Comme le dit le juriste américain Lawrence Lessig, le code informatique crée du droit, donc il faut placer ce droit sous le contrôle des citoyens. Nous avons trop négligé l'aspect politique et juridique d'Internet, en pensant que le sujet était essentiellement technique - et nous avons laissé la place à des officines de surveillance, dont le rôle est indispensable pour la préservation de la sécurité de nos concitoyens comme de nos infrastructures critiques. Mais en l'absence d'un débat démocratique, ces évolutions incontrôlées de la surveillance pourraient avoir des conséquences graves sur le fonctionnement même de nos sociétés ainsi que sur les perspectives de notre développement économique. Pour faire en sorte que les termes de ces débats soient accessibles au plus large public, les bases du code informatique doivent être accessibles et compréhensibles par les citoyens, afin que les options en présence soient débattues, et non laissées aux mains de ceux qui voudront toujours surveiller davantage ou orienter l'opinion à des fins économiques ou politiques.
Avec quelques pays européens, en particulier l'Allemagne, je crois que nous pouvons réussir à faire savoir à l'ensemble de nos partenaires internationaux que la préservation de nos droits fondamentaux est indispensable. Cette action aurait un impact considérable sur le reste du monde. L'effondrement de Nokia nous a privés d'un outil industriel, nous n'avons hélas aucun opérateur de contenu en Europe, mais nous restons forts par le bassin de consommation que nous représentons et par notre maîtrise technologique dans le secteur des objets connectés, où nous avons des entreprises de rang mondial. La souveraineté numérique n'est pas hors sol, elle doit s'ancrer sur une réalité industrielle - et nous devons mettre nos divisions industrielles au service d'une véritable vision politique...
Enfin, et très concrètement, nous avons négligé les instances techniques où les normes d'internet sont définies, il faudrait y revenir pour ne pas laisser les Américains entre eux, ou bien on risquera de revoir la NSA payer un opérateur pour lui laisser installer quelques back doors sur le réseau...