Intervention de Antoine Peillon

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 17 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de Mm. Antoine Peillon journaliste à la croix charles prats magistrat membre du conseil scientifique du conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégiques et christian chavagneux journaliste à alternatives économiques

Antoine Peillon, journaliste à La Croix, auteur de « Ces 600 milliards qui manquent à la France » :

Malheureusement, les fonctionnaires et hauts fonctionnaires que j'ai rencontrés m'ont tenu un tout autre discours. Ils m'ont tous confié que, depuis quelque temps, le poids de leur hiérarchie et de leur tutelle politique était de plus en plus sensible et que l'on n'hésitait pas à utiliser le recrutement et l'avancement pour les empêcher de faire complètement leur travail. Nombre de fonctionnaires de police, même des agents affectés au renseignement intérieur, m'ont dit combien ils enviaient la culture d'indépendance de la douane. Y compris en matière de terrorisme, il semblerait que beaucoup d'informations de très bonne qualité proviennent de la douane.

Ces fonctionnaires de police se font l'écho d'un problème d'indépendance vis-à-vis de leur tutelle, qui n'hésite pas à utiliser les leviers du recrutement - il semblerait qu'il ait été de plus en plus ciblé ces dernières années - et de l'avancement - les mises au « placard » ne sont pas rares. Au fil des années, j'ai vu de très nombreux agents de police, officiers ou commissaires de très grand talent, quitter la fonction publique, considérant qu'elle était dans une impasse, voire qu'il était indigne d'y travailler.

En ce qui concerne la magistrature, monsieur Prats, je suis désolé, mais de nombreux magistrats me disent qu'il n'y a jamais eu un tel problème d'indépendance. C'est vrai au parquet, avec quelques parquets qui s'illustrent plus particulièrement, mais aussi au siège - je pense notamment au témoignage de certains juges d'instruction que j'ai pu recueillir.

J'ai encore entendu M. Lyon-Caen, une autorité reconnue, en témoigner de façon très virulente il y a peu. Là aussi, beaucoup de magistrats disent clairement que, par le biais de la nomination, de la promotion - je ne reviendrai pas sur une promotion particulière à laquelle vous faisiez référence tout à l'heure, monsieur Prats, et au sujet de laquelle mon livre est effectivement un peu confus - ou, au contraire, de la mise au placard, on les contraint à ne pas faire, ou à faire a minima. Beaucoup de magistrats me disent qu'ils vivent dans cette ambiance depuis plusieurs années maintenant. Je suis désolé d'apporter cette note un peu pessimiste !

Enfin, puisqu'on parlait tout à l'heure des informateurs, je précise que certaines de mes sources m'ont dit qu'elles étaient prêtes à venir témoigner devant vous, hors anonymat, une fois passées les prochaines échéances électorales, c'est-à-dire aux alentours du 10 mai. Il pourrait être intéressant que vous les entendiez.

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