Ces chiffres montrent tout simplement que des villes sont engagées dans toutes les catégories de population.
Ainsi Bourges, qui compte 80 000 habitants, est une ville très engagée, de même que la petite ville de Saint-Léger-en-Yvelines, où l'on dénombre environ 600 habitants.
Concernant le déphasage générationnel, j'ai l'impression que nous avançons catégorie par catégorie. Ce déphasage est sans doute aussi la conséquence d'un modèle de gouvernance. Souvent, dans les communes dans lesquelles nous arrivons, il existe un conseil municipal des jeunes, un conseil municipal des seniors, un conseil municipal des personnes situées entre ces deux catégories ainsi qu'un conseil économique, social et environnemental. Les différents conseils nous font souvent part de leur souhait de travailler ensemble. Essayons déjà de mettre fin à ces découpages générationnels. Je ne dis pas que ces initiatives ne sont pas intéressantes, mais je pense qu'elles doivent être regroupées.
L'engagement a totalement évolué. Auparavant, il s'inscrivait sur le long terme. D'ailleurs, certaines associations peinent à ouvrir leur conseil d'administration et sont représentées par beaucoup de fondateurs et peu de nouveaux bénévoles. Les jeunes sont, quant à eux, prêts à s'engager à court terme et sur des actions précises. Il est possible, pour une association, de mobiliser des jeunes le temps d'une action sur un sujet donné. L'engagement est plus compliqué sur le long terme.
Encore une fois, il s'agit juste d'une question de format. Puisque c'est « en citoyennant que l'on devient citoyen », un jeune qui s'engage sur le court terme peut y prendre goût. D'ailleurs, lorsque nous étions dans l'Hérault, des secouristes de France nous ont indiqué que de nombreux jeunes se sont mobilisés à la suite des attentats de 2015.
Je note l'existence d'un certain individualisme. Je crois vraiment à l'organisation d'une consultation toujours large, charge aux représentants de prendre les décisions, de savoir dire non et de prendre des décisions difficiles de temps en temps, sans chercher à flatter les individualités.
Lors des réunions publiques, c'est en effet souvent le même public qui est présent, pour la plupart des seniors et des personnes systématiquement dans l'opposition.
Le dialogue avec les personnes éloignées du débat citoyen doit être engagé d'une tout autre manière. Certains sont bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Avec le département de l'Orne, nous réfléchissons à l'installation de débats et d'échanges lors des réunions avec ce public. N'attendons pas que ces personnes sortent de chez elles et s'inscrivent à un atelier : cela ne fait pas partie dans leurs pratiques. Nous devons aller vers ces publics par d'autres méthodes, relais et espaces afin de leur faire constater que le débat est possible et de leur donner goût à cette participation. Un tel format ne conviendra pas à certains citoyens car ils ne seront pas à l'aise pour prendre la parole.
Lorsque j'ai fondé Empreintes citoyennes, mon intention était de faire de la citoyenneté un sujet politique. Notre principe est que nous ne pouvons pas agir sans le politique, ce qui a fait l'objet de grands débats au sein de l'association. Nous avons désigné comme ambassadeurs politiques des sénateurs et des députés de tous bords politiques - certains néanmoins ne sont pas représentés. Nous invitons à prendre la mesure de l'enjeu de la citoyenneté. Je remercierai toujours Henri Cabanel, qui a été le premier sénateur à agir avec l'association.
Nous faisons de la citoyenneté un sujet politique, mais il faut savoir aller à l'encontre des clivages. Ainsi, lorsque nous parlons de coopération, nous évoquons aussi la coopération des élus parlementaires afin que ces derniers portent les débats nationaux dans les communes. Nous pourrons ainsi montrer que la vie politique peut ne pas être politicienne. Cette citoyenneté sera nourrie d'un grand nombre de sensibilités et a besoin de cette diversité. En effet, sans diversité, la citoyenneté est un espace sans débats ni contradictions, pourtant fondamentaux pour le développement de notre esprit critique citoyen.
Le rôle de l'association est la mise en place d'une démarche avec une vraie recherche d'autonomie. Lorsque des villes engagées dans la démarche deviennent des promoteurs de cette dernière, nous sommes heureux.
Une fois que la démarche est structurée autour d'un plan d'action, celui-ci doit être mis en oeuvre par les énergies citoyennes locales. Il s'agit de s'appuyer sur les acteurs, notamment parfois sur les entreprises, actrices de la citoyenneté du fait de leur responsabilité sociétale.
Le travail qui accompagne la mise en place d'un plan d'action permet aussi aux associations de recruter des bénévoles. Surtout, avec une démarche structurante comme la nôtre et un plan d'action lisible, les acteurs associatifs locaux voient les orientations définies collectivement et disposent d'un espace au sein duquel ils peuvent jouer un vrai rôle, être utiles et participer à cet effort commun.