Intervention de Pascal Boury

Commission d'enquête Pollution des sols — Réunion du 26 février 2020 à 16h45
Table ronde des représentants d'associations de défense des populations et de protection de l'environnement

Pascal Boury :

Je tenais tout d'abord à remercier la commission de m'avoir invité. C'est un honneur de représenter devant vous l'Association citoyenne. Ce sujet concerne l'intérêt général ; il est d'une importance majeure. Une étude parue dans Le Monde il y a un an et demi faisait état d'un mort sur six aux États-Unis à cause des pollutions au plomb, soit 400 000 décès par an.

Je suis ici pour dénoncer un certain nombre de choses, notamment le scandale des sols pollués, mais aussi pour formuler des propositions et informer les sénateurs et tous les citoyens qui sont à l'écoute, comme nous essayons de le faire à travers notre site Internet. J'ai écouté attentivement l'audition du directeur général de la prévention des risques hier et j'ai noté un certain nombre de sujets.

L'information constitue un sujet majeur. Elle doit être compréhensible par toutes et tous. Or il n'existe pas ou quasiment pas de balisage des zones polluées, notamment des zones dangereuses. Les exemples sont nombreux. J'en citerai trois : l'ancienne mine de Saint-Félix-de-Pallières, la mine de Salsigne ou la plage de Samena, à Marseille, où il suffit pour les enfants de passer deux heures par semaine pour être atteints du saturnisme, comme le démontre l'étude dont je dispose.

Au-delà de l'information officielle, il faut une information sur les sites qui mettent en danger la santé des citoyens. Pour moi, certaines informations relatives à l'environnement et à la santé sont de nature constitutionnelle, mais les administrations les retiennent de façon anticonstitutionnelle. Nous y reviendrons à propos des ARS notamment.

La problématique tient aussi à la dynamique des terrains pollués, à l'utilisation qui est faite de ces terrains. Je prendrai l'exemple d'un écoquartier évoqué dans une émission de grande écoute. Il est dit que l'ARS a pris des précautions : dans les jardins privatifs, pas de culture de produits de consommation alimentaires. Ces servitudes sont à inscrire dans les documents transmis aux propriétaires. Le journaliste interroge un couple qui vient d'acquérir un logement dans ce quartier. La mention de ne pas cultiver de légumes dans son jardin, le couple déclare ne l'avoir jamais lue dans son contrat de vente. Seules des mises en garde orales ont été formulées lors de l'achat de leur appartement. L'épouse précise : « la première fois, le notaire nous a expliqué qu'il ne fallait pas faire de jardin potager dans notre jardin, mais si elle nous a accordé la vente de notre bien immobilier, je pense qu'il y a un moindre risque. On fait quand même confiance à ces personnes. Pour moi, il n'y a aucun risque, puisque des études ont été faites. La préfecture a justement donné des autorisations pour la construction, donc je fais confiance à l'État ».

Dans ce même reportage, un avocat spécialisé dans ce domaine indique : « aujourd'hui, vous pouvez acheter un terrain pollué sans le savoir et surtout sans pouvoir vous en plaindre. Pire, avec les nouvelles dispositions législatives, et puisque l'on ne va pas retrouver le pollueur pour faire appliquer le fameux principe pollueur-payeur, c'est le propriétaire qui, malgré lui, va, de façon inéluctable, devenir le payeur de la dépollution ». Je pense que ce raisonnement est totalement erroné pour des terrains ou des biens achetés à des professionnels. Je suis bien placé pour le savoir, puisque cette situation m'est arrivée.

Il existe des contradictions énormes, notamment entre les écrits de l'ARS et ceux du Haut Conseil de la santé publique, l'organe situé pourtant au plus haut de la hiérarchie de la santé en France, ce qui est quand même très étonnant. Par ailleurs, les informations de l'éducation nationale et du ministère de la santé, concernant notamment des problèmes sanitaires dans les écoles restent difficilement accessibles. Lors de l'audition d'hier, vous avez évoqué par exemple les études lancées en 2012 sur les écoles construites sur des terrains pollués.

Vous avez également abordé hier la question de la responsabilité et du dédommagement. Il faut appliquer le principe du pollueur-payeur, mais pas seulement. La garantie des vices cachés existe, notamment pour les bâtiments privés achetés par des particuliers à des professionnels.

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