'environnement et le développement durable ainsi qu'avec les grands opérateurs : l'Institut géographique national français (IGN), Météo-France, l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Nous tirons beaucoup d'enseignements des méthodologies que l'Insee a mises au point pour garantir un accès aux données sensibles dans de bonnes conditions. De nombreuses questions ont été résolues par les statisticiens. En ma qualité de président du Coepia, je participe en outre aux travaux sur l'utilisation et la réutilisation des données de santé dans le cadre du groupe de travail institué par Mme Marisol Touraine. Dans ce secteur, les données sont disponibles... sinon accessibles.
L'Etat et les administrations locales, les grands services publics, les organismes de sécurité sociale occupent une place importante dans notre modèle républicain et dans la vie de nos concitoyens. Aussi, la facilité d'accès à ces administrations, aux renseignements administratifs est-elle cruciale. Nous avons des progrès à faire. Le sujet, autrefois orphelin, a été pris en main par la direction interministérielle de la modernisation de l'action publique (Dimap), et le comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (Cimap). Nous travaillons en symbiose avec eux. Avec un brin d'immodestie, je dirai que le Coepia est le think tank du Cimap. Les attentes sont considérables et certains organismes ont pris de l'avance. Les caisses nationales de sécurité sociale, de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés, de l'assurance maladie des travailleurs salariés, des allocations familiales ont développé des dispositifs intéressants de contact avec le public.
Nous avons pris l'initiative de réunir les principaux responsables des plates-formes téléphoniques des organismes privés ou publics afin qu'ils aient des échanges sur les bonnes pratiques. Ils ont été si contents qu'ils ont constitué dans la foulée une sorte de club d'échanges et de réflexion sous l'égide de Bercy.
Selon nous, il est important de « segmenter les publics », pour utiliser un langage marketing, autrement dit de calibrer la diffusion des informations en fonction de la tranche de population visée. L'information administrative est souvent de très bonne qualité mais elle n'est pas toujours adaptée à ses destinataires. Même un conseiller d'Etat peine à comprendre certains formulaires administratifs ! Il faut aussi calibrer les instruments. Les fonctionnaires du service d'accueil téléphonique du 3939 de Metz fournissent un travail remarquable mais ce service est coûteux et ne peut être utilisé comme premier contact vocal. Le téléphone mobile devient le principal mode d'accès à l'information administrative. Nous travaillons sur la mise en place d'applications mobiles. Cet outil oblige à être simple. C'est pourquoi nous recommandons désormais aux organismes que nous conseillons, à rebours de la pratique courante, de concevoir leurs applications mobile avant leur site internet.
Dans le domaine de l'information administrative, il convient de simplifier, de mutualiser et d'assurer la cohérence et l'homogénéité de l'information délivrée tout en mesurant les résultats et en maîtrisant les coûts. Nous sommes favorables à l'introduction d'une comptabilité analytique au sein des opérateurs et des grandes administrations, ce qui permet d'identifier les coûts, à l'image de la nouvelle obligation imposée à l'Etat par le règlement général de comptabilité publique de 2012, de manière à identifier les coûts de diffusion de l'information. Actuellement dans les programmes de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), l'activité de publication n'est pas identifiée en tant que telle dans les différents ministères ; elle est retracée dans les comptes « communication, « frais de personnel », « frais de fonctionnement ».
Le risque principal reste, aujourd'hui comme hier, celui de l'éparpillement, de la dispersion. Les circulaires Jospin, la Médiatrice de l'édition publique, ont marqué une première étape, achevée sauf peut-être du côté des collectivités territoriales, centrée sur le contrôle des publications imprimées. Dans un second temps - l'étape Riester, en quelque sorte - l'effort a été porté, là encore avec succès, sur la limitation de la prolifération des sites ministériels. D'un peu plus d'un millier de sites, on est passé à moins de 500, mais il faut rester vigilant. C'est le SIG qui pilote la troisième étape. L'enjeu actuel est celui des réseaux sociaux. Les ministères les utilisent déjà pour toucher les jeunes, je pense au ministère de la défense qui y a recours pour recruter les militaires du rang. Le Coepia a publié une étude sur les bonnes pratiques pour gérer les réseaux sociaux. Nous proposons des guides d'utilisation aux ministères. Les jeunes n'utilisent plus le courrier et trouvent l'ordinateur lent. Nous demandons que chaque ministère définisse une politique de publication couvrant tous ces aspects.
En matière de cartographie des sites de l'administration, des bases de données et des traitements, nous avons d'abord travaillé sur les sites juridiques. Outre Légifrance, qui est un instrument remarquable, de nombreux ministères diffusent une information juridique sur leurs sites. Il s'agit souvent de la mise sous forme numérique des anciens Bulletins officiels des ministères. Nous les avons recensés ; ils ne peuvent fonctionner qu'avec une autorisation du Secrétariat général du gouvernement. Certains de ces sites sont d'une grande utilité. C'est le cas du bulletin officiel des finances publiques-impôts (Bofif) qui remplace l'ancien système de publication des instructions fiscales de la direction générale des impôts (DGI). La base de données est impressionnante. Après des débuts compliqués, le portail fonctionne très bien. On ne peut en dire autant de la base de données des traités internationaux du ministère des affaires étrangères. Sans vouloir jeter la pierre aux services du ministère, elle a été conçue comme une base d'archives et non comme une base active dotée d'un moteur de recherche, ce qui la rend difficile à utiliser. En l'état, il est délicat de comprendre si un traité mis en ligne a abrogé ou s'est substitué à un traité plus ancien également consultable. Il est important de remédier à ces difficultés compte tenu de la place du droit international dans la hiérarchie des normes.