Le problème principal vient du fait que les étudiantes et les étudiants ne bénéficient pas de protection sociale. C'est un sujet qui est connu depuis très longtemps. Il est dû à l'allongement de la durée des études depuis la Seconde Guerre mondiale. Le système social ne s'est pas adapté à la situation décrite par de nombreux chercheurs et de chercheuses depuis des décennies. Aujourd'hui, on se rend compte des conséquences très concrètes que cela peut avoir.
Il est donc nécessaire de revoir totalement le système actuel des bourses, notamment s'agissant de la situation familiale. Les bourses sont actuellement calculées sur le revenu des parents, ce qui ne présage en rien de la réalité sociale, car on peut être en rupture familiale. Il faudrait donc commencer par rompre avec ce système et élargir le nombre de bénéficiaires afin d'augmenter les montants, les bourses les plus élevées étant aujourd'hui inférieures de 500 euros au seuil de pauvreté.
Cette réforme est promise depuis un moment, mais aucune concertation n'a été mise en oeuvre. Si elle doit entrer en vigueur à la rentrée prochaine, on peut s'inquiéter du fait qu'on n'en ait pas encore discuté ! Soit la réforme est déjà prévue et on n'a pas l'intention de nous associer à son élaboration, soit rien n'est prévu, ce qui est extrêmement inquiétant étant donné la situation que l'on connaît aujourd'hui.
Une action structurelle sur le budget de l'enseignement supérieur doit également être menée. On sait d'ores et déjà que la rentrée ne se passera pas bien, puisque le budget qui a été voté est insuffisant pour permettre que les étudiantes et les étudiants aient cours en présentiel et pour accueillir les futurs bacheliers et bachelières.
Nous ne serons de fait pas en mesure de bien gérer cette rentrée. Il faut donc investir dès maintenant dans le budget de l'enseignement supérieur. On sait qu'il faut titulariser les enseignants et enseignantes recrutés en contrat précaire ou comme vacataires. Ces personnes n'attendent que cela. Une telle mesure permettrait de régler une partie du problème.
Il en va de même concernant la santé mentale, dont la situation était déjà préoccupante auparavant. Aujourd'hui, on compte en moyenne un ou une psychologue pour 30 000 étudiants et étudiantes. Des annonces ont été faites concernant l'augmentation du nombre d'assistantes sociales et de psychologues, mais c'est une rustine ! Il faut aller beaucoup plus loin et concevoir un vaste plan de lutte contre la précarité étudiante, en faveur de la santé mentale, et transformer les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé (SUMPPS) en centres de santé universitaires pour accueillir différents secteurs en leur sein.
S'agissant de l'organisation géographique, il n'y a pas forcément d'opposition entre des campus où tout est regroupé et des universités réparties sur tout le territoire. Nous pensons que le maillage territorial est essentiel pour avoir des universités de proximité.
Je le répète : si, demain, les Crous avaient les moyens de mettre en place des lieux de restauration, des services d'aide sociale, avec des assistantes sociales, on résoudrait une partie des problématiques liées à la vie étudiante, et on permettrait à tous et toutes, quel que soit l'endroit où ils ou elles étudient, de bénéficier de ces structures.
Enfin, l'État, depuis le début de la crise sanitaire, a pris des mesures à court terme et s'est énormément reposé sur l'action des organisations étudiantes. Celles-ci ont d'ailleurs souvent été mises en avant par l'État. Certes, cela fait toujours plaisir, mais nous voudrions que l'État prenne en charge les actions que nous sommes en train de mener et augmente les bourses, ce qui éviterait de mettre en place des solutions palliatives. L'État s'est reposé sur nous alors qu'il aurait dû prendre tous ces problématiques à bras-le-corps.
Quant à la valeur du diplôme, je tiens à relativiser le sujet. La question ne se pose pas pour beaucoup d'étudiants et d'étudiantes, tout simplement parce qu'ils sont en train de décrocher, qu'ils meurent de faim ou qu'ils se suicident. La question occupe parfois plus d'espace dans le débat public que dans les préoccupations étudiantes.
Pour autant, c'est quand même un sujet. Nous sommes favorables au retour de l'aide à la recherche au premier emploi (ARPE), supprimée par le Gouvernement. Nous demandons qu'elle soit prolongée dans sa durée et son montant, et qu'elle comprenne un véritable parcours d'accompagnement, comme celui qui pourrait exister pour la « garantie jeune universelle ».