secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement. - Merci beaucoup, monsieur le président, monsieur le rapporteur, pour votre invitation. Cette mission d'information me semble intervenir à un moment crucial. Je constate dans le cadre de mes déplacements et de mon portefeuille ministériel un paradoxe criant : la jeunesse est engagée au sens sectoriel et thématique, très experte de certains sujets, qu'elle prend au sérieux, comme le développement durable, les sujets de mémoire, ou l'égalité des droits. Elle sélectionne ainsi un thème qui la touche et va au terme de cet engagement, en se mobilisant de différentes manières. Pour cela, elle rejoint ponctuellement des associations, s'engage de manière militante sur les réseaux sociaux ou signe des pétitions. Les jeunes ont le goût de l'engagement.
En revanche, ce sentiment de responsabilité et d'action dans la société ne se transforme pas par l'expression démocratique plus traditionnelle. Nous obtenons ainsi des taux d'abstention qui doivent nous amener aujourd'hui, à mon sens, à tirer le signal d'alarme. 63 % des jeunes disent ne pas imaginer s'exprimer aux prochaines élections présidentielles. Neuf jeunes sur dix ne se sont pas exprimés aux dernières élections régionales. Il s'agit du symptôme d'un lien qui se détend.
Pour y répondre, nous réfléchissons, en nous appuyant sur des expertises diverses, à un parcours de citoyenneté. Celle-ci s'acquiert en effet tout au long de l'éducation et aux différents âges des enfants et des jeunes. Je m'inscris donc en articulation avec l'action du ministère de l'éducation nationale - la mère des batailles, c'est l'école -, via l'éducation morale et civique (EMC), la démocratie scolaire ou encore certaines actions portées par des maires locaux, comme le passeport du civisme, qui accompagne des jeunes dès le CM2. L'ensemble de ces actions permet de commencer à construire l'idée d'une action personnelle, dans son collectif, sur son territoire, et pose ainsi le sujet de la citoyenneté aujourd'hui.
Pour répondre à votre question sur le SNU, nous le considérons comme un temps clé, entre 15 et 17 ans, soit à la veille de l'expression démocratique et à un moment où le jeune dispose de bagages institutionnels et historiques suffisants pour comprendre les actions possibles du citoyen. Le SNU comprend plusieurs modules obligatoires qui permettent de vivre les valeurs de la République et la démocratie. Cela s'inscrit dans la suite du rapport des députées Marianne Dubois et Émilie Guerel de 2018 sur le SNU. S'agissant du séjour de février - et je me réjouis que vous ayez l'occasion de rencontrer des jeunes en SNU -, plus de 3 000 jeunes effectueront leur SNU, pour la première fois sur du temps scolaire et du temps de vacances. Il s'agira également de la première session en dehors du temps estival, afin de permettre à des jeunes qui travaillent l'été ou suivent des formations professionnelles de bénéficier de ce temps de citoyenneté. Compte tenu du contexte sanitaire, nous avons limité l'effectif de cette session à 3 000 jeunes. 3 292 dossiers d'inscription ont été ouverts. Les cars partiront dimanche pour rejoindre les différents centres. La trajectoire de 50 000 volontaires est atteignable car la courbe des inscriptions se poursuit. Les présentations ont en outre été démultipliées, via la mobilisation des enseignants, recteurs et professeurs, mais aussi des associations (sportives, culturelles), des MDPH (maisons départementales des personnes handicapées) et des missions locales. Il s'agit d'autorités qui ont la confiance des jeunes. Concernant la diversification des profils et des parcours, 35 % de jeunes viennent des territoires ruraux, 7,6 % des quartiers prioritaires de la ville et 3,5 % sont en situation de handicap. Nous avons donc des enjeux pour rechercher davantage de mixité.
Ce projet ne sera totalement universel que s'il est obligatoire. Nous aurons ainsi besoin d'un débat au sein du Sénat et de l'Assemblée nationale pour savoir si la représentation nationale souhaite le rendre obligatoire. Avant d'arriver à ce temps législatif, ma mission est de rechercher cette diversité pour identifier les éventuelles difficultés ou opportunités qu'elle crée.
Sur la question de la parité, d'abord, celle-ci est parfaite. Nous comptons cette année 50,5 % de jeunes filles, contre 52 % de jeunes filles l'année dernière. Concernant les différentes cohortes et l'évolution dans les missions d'intérêt général (MIG), il s'est beaucoup posé la question de l'équilibre entre le monde associatif et les structures de corps en uniforme. 66 % des jeunes effectuent leur mission d'intérêt général dans une structure associative ou une collectivité. Le nombre de collectivités qui s'engagent est croissant. Il est nécessaire de permettre à des jeunes dans des territoires ruraux, plus isolés, de bénéficier de MIG au plus près de leur territoire. Nous avons été alertés par un certain nombre de jeunes qui n'avaient pas la possibilité d'effectuer leur mission d'intérêt général à proximité. Ces jeunes de 15 à 17 ans ont peu de moyens de mobilité, et il nous appartient donc de leur donner toutes les chances de suivre ce parcours. Je souhaite remercier chaleureusement les cadets de la gendarmerie, de la police et la DSNJ (direction du service nationale et de la jeunesse, au sein du ministère des armées). 30 % des jeunes rejoignent ces structures. Il est par ailleurs possible de réaliser ces missions d'intérêt général d'affilée (et non perlées un samedi par semaine), ce qui permet à des jeunes plus éloignés de bénéficier de ce temps et de participer à la diversité des offres. Presque tous les départements ont aujourd'hui une association des cadets de la gendarmerie, ce qui est une chance pour porter ce projet sur chaque territoire.
Il s'agit en outre de renforcer le socle républicain. Des débats ont porté sur la levée de drapeau ou le port de l'uniforme lors du séjour de cohésion. Ils sont encore nombreux. La citoyenneté passe également par l'appropriation de symboles communs. Le port de l'uniforme, qui peut être perçu comme un élément militarisant, permet de vivre la mixité sociale, sans attention portée aux marques ou à la situation sociale des volontaires. Cet uniforme est en l'occurrence vécu comme une fierté, ce qui amène ces jeunes à participer aux cérémonies mémorielles dans leur commune, aux côtés des anciens combattants ou des élus locaux. J'ai l'habitude de leur dire qu'un uniforme ne se range pas dans un placard, mais se porte. C'est une fierté et une responsabilité.
Le service civique est la troisième étape du SNU. Il reste volontaire, mais étant ouvert aux jeunes de 16 à 25 ans ou 16 à 30 ans s'ils sont en situation de handicap, il est l'opportunité de poursuivre ce parcours d'engagement. Pour moi, il s'agit de l'élément d'évaluation réel de la réussite de l'investissement des deux premières étapes.